Delphine JACOB, Architecte DPLG, enseigne les Arts Appliqués, au Lycée Haute Vue de Morlaàs. En 2015, elle soutient sa thèse à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne: Pierre Guariche Designer-Architecte d'intérieur et les nouveaux programmes architecturaux issus de la croissance. Fin 2020, elle publie aux Editions Norma, Pierre Guariche (co-auteurs, L. Blaisse, A. Jeauneau).
Résumé
Lors de la Reconstruction, la pratique professionnelle de l'Atelier de Recherches Plastiques (ARP) s'inscrit dans un contexte historique qui conduit ses membres à étudier la rationalisation du matériel domestique. Leur carrière est jalonnée par leur appartenance à des ateliers aux modes de l'habité différents : de l'atelier pédagogique, à l'atelier salarial, jusqu'à la création de leur atelier collectif expérimental. Ainsi, comment l'étude de leur parcours, au sein de ces ateliers, contribue-t-elle à l'analyse stylistique de leur œuvre ?
Summary
During the Reconstruction, Pierre Guariche's work is part of a historical context that leads him to study the rationalization of domestic material. Their career is marked by their membership in workshops with different modes of habituing : from the educational workshop, to the salary workshop, to the creation of their experimental collective workshop. Thus, how does the study of their career, within these workshops, contribute to the stylistic analysis of their work ?
Introduction
Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, la France est confrontée à une crise du logement sans précédent car le bilan des destructions est particulièrement lourd. Pour reconstruire le pays, le Gouvernement provisoire de la République française, dirigée par le général de Gaulle, crée, le 16 novembre 1944, le ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme, qui est le principal maître d’ouvrage de ce chantier. En 1947, le MRU veut atteindre un objectif : l’industrialisation de la construction de logements à caractère social.
Face à l’état d’urgence, il lance des concours expérimentaux afin d'inciter les architectes à orienter leurs recherches vers la standardisation de la construction. C’est ainsi que des procédés techniques nouveaux, comme la préfabrication lourde, se développent à partir de leurs travaux, et permettent de rationaliser les techniques de fabrications industrielles. L’industrialisation de la construction de logements entraîne ainsi pour les architectes l’adoption d’une méthode qui passe par la création de plans-types rationnels. Ce contexte historique et politique explique l’engagement de l’Atelier de Recherches Plastiques (ARP), dans la conception de programmes complets d’objets destinés à meubler les logements standardisés de la Reconstruction. En effet, ce trio comprend que le mobilier de série, fabriqué par des procédés industriels et à des prix raisonnables, est une nécessité pour la population Française.
Le renouveau des arts décoratifs est incarné par leur atelier collaboratif qui fonde sa pratique professionnelle sur les principes du courant rationaliste social pour tendre vers le design pour tous. Leurs créations représentent le style 50 qui rompt avec les modèles artisanaux de l’époque dont l’esthétique ornementale n’est pas adaptée à la production en série. Ces acteurs de la modernité sont au service de l’enveloppe bâtie, comme à celui des futurs habitants, pratique toujours en vigueur dans certains cabinets de design contemporains.
1. De la pédagogie à la pratique
1.1 Marcel Gascoin : maître de l'atelier Reconstruction
Longtemps boudé par les historiens du design, l'œuvre des décorateurs-créateurs d'ensembles des Trente Glorieuses suscite depuis quelques années l'engouement des fabricants pour la réédition de meubles des années 1950/1960. Cette tendance favorise la reconnaissance du travail des créateurs hexagonaux comme celui de l'Atelier de Recherches Plastiques (ARP) dont la production mobilière inscrite dans un contexte historique les a menées à travailler sur la rationalisation du matériel domestique.
La carrière prolifique des membres de l'ARP est jalonnée par leur appartenance à des ateliers aux modes de l'habité différents : de l'atelier pédagogique des écoles d'art, en passant par l'atelier salarial de Marcel Gascoin, jusqu'à la création de leur atelier collectif expérimental. L'étude de leur itinéraire, au sein de ces derniers contribue à l'analyse stylistique de leur œuvre inscrite dans une époque : c'est-à-dire une production style 50. Appréhender le parcours professionnel de Pierre Guariche, membre fondateur de l'ARP, permet de saisir le dessein de ce laboratoire de « Forces Utiles » peu connu du grand public. Ce trio propose pour la fabrication en série des modèles innovants de meubles, d'assises tant d'un point de vue formel que fonctionnel, alliés à des techniques pointues à l'image des luminaires.
À l'issue de ses études secondaires au Lycée Arago, Pierre Guariche désire étudier aux Arts et Métiers. Suite à son échec au concours d'entrée, il démarre en 1946 des études d'ingénieurs à l'école Breguet. Mais, cet enseignement ne l'enthousiasme guère. Il change d'orientation et entre directement en deuxième année à l'École nationale supérieure des arts décoratifs. Après un an de service militaire, il obtient son diplôme en 1949, spécialité architecture intérieure, après avoir suivi la pédagogique de l'atelier René Gabriel fervent défenseur du mobilier de série.
C'est pourquoi le travail de Pierre Guariche, qui s'inscrit dans un contexte de restriction, le conduit à étudier la rationalisation du mobilier car les plans-types imposent de nouvelles normes pour ses créations1. Les réglementations de la reconstruction, instaurées par l'État pour résoudre le problème de la crise du logement, vont donc conditionner sa carrière au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Préoccupé par les besoins de la population, réflexion qui le rapproche d'un design humaniste européen2, il conçoit des meubles modernes dans le but de tendre vers une production sérielle afin d'obtenir des prix modérés pour les consommateurs3. Comme l'exprime déjà Le Corbusier en 1925 : « Nous voici dans la fabrication, dans l'industrie ; nous sommes à la recherche d'un standard, nous sommes loin du cas personnel, arbitraire, fantaisie, loufoque ; nous sommes dans la norme et nous créons des objets-types4. »
Marcel Gascoin, Mentor des jeunes créateurs de l'après-guerre, élabore un nouveau cadre de vie, en adéquation avec les objectifs de Pierre Guariche. Son mobilier, proche du design suédois, s'affranchit du luxe inaccessible des Arts décoratifs. Il impose des lignes plus épurées qui font entrer en France le design, pratique déjà instaurée dans d'autres pays européens comme la Suède, la Grande Bretagne ou l'Italie. Son œuvre s'inscrit dans la lignée des desseins des membres de l'Union des Artistes Modernes (UAM) à l'image des précurseurs comme René Gabriel ou Francis Jourdain « qui, conscient très tôt de la nécessité de démocratiser l'art, voulait le beau pour tous5. » Il incarne par la volonté de rendre accessible au plus grand nombre de personnes, le mobilier contemporain produit industriellement6, l'aspect du rôle social du créateur, compétence essentielle des futurs designers français d'après-guerre.
Durant la Seconde Guerre mondiale, en vue d'atteindre son but, Marcel Gascoin élabore un travail de recherches sur la normalisation d'objets de notre quotidien, pour inventer une série de meubles fonctionnels adaptables aux dimensions des logements type Reconstruction. Il présente une partie des résultats dans le numéro 10 mars 1947, de L'Architecture d'aujourd'hui. La même année, il réalise de multiples croquis pour l'Association française de normalisation (Afnor) qui applique les principes de rationalisation au matériel ménager. Comme le précise Marcel Gascoin, il faut : « penser l'intérieur » d'abord, en d'autres termes adapter le contenant au contenu7. » Ces normes lui servent à mettre au point les rangements Gascoin.
