De projet à trajet en design, retour sur des moments de pédagogie
Nathalia Moutinho, Céline Monvoisin

Nathalia MOUTINHO enseigne la discipline du design questionnant les processus de création et de mise en œuvre à la Haute École des Arts du Rhin. Diplômée d’écoles d’arts (Nancy, Strasbourg) et de design (Barcelone), et d’un post diplôme en design (Saint-Étienne) ; elle co-dirige son agence de muséographie et de scénographie.

nomade-art-design-societe.com ; after-recherche-design.net ; www.atelier-aile2.fr.

Céline MONVOISIN, architecte DPLG, doctorante en études et pratiques des arts à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et membre du groupe transdisciplinaire de recherche AmalGAME. Ancrée dans le contexte de l’Anthropocène, son étude doctorale porte sur les approches expérientielles, concrètes et incarnées dans les pédagogies de conception du design.

www.celinemonvoisin.fr

Résumé :

Face à l’urgence des crises, les apprenant(e)s designers ne transigent plus avec leurs valeurs et encouragent les pédagogues à faire évoluer les pratiques. L’article qui suit, entend questionner l’héritage pédagogique du projet comme acte privilégié des designers. Notre démarche invite à prendre en considération une échelle temporelle et écosystémique plus large de l’action du(de la) designer, appelant la distinction d’une itération faite de projections et d’introjections constituant le trajet du design.

Abstract :

In front of the urgency of crises, designer learners no longer compromise with their values and encourage teachers to change practices. The following article intends to question the educational heritage of the project as a privileged act of designers. Our approach invites consideration of a broader temporal and ecosystem scale of the action of the designer, calling for the distinction of an iteration made of projections and introjections constituting the design traject.

L’écoute est au cœur de la pédagogie : entendre un étudiant, Théo, en introduction à son diplôme1, refuser de produire des « marchandises » et exprimer une ambition poétique et utopique à la recherche de nouvelles valeurs ; percevoir chez les étudiant(e)s leur opposition à expérimenter le procédé d’injection dans le secteur automobile ; recadrer sa pédagogie, au regard de l’intérêt grandissant des étudiant(e)s pour les débats économiques et leur souhait de sortir du schéma classique de production. Ce retour d’expérience de Nathalia Moutinho, enseignante en design, croise les préoccupations de recherche2 de Céline Monvoisin et motive ce constat : le projet en design ne peut pas se penser en circuit fermé, la confrontation au vivant et aux milieux de vie amène à revoir l’inscription des valeurs anthropocentrées – qui reposent sur l’idée que l’humain est au centre de tout comme être signifiant –, elle questionne les limites de l’artificiel et encourage une nouvelle approche de la pédagogie. En tant qu’enseignante, Nathalia voit évoluer, depuis 2017, l’envie des étudiant(e)s à remettre en cause ces valeurs héritées. Des valeurs qui les incitent au débat mais aussi à ne plus transiger avec les modèles en place. La rencontre de ces étudiant(e)s convoque ainsi l’enseignante : c'est leur pratique qui nous pousse à changer nos pédagogies et à repenser la place du designer et la notion de projet.

Dans ce sens, nous adoptons la proposition d’Ezio Manzini, pour qui « l'un des points de départ possible pour s’engager sur la voie d’un rapport positif entre l’homme et son environnement consisterait à se demander quelle signification peut avoir aujourd'hui le terme ‘’ faire’’ : que signifie aujourd'hui concevoir et produire ?3 ». Plus précisément, nous nous demandons, en tant que pédagogue et chercheuse, comment enseigner et apprendre à « faire » ou « ne pas faire ». Cette mise à plat sera, nous l’espérons, propice à questionner autant les modalités historiques du projet que de saisir une approche trajective et mésologique de la conception.

1. Le projet en design, comme il se montre… comme il se vit

Design et projet ne peuvent se décorréler l’un de l’autre. Cette relation reconnaît « l’acte de design, c'est-à-dire le phénomène du projet de design4 » comme le mode actionnel privilégié du designer : il(elle) pense, communique, fait et agit par le projet. Cette première partie est, pour nous, l’occasion d’aborder les modes actionnels du projet (et donc de la discipline du design), tant par le récit de pratiques pédagogiques que par ses filiations historiques et conceptuelles. Ceci nous permettra d’interroger les fondements de l’action du designer à travers l’écart entre le projet comme il se montre et le projet comme il se vit.