Dans la continuité de son ascension professionnelle, René Gabriel le charge de coordonner la mise en scène de dix appartements à l'Exposition internationale de l'urbanisme et de l'habitation au Grand palais, exposition placée sous le parrainage du ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme (MRU). Ce travail, en collaboration avec René Gabriel, favorise son implication dans la conception de mobilier de grande série à vocation sociale. Atteint de tuberculose en 1948, celui-ci cède progressivement à Marcel Gascoin ses chantiers et ses responsabilités8. Il voit en lui le seul spécialiste français qui maîtrise le processus complexe de mise sur le marché de meubles de série, à travers les étapes de la création, de la production jusqu'à la commercialisation. C'est pourquoi :
« S'appuyant sur une solide réputation, son atelier de la rue Rennequin devient un passage obligé pour l'élite des jeunes décorateurs qu'il regroupe, avec l'aide de René-Jean Caillette, dans l'Association des créateurs de meubles de série (AMCS), à des fins de diffusion et de protection des modèles et des droits9. »
Son bureau d'études et son atelier de montage de meubles accueille les jeunes créateurs, comme Pierre Guariche, Alain Richard, Joseph-André Motte, Michel Mortier ou encore Pierre Paulin, qui se passionnent pour la conception contemporaine de mobilier et d'éléments de rangement rationnel de série. La structuration du travail au sein de son atelier s'organise selon une division hiérarchique du travail avec entre autres le poste de chef d'agence, ou celui de dessinateur-projeteur, sous la supervision de Marcel Gascoin. Cette histoire fait écho au parcours professionnel de Peter Behrens qui a des époques différentes, forme dans son atelier : « Walter Gropius, Ludwig Mies van der Rohe et Le Corbusier [...] ; ils devaient tous être appelés à jouer un rôle essentiel dans le domaine de la création architecturale et du design10. »
En 1949, après l'obtention de son diplôme, Pierre Guariche débute comme une évidence sa carrière en tant que dessinateur-projeteur chez Marcel Gascoin son maître d'atelier de quatrième année à l'École nationale supérieure des arts décoratifs. Au cours de cette période, il fait la connaissance de Michel Mortier alors chef d'agence et de Joseph-André Motte qui prend sa place à son départ. Marcel Gascoin transmet à Pierre Guariche, le goût des innovations techniques et des recherches formelles de modèles esthétiques industriels. Mais à cette époque, les fabricants de meubles sont réticents vis à vis des formules modernes et s'enferment dans le bas de gamme et le faux luxe. Pour remédier à ce problème, Marcel Gascoin aide Pierre Guariche à exposer ses modèles de série principalement au Salon Arts Ménagers (SAM), lieu facilitant la rencontre entre les créateurs et les entreprises.
Parallèlement, Marcel Gascoin veut conquérir les premiers grands réseaux de distribution, comme l'indique Louis Brulliard dans la revue des Arts ménagers :
« À notre époque, le meuble destiné à la vente courante doit inévitablement être fabriqué en série ; cette formule de fabrication est la seule, en effet, qui permette de parvenir à des prix de revient assez bas pour que la production reste accessible au plus grand nombre11. »
Ses meubles de série, ainsi que ceux de ses collaborateurs, sont vendus dans la boutique attenante sous la marque ARHEC (Aménagement rationnel de l'habitation et des collectivités) à l'image des nombreux ateliers-boutiques urbains de la fin du Moyen Âge. L'espace professionnel proposé par Marcel Gascoin correspond à un lieu pédagogique où se rencontre la création artistique alliée à l'artisanat avec comme outil de base le dessin. Travailler sous forme d'atelier, pour favoriser les échanges disciplinaires, a permis à ces artistes de proposer du mobilier de série au style uniforme. Ils accordent par conséquent la possibilité aux futurs clients de grouper dans un même lieu des pièces de différents créateurs afin de réaliser un ensemble esthétique harmonieux. Cette proposition inédite faite aux potentiels consommateurs est le résultat de rencontre d'idées issues de la science, de l'art, de l'économie et de la politique. En 1947, l'interventionnisme étatique se traduit par l'organisation de l'Exposition Internationale de l'Urbanisme et de l'Habitation au Grand Palais sous l'égide du MRU. Cette manifestation a pour objectif d'encourager la conception et la production d'équipements en série, destinées à l'aménagement intérieur des programmes d'habitation de la Reconstruction. En 1948, l'État poursuit son intervention par le biais du MRU en confiant à Paul Breton, lors de la réouverture du SAM, l'organisation d'expositions consacrées à l'innovation dans l'habitation. Contrainte de se remeubler dans l'urgence, la population française trouve dans ses biens mobiliers le rôle social du designer, qui je pense, rejoignent les idées de Vilém Flusser pour lequel :
« L'artiste n'est pas intéressé dans la communication des expériences privées : cela serait d'ailleurs ennuyeux. Son intérêt, c'est de nous proposer des formes nouvelles pour nos expériences futures, et d'ainsi enrichir notre réalité (et la sienne)12. »
Sous la direction de son maître d'atelier, Pierre Guariche se forme à la promotion du travail de décorateur-créateur d'ensembles dont le mobilier style 50 s'adapte aux espaces normés des appartements standardisés de la reconstruction ; dessein qu'il poursuit lors de la création de l'ARP, un des tout premier collectif de designers français.
Ils participent d'une manière concertée au fonctionnement de leur entreprise avec comme objectif commun la production de meubles modernes.
1.2 Naissance d'un atelier design
Installé à son compte depuis trois ans, Pierre Guariche est très sollicité. Il propose à Michel Mortier et Joseph-André Motte, rencontrés précédemment au sein de l'Atelier Marcel Gascoin, de s'associer pour fonder « une société qui avait pour but de faire de la recherche13. » Ces trois jeunes créateurs, curieux et inventifs, comprennent qu'ils doivent se fédérer autour d'un projet commun : la promotion de leurs meubles de série auprès des industriels. En octobre 1954, pour mener à bien leur idéal, ils créent l'ARP dont ils installent les bureaux chez David Vernhes, négociant au 19 rue du faubourg Saint-Antoine, qui diffuse leurs modèles sous l'enseigne DMU (Diffusion Mobilier Utilitaire).
Fort de son talent, l'ARP s'impose en France grâce à la modernité de sa production qui défait les codes du mobilier traditionnel. À l'initiative de ses membres, tous les modèles sont signés ARP, une des toutes premières tentatives de signature collective dans l'histoire du design français, quand bien même sur certains brevets figurent le nom du créateur. « Leur but est de regrouper des efforts individuels dispersés pour obtenir une amélioration de la qualité dans le domaine de la création, de l'étude et de la mise au point d'éléments destinés à la fabrication en série14. »
Ce trio de techniciens assure aux consommateurs une qualité d'exécution dans un marché français anarchique. Il recoure aussi au label de l'Association des Créateurs de Modèles de Série (ACMS) créé par Marcel Gascoin, outil de communication, qui protège la propriété intellectuelle des modèles déposés par les nouveaux talents de son atelier. Chaque création porte la griffe ACMS suivie du nom du créateur pour protéger à la fois leurs éditeurs et leurs clients. Ainsi, sur le stand ACMS au SAM :
« Si l'ensemble témoigne d'une esthétique homogène, chaque créateur reste identifiable. Les sièges présentés sont édités par Steiner, notamment la chaise Tonneau dessinée par Guariche et le fauteuil Corb de Motte ; le mobilier — dont les fameux éléments de rangements conçus d'après un prototype de Mortier — est fabriqué par Minvielle15. »
Fauteuil Corb, conçu en 1955 par l'ARP, édité par Steiner. Fonds d'archives Pierre Guariche.
Pour continuer leur ascension sur le marché du meuble moderne, l'ARP met en place une stratégie de communication qui use de divers outils afin de se faire connaître auprès des consommateurs. En 1955, il s'expose à travers la mise en scène de trois stands différents lors du 24e SAM au Grand Palais. Le SAM, que visitent désormais professionnels et grand public, devient un haut lieu de la consommation16 grâce à la diffusion du prêt. Cet espace d'exposition commerciale se donne plutôt un rôle d'éducation en orientant l'investissement des ménages vers l'amélioration de la vie domestique. Le retour de la prospérité au milieu des années 50 autorise un réel accès aux biens présentés favorisant ainsi la diffusion des innovations. Cette vitrine efficace permet aux consommateurs de découvrir un éventail de mobiliers adaptés à l'habitat de la Reconstruction.
Dans la même période, les revues spécialisées d'architecture et de décoration se tournent vers une nouvelle opportunité : la presse féminine moderne. Conscient des débouchés offerts par ce support de communication à l'intention de la maîtresse de maison, l'ARP utilise ces magazines féminins pour communiquer sur son mobilier style 50. Des revues, telles La Maison Française, Maison et jardin ou Arts ménagers publient des articles consacrés à leurs meubles pour asseoir la promotion d'une vision moderniste de l'aménagement domestique. L'ARP s'adresse par cette voie à la femme moderne à l'aide de conseils techniques explicités par des schémas, forme d'urgence pédagogique, qui vulgarise la manière d'agencer rationnellement les espaces du foyer, comme la cuisine. Cette promotion du bon goût se fait également grâce aux soutiens stratégiques des éditeurs, comme Steiner, Minvielle, Disderot, qui se servent de leurs modèles basés sur une esthétique commune pour illustrer des publicités collectives17, avec comme fer de lance Guariche dont l'idée : « était que ce groupe d'industriels édite des collections qui aient un air de famille, se souvient Joseph-André Motte18. »
En 1956, pour affirmer leur appartenance au style 50, ils créent avec Steiner des assises dont la conception repose sur une coque de bois garnie de Dunlopillo agrémentée d'accoudoirs, disponible avec deux hauteurs de dossier. Son faible encombrement en fait un fauteuil compact confortable pour le quotidien. Avec cette création, l'ARP répond à un cahier des charges imposé aux concepteurs d'après-guerre : concevoir un meuble de série qui s'adapte aux nouvelles méthodes de production industrielle, à la rationalisation de l'espace des habitations standardisées des années 50. Pour rentabiliser sa fabrication, il exploite les qualités intrinsèques de sa coque ergonomique qui permet la déclinaison de différentes références, à l'image de la Tonneau et de l'Amsterdam. Il cherche à obtenir des prix de revient compétitifs, objectifs prônés par le plan Marshall. Ainsi, il décline ce modèle en Chauffeuse 642, juxtaposable servant à l'occasion de banquette avec un piètement en métal ou en bois. Le Fauteuil 643 est disponible avec des accoudoirs métalliques à l'inverse du Fauteuil 1005 en bois massif courbé. Avec les accoudoirs pleins, le siège se nomme 645. L'ARP explore également le cadre lamellé collé avec le Fauteuil 690 à l'image d'Alvar Alto.
Fauteuil 690, conçu en 1956 par l'ARP, édité par Steiner. Fonds d'archives Pierre Guariche.
L'ARP, véritable laboratoire de « Forces Utiles », a conscience qu'il faut produire de Beaux objets du quotidien esthétiques et fonctionnels pour le plus grand nombre de foyers français. Il essaie d'anticiper les désirs des consommateurs en l'absence d'études en marketing qui ne sont pas d'usage à l'époque dans les industries de l'hexagone. En effet, les entreprises françaises ne disposent pas d'études de marché, de budgets publicitaires adéquats, d'emballages attirants, de self-services vendant au détail, et de crédits-clients. Combler ce retard en urgence est un objectif que vise les membres de l'ARP à travers son projet social et économique en anticipant des besoins jamais exprimés auparavant.
2. De l'atelier à la production
2.1 Les concours : l'indispensable association créateur-éditeur
En 1954, l'ARP participe au « Concours du meuble français de série » organisé par le Centre Technique du Bois (CTB). Il souhaite promouvoir la création de mobiliers modernes en accord avec le Ministère du logement et de la reconstruction. Ce concours, pour des « maisons économiques et familiales » de type F3, permet à l'ARP de renforcer une méthode de travail déjà éprouvée : l'association créateur-éditeur.
Charles Minvielle, est le premier industriel qui développe un réseau de concessionnaires exclusifs. Cette démarche commerciale, l'association éditeur-distributeur, enthousiasme les membres de l'ARP qui recherchent des entrepreneurs téméraires prêts à prendre des risques pour faire évoluer un marché français où règne l'immobilisme.
L'entreprise Minvielle met à leur disposition des outils de production modernes mécanisés, qui leur permettent de concevoir des prototypes, mais aussi d'expérimenter de nouveaux matériaux comme les dérivés du bois, matériaux propices à l'industrialisation. Cette méthode, la mise au point de prototypes destinés à la production en série, rappelle les orientations des ateliers laboratoires du Bauhaus tournées vers l'esthétique industrielle. La rédactrice Paulette Falconnet expose dans la revue Arts ménagers son point de vue concernant les qualités d'un bon meuble de série, par les commentaires qui suivent :
« C'est une question à laquelle tout le monde ne répond pas de la même manière. Le créateur-décorateur dira qu'il doit avant tout être original ou agréable à regarder. L'éditeur de meubles et l'éditeur de sièges répondront qu'il doit pouvoir être fabriqué industriellement, pour que son prix de vente puisse rester assez bas. L'acheteur, lui essaiera de concilier le plus beau avec le plus utile ; il se laissera guider par la nécessité, ou séduire par le prix19... »
Conjointement avec Minvielle et Cabanne, l'ARP remporte trois prix : deux 1er prix pour la salle de séjour et la chambre des enfants puis un 2e prix pour la chambre des parents. Ces ensembles sont complétés par les sièges de Steiner et les luminaires de Pierre Disderot. La principale contrainte des équipes est le respect d'un prix global de vente maximum imposé pour les différentes réalisations qui correspond à l'indemnité allouée par l'État aux sinistrés comme dommages de guerre. Les réalisations de l'ARP sont le fruit de recherches exploratoires liées aux choix judicieux de matériaux qui allient les facteurs suivants : la production d'objets esthétiques solides et économiques. Ces meubles inédits, produits par Minvielle et Cabanne, sont présentés dans un catalogue. Composés de panneaux de particules standardisés taraudés sur les éléments métalliques de section carrée, le client potentiel peut par conséquent personnaliser les bahuts, commodes, rangements, armoires selon ses besoins. À cette occasion, Steiner développe quatre assises en collaboration avec l'ARP. La chaise Amsterdam, variante de la chaise Tonneau dessinée par Pierre Guariche en 1954, meuble la salle à manger, ainsi que le Fauteuil de repos Corb. Dans la chambre des enfants, trône derrière le bureau, la chaise Papyrus : « montée sur un piètement dessiné par Michel Mortier, qui sera édité dans sa forme définitive en 195620. »
Toutes ces idées nouvelles voient le jour dans un contexte de restriction où la valeur du produit optimisé prend tout son sens, car l'ARP est conscient des besoins de la population. Il se démarque de ses confrères en bénéficiant d'outils de production à la pointe associés à une stratégie marketing qui balaient tout, de la fonction aux considérations pratiques et esthétiques (forme, matériau, couleur, finition) jusqu'à la commercialisation. Leur atelier fait le choix collectif de s'impliquer dans ce processus complexe pour adapter au mieux chacune de leur création au marché émergent du mobilier contemporain de série. Certains industriels, tels Formica allié à Minvielle, leur offrent un soutien matériel, technique et financier pour réaliser des prototypes.