1.1. Le projet, itérations et imprévisibilités

Il est évident qu’une pédagogie dépend d’un corps enseignant et de son contexte. De même, la polysémie du design est sujette à englober différentes approches de l’acte de conception. L’option design de la HEAR est longtemps restée une option affiliée au design global5. Son enseignement s’inscrit alors dans l’acception italienne (progetto) qui différencie la conception mentale, de la pensée par la matière et de l’expérimentation en atelier de fabrication. Cependant, si le projet s’origine dans le grec proairesis : ce désir volontaire, intellectualisé, qui tend vers une finalité ; il garde en son sein une dimension concrète (progettazione) à travers la réalisation du projet. Cette insertion du réel pondère notre lecture du projet de la Renaissance6, qui prône une nette séparation, spatiale et temporelle, des activités de conception et des activités d’exécution. Le concepteur n’est pas celui qui réalise : il met en œuvre. Cette scission assure alors à l’architecte (ou concepteur) – garant de l’idéation et de la représentation mathématique de l’ouvrage – une émancipation des sciences mineures du compagnonnage à la faveur d’un glissement disciplinaire vers les arts libéraux7.

Figure 1 . Machine à laver, Elisabeth Godeau et Léa Ollivier, sujet « Low Tech », apprendre l’artéfact par sa réalité et la décomposition de sa complexité, 2020.
Photo© Elisabeth Godeau

Aujourd’hui, le temps et l’espace sont à nouveau convoqués laissant peu de place au langage mathématique et abstrait. À la HEAR, l’atelier de production accompagne l’atelier de création – issu du modèle des Arts Décoratifs et des Beaux-Arts –, l’école possède en son sein des ateliers qui configurent une pédagogie organisée par des ateliers d’expérimentation et de production. Durant ses cours, l’enseignante convoque au maximum cette dimension concrète du faire ou de la matière par une pratique collaborative en lien avec les ateliers, en particulier l’atelier léger piloté par Cléo Huet. Il s’agit de concrétiser et d’ancrer les intuitions dans la réalité temporelle, matérielle et spatiale (cf. figure 1). Ce sont ces confrontations au réel qui permettent de se frotter aux évènements écologiques contemporains, dès l’origine des matériaux et des énergies nécessaires à leur mise en œuvre. Le terrain d’étude est le fondement du projet en design, sans terrain l’étudiant(e) reste dans l’idée. L’enseignement propose une pratique du design basée sur le modèle centré-processus qui selon Alain Findeli et Rabah Bousbaci « rassemble les théories centrées sur le processus, le cheminement ou la structure logique (méthodologique et/ou épistémologique) à adopter ou adoptés au cours du projet8 ». Celui-ci génère un parcours de pensée entre les lieux et les temps d’échanges sans se préoccuper du résultat.

Pour Nathalia, son rôle consiste à offrir un environnement propice à la création par l’établissement d’un contexte favorable à l’exploration. Protocoles, lieux et interlocuteurs sont proposés pour que l’étudiant(e) puisse non seulement comprendre les enjeux en action mais aussi engager des débats. Il y a un vrai aller-retour entre le contexte, le lieu de vie, l’atelier, l’expérimentation et la réflexion. Grâce aux enseignements complémentaires des ateliers de fabrication, une itération délicate se met alors en place entre conception et fabrication car elle tient compte des perturbations générées par la pluralité des voix et des contextes. Nous invitons les étudiant(e)s à mettre en place des périodes d’expérimentation afin qu’ils(elles) se débarrassent des tics de formes et autres formatages liés notamment à la surabondance d’images et de références. Cette approche s’illustre dans une collaboration avec le groupe Lucent réalisée en 2017 et menée conjointement avec Lisa Renard, enseignante d’anthropologie de l’Université de Strasbourg et ses étudiant(e)s de master. Associé aux débats du programme « Working Promesse, les mutations du travail9 », le projet proposait une observation de terrain à même de fonder le travail de conception. Nous étions dans une démarche itérative entre les étudiant(e)s d’ethnologie, les équipes de Lucent et les étudiant(e)s designers qui découvraient la méthode « agile » des salariés. Suite aux entretiens menés avec les salarié(e)s volontaires, le projet de design est né des débats entendus par une communauté de personnes. Les étudiant(e)s ont acquis des compétences critiques par l’observation et l’écoute des forces en présence, y ont décelées l’opportunisme d’une proposition ; ils(elles) se sont fait interprètes. Il(elles) ont révélé(e)s une forme répondant au débat posé tout en rendant lisible la question posée par un effort de retranscription. Tout cela définit un processus relativement classique où le terrain d’observation motive les phases de représentation de l’idée et de matérialisation du projet.