En 1956, lors du Salon des Artistes Décorateurs (SAD), l'ARP présente pour le concours Formica une salle de séjour avec ce revêtement stratifié jaune bouton-d'or, comme décrit dans un article de La maison française :
« Des éléments juxtaposables, en frêne sur piétement métallique, sont aménagés en bar, radio, placard de rangement, etc. Faisant corps avec les éléments, la table de repas pour 2 ou 3 personnes est recouverte en Formica et forme de l'autre côté, bureau21. »
Concours Formica, conçu en 1956 par l'ARP. Fonds d'archives Pierre Guariche.
La table établit un décrochement dans le plan rectangulaire composé par les caissons en bois clair de chez Minvielle. Les repas se prennent soit en tête-à-tête, soit à quatre le tout éclairé par le plafonnier 3077 de l'ARP, édité par Pierre Disderot. Des chaises rouges Amsterdam de Steiner accompagnent les fauteuils G1 de chez Airborne, dessinés par Pierre Guariche. Deux banquettes juxtaposées disposent également d'un élément qui consiste en un décor mural en Formica jaune fixé au-dessus des coussins rouges qui tranchent avec les rideaux Gratte-ciel de Jacqueline Iribe. Pour achever ce concept novateur, il dispose un fauteuil Corb A7, face à une table de Pierre Guariche tous deux édités par Steiner. Une moquette et un tapis beige en nylon, fabriqués par Surnyl, recouvrent le sol. Les lignes épurées de cet aménagement s'adoucissent grâce à la présence des couleurs vives du Formica éclairées par le lampadaire G 41 bis et la lampe à poser E 16 en Rotaflex.
Par le biais de ce concours, Formica s'offre les services du bureau d'études ARP pour améliorer l'esthétique des objets industriels recouverts par son produit phare en vue d'éduquer le goût du public au style 50, à l'image de Jacques Viénot dirigeant de Technès. Fondée en 1948, sa société, unique en son genre en France, propose les services d'un bureau d'études spécialisé dans l'esthétique industrielle qui est pour lui « la science du beau dans le domaine de la production industrielle22. » L'ARP s'inspire de ses idées car il crée pour Formica et Minvielle de nouveaux objets, dont l'évolution technique repose sur l'utilisation de nouveaux matériaux à l'image de Technès pour Calor sans pour autant endosser le statut de styliste industriel23. Formica, dont la volonté est de s'introduire sur le marché français, permet à l'ARP la création de beaux objets qui marquent la transition entre les arts décoratifs et le design en phase avec les tendances de l'univers de la maison. Par là même, il crée l'air du temps grâce à l'identité de cette marque à la pointe de l'innovation industrielle, image commerciale qui est un moyen de fidéliser le consommateur, matraqué par le slogan : « Le vrai Formica, c'est vraiment formidable ! ».
2.2 L'ARP au Salon des arts ménagers
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le SAM, qui joue un rôle social au sein de la société française, se veut avant tout éducatif afin de faciliter les choix des consommateurs car il est le lieu de l'évolution des techniques et des conceptions. Pour encourager l'ARP, dont les desseins sont dans la lignée des membres de l'UAM, Marcel Gascoin leur ouvre les portes du SAM dont il supervise la section « Le Foyer d'aujourd'hui ». Malgré une création mobilière prolifique, en France, l'ébénisterie, s'impose encore comme une tradition au sein des familles, avec son style travaillé synonyme de qualité. La classe moyenne, qui raisonne en termes de patrimoine, ne se résout pas à s'équiper avec du mobilier produit en série, puisque pour le même prix elle peut se meubler en style ancien garant d'un certain statut social.
« Une longue habitude, des goûts ancestraux nous inclinent à considérer comme acceptables et même désirables des formes d'ameublement dont les types remontent, à vrai dire, au XVIII^ème^ siècle, alors que la vie mondaine avait atteint tout son raffinement, mais qui n'ont plus de notre temps d'usage réel24. »
En effet, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l'industrialisation de la construction conduit les architectes à adopter une méthode qui passe par la création de cellules types dont l'objectif est l'abaissement du prix de revient du logement. La conséquence est la création de plans normés aux surfaces réduites qui ne peuvent plus accueillir les meubles imposants hérités des aïeux. C'est pour cette raison que l'ARP travaille sur la rationalisation de mobiliers standardisés, transformables et de faible encombrement pour s'insérer dans des espaces exigus. Pour former les français aux meubles style 50, l'ARP poursuit un de ses objectifs stratégiques : la promotion de sa production fonctionnelle au sein du SAM, lieu institutionnel qui « a accompagné la pensée sociale du progrès associé au design25 », selon les propos de Jocelyne Leboeuf. La revue officielle du SAM contribue également à la diffusion auprès d'un large public des dernières découvertes susceptibles de faciliter l'accomplissement des tâches ménagères. Les lecteurs apprécient la propagande éducative des articles aux thématiques variées, comme l'éclairage du coin de détente, les tables transformables, les fauteuils... Pour initier les français au mobilier contemporain, en 1948, une nouvelle section affiliée à l'industrie mobilière est mise en place sous le nom de « Foyer d'aujourd'hui », espace d'exposition consacré à la création de modèles de série orientés vers l'innovation.
En 1955, lors du 24e SAM au Grand Palais, Paris-Match, Marie-Claire et la SODEL, avec le concours du Commissariat général du Salon, présentent la Maison électrique26. Elle est l'œuvre des architectes Marcel Roux et Yves Roa, en collaboration avec différents intervenants. L'idée repose sur l'allègement du travail domestique pour résoudre de manière pragmatique tous les problèmes de la femme au foyer à l'aide de l'automatisation émergente. Pour illustrer ce nouveau mode de vie, la revue Paris-Match met en scène des personnalités qui exécutent diverses tâches ménagères au sein de cette maison27. Avec ces scénographies, les photographes rendent ce style de vie accessible au grand public.
L'ARP conçoit le living-room avec plusieurs éditeurs : Airborne, Disderot, Minvielle et Cabanne, Steiner. La présence des Frères Jacques, au sein de ce lieu, symbolise la simplicité du bonheur retrouvé auquel aspire la plupart des Français au lendemain de la libération. Ils valorisent ce projet, basé sur un buffet tout en longueur dédié à : « tous les aménagements propres aux loisirs et à la détente de la vie familiale : discothèque, télévision, vaisselier, petit frigidaire, bar et office28. » Pour regarder la télévision, l'ARP crée le Club baquet 710 édité par Steiner. La particularité de ce modèle réside dans la conception de son socle qui repose sur un roulement à billes pour pivoter dans toutes les directions. Quant à l'espace repas, il l'équipe avec une table en frêne dotée d'allonges, sur un piètement métallique que complètent les chaises Epdo éditées par Airborne. La suspension G 38 illumine ce lieu grâce à un diffuseur en Cocoon blanc-crème mat projeté sur une carcasse en fil métallique dont la monture inférieure supporte une verrerie prismatique de Fresnel.
Toujours, à la recherche d'innovations, l'ARP n'hésite pas à introduire des éléments techniques dans ses créations aux formes inédites. Il recherche dans chaque création le procédé novateur qui en fera un bel objet fonctionnel performant pour tous, adapté au nouvel art de vivre l'espace style 50. L'ornementation est toujours réduite à son strict minimum pour ne pas entacher l'esthétique des lignes pures, principe adopté par les architectes modernes au début du XXe siècle puis repris par les designers.
À l'époque, ce projet pose le problème de l'automatisation des tâches du foyer, grâce aux robots ménagers. « La raison technicienne croit savoir comment organiser au mieux les choses et les gens, assignant à chacun une place, un rôle, des produits à consommer29. » Cette automatisation suscite des sarcasmes car le progrès apparaît comme brutal à l'image des moult effets comiques des scènes du film Mon oncle réalisé en 1958 par Jacques Tati. Pour conquérir ce nouveau marché, l'ARP prend des risques afin de proposer aux français des produits originaux malgré l'absence d'études de la concurrence dans la profession du meuble contemporain de série.
Lors de ce salon, l'ARP, associé à Jean Domps, participe pour la première fois à la section « Le Foyer d'aujourd'hui », stand où sont présents également leurs éditeurs Airborne, Disderot, Minvielle et Cabanne, Steiner. À partir d'un plan rectangulaire, il propose la séparation d'une pièce en deux zones jour/nuit par une cloison-placard dont le volume de rangement, avec télévision intégrée, est suspendu sur des structures métalliques. Dans l'espace jour, l'ARP expose le mobilier de La Maison électrique. Pour la vie nocturne éclairée par deux appliques G 36, il propose un lit deux places, dont les piètements métalliques sont identiques à ceux de la table de repas.
« Les deux portes en opaline noire ferment un volume accessible côté sommeil, la porte en glace-miroir ferme un volume peu profond accessible en partie côté chambre (linge de toilette), en partie côté salle de séjour (classement des disques-bar-radio)30. »
Il est possible de regarder confortablement la télévision, installé dans des fauteuils pivotant Radar disposés autour de la table lumineuse G 35 en opaline blanche de Disderot.
Fauteuil Radar, conçu en 1955 par l'ARP édité par Airborne. Fonds d'archives Pierre Guariche
Dans ce projet, les meubles de l'ARP, placard, table, sont plurifonctionnels par l'introduction de technologies liées à l'électricité. Sans doute, Pierre Guariche contribue en grande partie à la réalisation de ses éléments au vu de son cursus à l'école Breguet où il a commencé des études d'ingénieur spécialisées dans les applications de l'électricité. Pour ce dernier, la télévision doit s'intégrer dans l'espace du salon, car ce nouvel outil de communication requiert un bon nombre de paramètres à mettre en œuvre pour optimiser son utilisation. Il met ses connaissances scientifiques au service des idéaux collaboratifs de l'ARP consacrés à la recherche de mobiliers destinés à la fabrication en série.
Avec comme objectif l'accès pour le plus grand nombre à tous les grands changements en matière de technologie et de communication. Ce parti pris n'est pas sans rappeler le cours conçu par Johannes Itten pour le Bauhaus. Il : « présentait la nouveauté de jeter un pont entre l'art et la technique, conciliant l'intuition avec la pensée scientifique31. » Il désire ainsi former un nouveau spécialiste l'artiste-ingénieur dont les connaissances techniques pourraient l'amener à concevoir des objets produits en série par l'industrie.
Dans la zone jour, une séparation-rangement dissocie la cuisine de l'aire de repas, idée que développe en 1945-1952, Le Corbusier et Charlotte Perriand, lorsqu'ils conçoivent l'« Atelier Le Corbusier type 1 » pour l'unité d'habitation de Marseille. Cette cuisine rationnelle s'intègre dans l'espace de réception qu'est la salle de séjour par le biais des cuisines dites à l'américaine, outil qui facilite les tâches de la ménagère en proposant des rangements pratiques. Ce secteur porteur permet à l'ARP d'élargir un peu plus sa notoriété auprès du grand public, par l'intermédiaire du SAM dont le stand « Le Foyer d'aujourd'hui » est orienté vers l'innovation.
Toutefois, certains industriels connaissent de grands succès commerciaux à l'image de Minvielle avec le mobilier par éléments de l'ARP. En 1956, lors du 25e SAM, l'ARP expose ses modèles à la conception novatrice dans la présentation collective de l'ACMS. Conçus avec un dérivé du bois, ils reposent sur un système d'assemblage et de montage de panneaux de particules « calculés sur un module lui-même tiré du fameux Modulor de Le Corbusier32. » Ce procédé technique évite les doubles séparations lorsque deux éléments standards se juxtaposent, que ce soit sur les côtés, les dessus ou les fonds. Il permet de réaliser différentes compositions utiles à l'aménagement rationnel d'une habitation des années 50, et ce en fonction de l'évolution, et de la nécessité des ménages. Pour satisfaire la demande croissante du marché, Charles Minvielle innove en informatisant son entreprise qu'il dote de machines performantes afin de produire des panneaux de particules en grande série. Ces éléments sont publiés régulièrement dans la presse au côté des placards Rangex de Marcel Gascoin, des éléments de rangements incorporés de Charlotte Perriand, des meubles Oscar...
Tout ce processus de réflexion met en avant la complexité du métier de designer dont les cahiers des charges imposent la connaissance des usages, de l'ergonomie et de la mise en œuvre des matériaux. La maîtrise de la conception de meubles est liée à la rencontre complexe entre : fonction, esthétique et technique. Elle a pour finalité de conquérir des parts de marché substantielles : objectif que s'est fixé l'ARP épaulé par les ouvriers spécialisés de l'usine Minvielle lors de la période de la Reconstruction où l'ébénisterie, s'impose encore comme une tradition. Le design, considéré comme élitiste par le client potentiel, impose à l'ARP une implication attentive en vue de démocratiser ses créations style 50. Sortir du bureau d'études pour exposer au SAM, requiert une réflexion préalable fruit d'un processus collectif. Par cette démarche, ce trio s'expose aux critiques donc d'une certaine manière se met en danger face à la réception des éventuels consommateurs.
3. De l'artisanat à l'industrie
3.1 L'atelier Disderot : de la tradition au design
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la conception d'appareils d'éclairage domestique reste d'un coût élevé. En France, cette activité se concentre surtout au sein de petites entreprises concurrencées par de grandes industries qui imposent leur diktat de réduction de coûts de production grâce à des procédés de standardisation. Déjà en 1914, Hermann Muthesius, théoricien du Werkbund, défend ce concept car il pense que : « Désormais, seule la standardisation peut introduire un goût valable et universel33. » Afin de contrer ce processus, certains chefs d'entreprise français proposent aux concepteurs d'expérimenter de nouveaux matériaux aux fonctions inédites. Principe qu'adopte au fil du temps, Pierre Disderot, lorsqu'il fonde à Cachan son premier atelier dédié à la production d'appareils d'éclairage. Il collabore avec Pierre Guariche pour encourager ses travaux de recherches exploratoires concernant l'éclairage des appartements standardisés issus de la Reconstruction.
Enthousiasmé par les avancées technologiques des appareils d'éclairage, Pierre Guariche possède la science d'un éclairagiste exigent. Il utilise la classification des appareils d'après la répartition des flux qui vont du direct au semi-direct jusqu'au mixte en passant, par le semi-indirect et l'indirect. Selon lui, le grand public doit accéder à des objets usuels performants aussi bien par la forme que par la qualité d'exécution : c'est la démocratisation du design. Cette quête de l'objet parfait justifie la création de l'ARP dont la production met en avant la richesse des innovations techniques qui nourrissent l'esthétique des luminaires. Sa collaboration avec les Ateliers Pierre Disderot est nécessaire à la matérialisation de ses idées artistiques, qui privilégient le lien entre l'architecture et l'éclairagisme.
Ses lampes s'adaptent aux nouvelles normes spatiales, transportables et de faible encombrement, pour faire face à l'exiguïté des espaces souvent plurifonctionnels. Il est le premier à concevoir une gamme complète à l'esthétique avant-gardiste qui répond à l'ensemble des besoins d'éclairage de la maison : la table, le chevet, la détente... Grâce à ses connaissances scientifiques assimilées à Breguet, Pierre Guariche crée des luminaires qui ne remplissent plus uniquement un rôle décoratif mais éclairent de manière rationnelle directement ou indirectement.