La pratique du projet, comme organisation menant à la production, ne traduit pas sincèrement les processus d’interprétation à l’œuvre. Sur le terrain, l’enseignante n’a aucune idée de ce qui va se projeter ; elle ne peut anticiper ce qui va être matériellement utile et pertinent au projet. Une sorte de tension s’installe entre l’acte de projeter et l’atelier comme outil et lieu de conception. Dans ce sens, les outils du projet sont imprévisibles et ne peuvent jamais être adéquats puisque nous ne pouvons prédire les besoins. L’encadrement trop dirigé par des choix anticipés de matières, de formats ou de techniques briderait la créativité et sa capacité de regard critique sur la « technè ». Mais cette proposition de liberté peut également être le moment de l’échec ou de l’impossibilité de passer à une concrétisation car l’interprétation de l’idée à la matérialité peut se révéler impossible, dans les contraintes présentes. L’enseignement du design intègre donc cette notion d’imprévisibilité et d’itération entre l’ambition des acteur(rice)s et le contexte. Le mouvement ainsi réalisé peut s’apparenter à l’improvisation en musique : le vocabulaire et les matières se répondent pour créer du sens selon le contexte qu’ils vont occuper, sorte d’interprétation physique d’une idée implémentée en différents lieux.

1.2. Le projet, limites et autorités

En 2017, un industriel sous-traitant du secteur automobile mit à notre disposition une machine à injection que les étudiant(e)s pouvaient détourner pour expérimenter. Cette opportunité semblait intéressante, en dialogue avec le monde réel de la production. À la suite de la rencontre avec l’industriel, les étudiant(e)s étaient sceptiques, l’un d’entre eux refusait de projeter. Étonnée de les voir aussi clairement opposé(e)s à la matière plastique, à la sous-traitance et au domaine automobile, l’enseignante saisit l’image d’un milieu industriel dont ces étudiant(e)s ne partageaient pas les valeurs. Le rejet était trop fort pour être constructif, le dialogue et la pensée ne pouvaient être en projection. Nathalia se trouva alors dans une posture d’échec ou de « ne pas faire ». Les débats qui en suivirent, ont permis à tous de reconsidérer la place du projet dans la réflexion. Penser la matérialité des artefacts : est-ce une question abstraite ? Si le groupe avait conçu ces objets sans se déplacer, aurait-il eu le même rejet ? Il semble évident que toutes les sensations vécues dans l’entreprise leur ont littéralement collé à la peau et les ont accompagné jusqu’à leur table de travail.

N’oublions pas la formule de l’anthropologue Jean-Pierre Boutinet : « plus qu’un concept, [le projet est] une figure emblématique de notre modernité10. En scindant l’action qui mène à l’artéfact, le projet se divise face à la complexité, certes, mais il ouvre aussi la voie aux préceptes modernes par la promotion d’une pensée absolue, rationnelle et universelle. La dualité conception/réalisation s’y polarise, propulsant l’idéation comme une forme d’autorité. En ce sens, le projet valorise l’esprit (l’intellect) sur le corps (le manuel), la Raison sur les sentiments et les raisons d’agir. Le créateur comme individu autonome l’emporte sur l’hétéronomie du collectif11 tout comme la vue sur la poly-sensorialité12. Le projet dans son désir de maîtrise use de cette hiérarchie pour maximiser le profit de l’acte au détriment de l’acte lui-même ; il ne questionne pas sincèrement les buts ni le sens du processus à l’œuvre. Ainsi, la nouveauté d’une technique ou la qualité formelle d’un projet peuvent effacer une critique du résultat et des procédés. Par exemple, la performance d’un matériau isolant dit « écoefficace » – tel que le polyuréthane – sera employé et présenté de manière à camoufler sa nocivité éventuelle. Cette perspective instrumentale semble propice à la valorisation d’un agir au service d’une éthique anthropocentrique catégorisant les droits et les valeurs des êtres vivants et des milieux de vie. Si les étudiant(e)s prennent conscience de l’illusion résolutique et idéaliste du projet, ils(elles) saisissent également l’insoutenabilité d’un « monde comme projet13 ». Une vocation et une puissance anticipatrice qui a fini par dénaturaliser le monde en une technosphère. L’enseignante veut intégrer la construction de cet engagement éthique, elle propose la rédaction de chartes de valeurs. Mais Comment intégrer cette ambition ? Comment en parler, la mettre en pratique et comment l’incarner ?