Durant sa collaboration avec l'ARP, il participe à la conception de nombreux appareils d'éclairage comme en témoigne la nomenclature des catalogues Disderot. La lettre G34 précède le numéro de ses modèles comme l'applique G 40. À partir de 1954, les créations de l'ARP voient le jour, suite à l'achat par Pierre Disderot de la licence danoise du procédé du brevet Rotaflex en France, pour être à la pointe des dernières innovations.
L'ARP s'apparente à un laboratoire expérimental où l'usage des nouveaux matériaux issus pour la plupart des recherches militaires nourrit l'évolution formelle des objets du quotidien des consommateurs. Cette société octroie à l'ARP les moyens de proposer aux consommateurs des produits aux formes nouvelles comme le souligne Pierre Guariche dans la revue L'officiel de l'ameublement :
« Trop d'industriels n'ont pas encore compris l'importance du rôle du créateur. Ils ont le sentiment d'être, eux, des créateurs parce qu'ils savent un peu dessiner. C'est un des problèmes de notre époque, chacun se prend pour un artiste35. »
Le Rotaflex, matériau diffusant réalisé grâce à des fils d'acétate de cellulose collés par un goutte à goutte d'acétone sur un moule en bois, permet à l'ARP de concurrencer la production italienne représentée par les lampes de Gino Sarfatti éditées par Arteluce. Il réalise différents modèles aux formes inédites dont la technique nourrit l'esthétique des luminaires à l'image de la lampe à poser E 16, une boule Rotaflex dans un cube en fil de métal laqué blanc (Figure 5. La lampe à poser E 16, conçue en 1956 par l'ARP éditée par Disderot. Fonds d'archives Pierre Guariche), le lampadaire G 39, ou le lampadaire G 41... L'ARP conçoit également à cette période des appliques pour équiper les chevets de lit. Pour ce faire, il travaille en étroite collaboration avec les ouvriers d'art qualifié qui façonnent le métal, en vue d'obtenir des objets fonctionnels singuliers dédiés au repos. Il dessine l'applique G 36 dotée d'un réflecteur obturé par trois volets orientables horizontaux dosant la lumière, comme formulé par l'architecte Louis Sullivan dans son essai de 1896, The Tall Office Building Artistically Considered : « La forme suit la fonction ». La forme générale de ce modèle reflète avec un esthétisme dépouillé le cœur technique (ampoules, douilles...) indispensable aux différentes fonctions de l'éclairage de la chambre. Quant à l'applique E 10, la tôle pliée d'un seul tenant forme le réflecteur ainsi que la tablette de décharge suspendue.
Durant ses trois ans d'existence, l'ARP conçoit avec les Ateliers Disderot vingt-quatre appareils d'éclairage modelant au fil du temps les relations du designer à l'atelier. D'une certaine façon, les membres de l'ARP ont la volonté de lier l'art à l'industrie en appliquant les valeurs des Beaux-arts aux produits de consommation. Ce dessein marque une étape essentielle dans l'évolution du design français, comme le fait en son temps William Morris en Angleterre. En collaboration avec Disderot, l'ARP valorise la tradition médiévale de l'atelier par l'organisation de leur collectif qui crée de manière semi-artisanale de beaux objets style 50.
3.2 Les aménagements modernes de l'ARP
Durant son existence, l'ARP consacre une partie de son activité à la rénovation de résidences secondaires. En 1955, il réhabilite à Gallardon dans l'Eure et Loir une maison rurale en collaboration avec Michel François architecte. Pour rénover cette bâtisse du XVIIIe siècle dans l'air du temps, il travaille sur une nouvelle tendance : la création d'un décor moderne dans une maison de caractère, en conservant ses atouts rustiques : les poutres apparentes, sa grande cheminée et son sol de briques. Les meubles de série structurent les différents espaces. Les membres de l'ARP anticipent l'évolution du marché car ils comprennent que ce dernier peut se révéler porteur à la faveur de l'allongement de la durée des congés payés qui incitent les Français à partir régulièrement en vacances.
La même année, il réalise l'aménagement de l'appartement de M. Fortin avec un plan basé sur la flexibilité spatiale et mobilière. La salle de séjour est le lieu principal de la vie sociale, avec l'espace repos isolé du reste de la pièce. Il travaille sur la modularité grâce à une banquette lit qui s'escamote pour obtenir un coin réception supplémentaire. Le plan horizontal des lits-divans agrandit la pièce pourtant meublée avec deux grands fauteuils SK660 de Steiner. Produits par Minvielle & Cabanne, les deux guéridons bas rapprochés deviennent une table de salle à manger grâce à un piètement métallique modulable en hauteur. Il aménage également la chambre pour enfant dont : « Le plan de travail en Formica gris bleu sert : au premier âge, de table à langer ; au deuxième âge, de table à jeux, plus grande que le guéridon au premier plan ; à l'étudiant ou à l'écolier de table de travail36. » À travers cet objet, ils développent l'idée du meuble évolutif qui permet aux parents de consommer intelligemment en achetant des produits de qualité qui durent dans le temps et surtout qui s'adaptent aux besoins de l'enfant.
Fort de leur expérience collective de décorateurs-créateurs d'ensembles, l'ARP collabore au projet de logements sociaux de Firminy-Vert (1954-1965), extension urbaine du centre-ville de Firminy dans la Loire, qui sort de terre à l'initiative d'Eugène Claudius-Petit. L'ARP participe à cette planification aidée, car ses membres ont conscience que de : «la réussite du plan de construction ne dépend pas seulement l'amélioration du niveau de vie de millions de français mal logés mais aussi le développement de nombreuses branches industrielles comme celle du meuble et des appareils ménagers37. »
Pour réaliser ce programme ambitieux de modernisation, Eugène Claudius-Petit fait également appel à quatre architectes : Charles Delfante, André Sive (et Jean Kling après la mort de ce dernier en 1958), Marcel Roux et Pierre Tyr38. Ils fondent leurs réflexions sur les principes de la « Chartes d'Athènes » rédigée en 1933 lors du IVe Congrès International d'Architecture Moderne (CIAM) sous l'égide de Le Corbusier. Dans leur projet, une place importante est réservée aux espaces verts où les habitants peuvent profiter du soleil dans un cadre conçu pour répondre aux fonctions suivantes : habiter, travailler, se récréer, circuler. Séduit par cette vision, Eugène Claudius-Petit sollicite Le Corbusier en 1954 pour qu'il crée des équipements culturels, sportifs et cultuels qui favorisent le lien entre la ville ancienne et la nouvelle. Le Corbusier propose la réalisation d'une Unité d'habitation, d'une église et d'une Maison de la culture.
À la suite de l'étude urbanistique réalisée par les architectes, une ligne directrice est lancée : dédier 80% de la surface aux espaces verts grâce à la réalisation d'immeubles verticaux. Dès 1953, Eugène Claudius-Petit confie aux architectes André Sive, Auguste Mathoulin et Patrick Bertholon la réalisation d'une tour de logements de onze étages en plein centre-ville de Firminy : ce sera l'opération Experton composée de 122 logements de différents types. Il veut à l'aide de ces constructions offrir aux futurs locataires une nouvelle manière d'habiter qui constitue pour l'ARP un véritable laboratoire d'expérimentation où il faut inscrire sa production mobilière de série.
Pour illustrer le confort de ces logis modernes, l'ARP se voit confier l'aménagement du 4 pièces qu'il réalise en collaboration avec les Meubles Martinez de Firminy. Du 29 septembre au 7 octobre 1956, a lieu, à Firminy-Centre, une exposition qui donne libre accès à des appartements-témoins. Ces logements offrent les commodités modernes attendus localement par les habitants, qui pour certains découvrent l'eau courante, la cuisine équipée, et les équipements collectifs comme le chauffage, et le service central d'eau chaude... À travers cette manifestation, l'ARP propose un projet pensé comme une vitrine d'urgence pédagogique du logement social pour anticiper les envies et les attentes des futurs locataires. Ce trio a la capacité de déceler les besoins et les attentes des usagers de projets sociaux mais également de faire émerger des projets pour des clients fortunés.
Ainsi en 1957, Henri Lancel architecte-décorateur confie à l'ARP, l'architecture intérieure et la décoration de la maison d'Hugues Steiner chef d'entreprise. Son plan se base sur un living-room divisé en trois sous espaces : la détente, la musique et les repas. La cuisine fonctionnelle est réalisée avec des éléments de série dont les plans de travail sont en Formica. Les chambres sont équipées d'un lit avec chevet incorporés, d'une armoire et d'un plan de desserte qui court le long de la fenêtre. Les sièges sont l'œuvre de l'ARP pour Steiner, et les appareils d'éclairage et la table lumineuse sont édités par Disderot, le tout formant un décor moderne, style 50.
Mais peu à peu, la clientèle privée se fait rare. L'État avec ses grandes opérations urbaines offrent à ces décorateurs la possibilité de participer à des projets d'envergure, car une question les préoccupe : la menace de la disparition de leur métier. Au fil des années, les décorateurs-créateurs d'ensembles, comme les membres de l'ARP, nés entre 1919 et 1932, voient leur profession progressivement évoluer. Ils passent du statut de décorateur-créateur d'ensembles à celui d'architecte d'intérieur : la profession se libéralise. L'apparition de cette fonction est due à l'arrivée sur le marché d'un nouvel acteur : le designer. Ce contexte explique les pratiques professionnelles des membres de l'ARP qui prennent part pour deux d'entre eux, Pierre Guariche et Joseph-André Motte, à la réalisation de grands projets publics d'architecture intérieure, tout en gardant chacun leur propre société afin de poursuivre la production en série des modèles.
En 1957, chacun reprend son indépendance pour se consacrer à ses travaux respectifs. Cette collaboration sous forme d'atelier au service du style 50, dont il est difficile de connaître en détail le mode d'organisation propre à chaque membre, est à l'époque unique en son genre à travers son mode d'existence. En effet, cette mise entre parenthèse de la signature individuelle est avant-gardiste dans l'histoire du design français. De nos jours, les objectifs novateurs de l'ARP font toujours des émules au regard de la démarche des 5.5 designers, cabinet de recherche et de consultation en design dont la démarche est la suivante : « Réanimer, récupérer, réintroduire, restituer, réhabiliter, recycler, repenser, panser, soigner... Le designer devient médecin des objets, et utilise son savoir-faire pour optimiser l'espérance de vie des meubles abandonnés39. » Comme l'ARP en son temps, les 5.5 designers sont préoccupés par les besoins des consommateurs. Ils dédient leurs idéaux collaboratifs à la recherche mais s'adaptent à leur époque avec en ligne de mire un design sous le signe du développement durable.
Bibliographie sur le sujet
Revues
Jacques Viénot, « La charte de l'esthétique industrielle », dans Esthétique industrielle, n°7, 1952.
Renous, Pascal, « Marcel Gascoin », dans Revue de l'ameublement, février, 1963.
Leymonerie, Claire, « Le Salon des Arts ménagers dans les années 1950. Théâtre d'une conversion à la consommation de masse », dans Vingtième Siècle. Revue d'histoire, n°91, 2006/3, p. 43 sq.
Chauvin, Elisabeth, Gencey, Pierre, « Le spectacle du logement ordinaire et la normalisation du quotidien dans les appartements types de la Reconstruction », dans Bouillot, Corinne, La Reconstruction en Normandie et en Basse-Saxe après la Seconde Guerre mondiale. Histoire, mémoires et patrimoines de deux régions européennes, Presses universitaires de Rouen et du Havre, mars/2013, p. 179 sq.
Jacob, Delphine, « Pierre Guariche. Un décorateur, artisan du style 1950 », dans Laurent, Stéphane, Une émergence du design. France 20e siècle, Paris, site de l'HiCSA, mis en ligne en octobre 2019, p. 187 sq.
Livres
Le Corbusier, Urbanisme, Paris, Les Editions G. Crès, Collection de « L'Esprit nouveau », 1925.
Breton, Paul, L'Art ménager français, Paris, Flammarion, 1952.
Renous, Pascal, Portraits de décorateurs, Paris, Editions H. Vial, 1969.
Tissot, Henri, Le design, Lausanne, Editions Robert Laffont-Grammont S.A., 1975.
Saunier, Pierre Perrigault, l'architecte du mobilier 1950-2000 : Rigueur et passion, Paris, Edition Meubles et Fonction, 2000.
Chauvin, Elisabeth, Gencey, Pierre, Appartements témoins de la reconstruction du Havre, ville du Havre, Editions Point de Vues, 2007.
Forest, Dominique, Mobi boom : l'explosion du design en France : 1945-1975, Paris, Les Arts Décoratifs, 2010.
Leymonerie, Claire, « L'esthétique industrielle en pratique : la collaboration entre Technès et Calor dans les années 1950 », dans Lamard, Pierre, Art & Industrie. XVIIIe -- XXIe siècle, Paris, Editeur Picard, 2013, p. 241 sq.
Gencey, Pierre, René Gabriel, Paris, Editions Norma, Paris, 2018.
Jacob, Delphine, Blaisse, Lionel, Jeauneau, Aurélien, Pierre Guariche, Paris, Editions Norma, 2020.
-
Chauvin, Elisabeth, Gencey, Pierre, « Le spectacle du logement ordinaire et la normalisation du quotidien dans les appartements types de la Reconstruction », dans Bouillot, Corinne, La Reconstruction en Normandie et en Basse-Saxe après la Seconde Guerre mondiale. Histoire, mémoires et patrimoines de deux régions européennes, Presses universitaires de Rouen et du Havre, mars/2013, p. 179 sq. ↩
-
Le design humaniste européen est initié durant l'entre-deux-guerres par le finlandais Alvar Aalto, le britannique Gordon Russell, le français René Gabriel ou encore le suédois Elias Svedberg. ↩
-
Jacob, Delphine, « Pierre Guariche. Un décorateur, artisan du style 1950 », dans Laurent, Stéphane, Une émergence du design. France 20e siècle, Paris, site de l'HiCSA, mis en ligne en octobre 2019, p. 187 sq. ↩
-
Le Corbusier, Urbanisme, Paris, Les Editions G. Crès, Collection de « L'Esprit nouveau », 1925. ↩
-
Gonzalez, Sylvie, « Francis Jourdain (1876-1958), un précurseur du mobilier contemporain », dans In Situ, 29 | 2016. URL : http://insitu.revues.org/12955, consulté le 12/07/2021. ↩
-
L'industrie française -- on parle ici de Lévitan ou des Galeries Barbès, etc. - produit déjà de très nombreux meubles en grande série du style « moustache » plus populaire. ↩
-
Renous, Pascal, « Marcel Gascoin », dans Revue de l'ameublement, février, 1963. ↩
-
Gencey, Pierre, René Gabriel, Paris, Editions Norma, Paris, 2018, p. 294 sq. ↩
-
Chauvin, Elisabeth, Gencey, Pierre, Appartements témoins de la reconstruction du Havre, ville du Havre, Editions Point de Vues, 2007, p. 70. ↩
-
Tissot, Henri, Le design, Lausanne, Editions Robert Laffont-Grammont S.A., 1975, p. 52. ↩
-
Brulliard, Louis, « Meubles d'aujourd'hui », dans Arts ménagers, n°39, mars/1953, p. 80 sq. ↩
-
Flusser, Vilém, L'art : Le beau et le joli (lettre adressée à Louis Bec) https://www.pepsgroup.be/quotes/VFlusser.html, consulté le 12/07/2021. ↩
-
Renous, Pascal, Portraits de décorateurs, Paris, Editions H. Vial, 1969, p. 17. ↩
-
« Agences d'architecte », dans L'Architecture d'aujourd'hui, n°58, février/1955, 26^ème^ année, p. 94 sq. ↩
-
Forest, Dominique, Mobi boom : l'explosion du design en France : 1945-1975, Paris, Les Arts Décoratifs, 2010, p. 270. ↩
-
« Si les chiffres ne sont pas connus, les affaires conclues au salon paraissent avoir atteint leur apogée dans les années 1955-1957, conjuguant hausse du pouvoir d'achat, baisse des prix et essor de la vente à crédit dans une sorte de fièvre d'acquisition, de ruée vers le confort dont le Grand Palais constituait la scène principale. » Leymonerie, Claire, « Le Salon des Arts ménagers dans les années 1950. Théâtre d'une conversion à la consommation de masse », dans Vingtième Siècle. Revue d'histoire, n°91, 2006/3, p. 43 sq. ↩
-
« 3 fabricants spécialistes, une esthétique commune, l'élite du mobilier contemporain, distribuée par les meilleurs ensembliers -- créations : Guariche, Motte, Mortier. » : Publicité Disderot, Minvielle, Steiner, dans La maison française, n°95, mars/1956, p. XIV. ↩
-
Saunier, Diane, Pierre Perrigault, l'architecte du mobilier 1950-2000 : Rigueur et passion, Paris, Edition Meubles et Fonction, 2000, p. 69. ↩
-
Falconnet, Paulette, « La « série » joue et gagne », dans Arts ménagers, n°64, avril/1955, p. 55 sq. ↩
-
Jacob, Delphine, Blaisse, Lionel, Jeauneau, Aurélien, Pierre Guariche, Paris, Editions Norma, 2020, p. 120. ↩
-
« Le cadre de la vie féminine », dans La maison française, n°100, août-septembre/1956, p. 6 sq. ↩
-
^22^ Jacques Viénot, « La charte de l'esthétique industrielle », dans Esthétique industrielle, n°7, 1952. ↩
-
« La définition du statut de styliste industriel a supposé des renoncements par rapport à la pratique des artistes décorateurs qui domine encore la période de l'entre-deux-guerres. Tandis que les décorateurs se définissent essentiellement comme des auteurs, propriétaires de leurs modèles et s'attachent, autant que faire se peut, à en accompagner et en contrôler l'exécution, les stylistes industriels admettent d'abandonner les fruits de leurs recherches, dessins, plans ou maquettes, entre les mains des industriels qui en assurent librement l'exploitation et la réalisation. » : Leymonerie, Claire, «L'esthétique industrielle en pratique : la collaboration entre Technès et Calor dans les années 1950 », dans Lamard, Pierre, Art & Industrie. XVIIIe -- XXIe siècle, Paris, Editeur Picard, 2013, p. 241 sq. ↩
-
Breton, Paul, L'Art ménager français, Paris, Flammarion, 1952, p. 48. ↩
-
Leboeuf, Jocelyne, « De l'Histoire de l'art à l'histoire du design industriel », https://revuedesign.wordpress.com/2009/11/19/de-l-histoire-de-l-art-a-l-histoire-du-design-industriel/, consulté le 12/07/2021. ↩
-
« Des organes de presse grand public, comme Elle, Paris-Match, Le Parisien libéré, Marie France, le Weekend Telegraph ou le Daily Mail de Londres, deviennent eux-mêmes initiateurs et commanditaires de projets, donnant naissance à toutes sortes de maisons expérimentales. » : De Calignon, Valérie « De l'adhésion à la dissociation : évolution de la relation entre le projet d'architecture et la conception des intérieurs (1949-1972) », dans Massu, Claude, Gaimard, Marie, Guillerm, Elise, Métier : Architecte. Dynamiques et enjeux professionnels au cours du XXe siècle, Publications de la Sorbonne, Collection Histo.art 5, 2013, p. 297 sq. ↩
-
« En ce lever de rideau, nous avons choisi nos « pilotes d'essai » parmi les vedettes : les époux Martine Carole-Christian Jacque dans la chambre à coucher, le papa Jean-Pierre Aumont dans la chambre des enfants, la ménagère Patachou dans la cuisine, la maman Sophie Desmarets dans la buanderie, la coquette Magali Noëlle dans la salle d'eau, le bricoleur Lamoureux dans l'atelier, la fraîche Lise Bourdin dans le jardin intérieur, les quatre frères Jacques dans un living-room à leur mesure. » : « Notre pavillon aux Arts Ménagers : La Maison Électrique », dans Paris Match, n°309, 26 février/1955, p. 48. ↩
-
« Le Salon des Arts ménagers favorise tous les progrès », dans Le décor d'aujourd'hui, n°94, 1955, 22^ème^ année, p. 235 sq. ↩
-
Certeau, Michel (de), L'invention du quotidien, 1. : Arts de faire et 2. : Habiter, cuisiner, Paris, Gallimard, 1980 ; rééd. 1990 Paris, Gallimard, éd. établie et présentée par Luce Giard, 1990. ↩
-
Atelier de Recherches Plastiques, « Les séparations vivantes », dans La maison française, n°87, mai/1955, p. 6 sq. ↩
-
Tissot, Henri, Le design, Lausanne, Editions Robert Laffont-Grammont S.A., 1975, p. 56. ↩
-
Darvogne, Jean, Historique les Huchers Minvielle de 1898 à 1981, notes biographiques succinctes sur les sociétés du groupe Minvielle et Cabanne et les marques commerciales, Club expériences et recherches du mobilier actuel (CERMA), 2008. ↩
-
Tissot, Henri, Le design, Lausanne, Editions Robert Laffont-Grammont S.A., 1975, p. 52. ↩
-
« La nomenclature des modèles d'éclairage est sur ce point très claire : « G » correspond à Pierre Guariche, la lettre « E » est attribuée à l'ARP, et le « R » est donné pour la plupart des modèles utilisant du Rotaflex qui sont signés ARP. Deux exceptions, enfin, se voient attribuer un nombre à quatre chiffres : le modèle 5964 ainsi que le plafonnier 3077 présenté en 1956. » : Jacob, Delphine, Blaisse, Lionel, Jeauneau, Aurélien, Pierre Guariche, Paris, Editions Norma, 2020, p. 120. ↩
-
Houdard, Geneviève « Créateurs d'aujourd'hui, monde de demain, Pierre Guariche », dans L'officiel de l'ameublement, n°218, janvier/1969, p. 121 sq. ↩
-
Gorse, Nadine, « Si vous aimez les harmonies calmes », dans La maison française, n°93, décembre/1955-janvier/1956, p. 6 sq. ↩
-
Phlipponneau, Michel, « Le deuxième plan de modernisation et d'équipement et l'avenir de l'économie française », dans L'information géographique, n°1, Volume 19, 1955, p. 20 sq. ↩
-
Ragot, Gilles, Le Corbusier à Firminy-Vert : manifeste pour un urbanisme moderne, Paris, Centre des monuments nationaux, 2011, p. 32. ↩
-
5.5 Designers, Sauvez les meubles, Paris, Jean-Michel Place, 2004. ↩