Les objectifs du design sont de penser nos artéfacts et d’avoir une réflexion qui dépasse l’objet pour considérer son écologie14 – son énergie, sa matérialité, son obsolescence, sa fonctionnalité, son esthétique, etc. – et ses valeurs. La Raison comme fondement du projet fait ici obstacle aux raisons d’agir des designers qui sont autant de préoccupations pour préserver une qualité de vie. En cela, nous défendons une éthique du design basée sur l’élargissement du modèle centré-acteur, qui regroupe « les théories centrées sur les acteurs, les agents ou les parties prenantes (stakeholders) du projet de design15 » en faveur d’un modèle centré-actant, qui prend en compte les puissances d’agir vivantes et non vivantes. Cela veut dire un modèle qui considère les interrelations et les agencements entre des éléments hétérogènes s’affectant mutuellement.

2. Le trajet en design, quand il (nous) (trans)forme.

Hors du contexte économique, l’école est le lieu permettant l’expérimentation sans obligation de résultat. Elle offre aux apprenant(e)s toute liberté d’explorer et de penser les raisons, les manières et les intentions d’agir. Cependant, l’école reste statique et ne brasse pas suffisamment de diversité, incapable de concentrer et de considérer tous les agents – de l’interlocuteur à l’actant –, tous les moyens et tous les milieux nécessaires à l’apprentissage. De la même manière, le temps du projet est problématique, lorsqu’il est cadencé par le semestre et ses modalités évaluatives. Ces questions ponctuent l’adéquation de l’apprentissage à la réalité scolaire et sont ravivées par l’actualité des crises. Cette seconde partie est, pour nous, l’occasion d’initier une réflexion sur les modalités d’apprentissage et de motiver leur (ré)vision, à commencer par le statut du projet. La présentation de l’initiative NOMADE, portée par les enseignant(e)s Didier Kiefer, Bertrand Lemonnier et Nathalia Moutinho, nous servira de guide.

2.1. Le trajet, un apprentissage nomade

Dans sa pratique de designer, les idées et envies de Nathalia viennent des dialogues, des échanges avec ses interlocuteurs et ceci sur le terrain. Très présente sur site, elle retourne pour voir les lieux, les habitants et les usagers mais aussi le réseau des fabricants afin de parler avec les menuisiers, les serruriers, les artisans… Le trajet est, pour elle, le meilleur lieu de travail. Le design se fait ainsi en marchant tel un parcours, qui ne peut préétablir de façon sûre son chemin. Nous entrevoyons par ce vécu, une pratique qui ne soutient pas une progression linéaire et performative mais conjugue passivité et activité, déterritorialisation et reterritorialisation16. Ce va-et-vient l’invite à réagencer progressivement son action, ses savoirs et son ouvrage. En s’ajustant à chaque pas, chaque échange, chaque geste, la designer s’(in)forme et se singularise par l’effet de la rencontre et l’effort concédé pour regagner une sorte d’équilibre en fonction des affects émergeants – ce « mode par lequel le corps agit sur moi17 ». Le projet, ce « jeter quelque chose vers l'avant » (pro-jicio), marque bien l’impulsion initiale de l’action mais il ne peut témoigner, à lui seul, de la longueur des maturations faites de mises en correspondance avec des altérités – tant vivantes, artéfactuelles que mésologiques – et une réalité perçue. La reconsidération du projet en faveur de son vécu laisse de la place pour penser le trajet compris comme « le meilleur lieu de travail ». Il est selon son étymologie latine (trans-jicio) un « jeter à travers » qui tient moins de l’application d’une science que d’une compréhension par expérience. Le parcours NOMADE, récemment mis en place à Mulhouse invite à cette traversée. Initié par Didier Kiefer, professeur en gravure et impression, ce programme, de niveau master, est né des échanges des trois enseignants. Le programme s’organise comme un parcours transdisciplinaire en art et design, une recherche-action au sein de laquelle la pensée se fait en même temps que l’expérience. Les moments d’échange et de découverte ne contribuent pas à un résultat mais ont pour ambition de rester un temps de la recherche. En référence à Tim Ingold dans L’anthropologie comme éducation18 les enseignant(e)s y valorisent la notion d’undercommons qui est le moment qui précède la compréhension, le moment de mise en commun des expériences et d’expression de la sensibilité avant sa mise en théorie.

Figure 2 . Reportage en forêt avec Guy Stephan, garde forestier. Apprendre à voir et à lire le paysage : traces d’un charbonnier datant d’environ 1850, 2021.
Photo© Nathalia Moutinho.

Les étudiant(e)s NOMADE croisent leurs regards et échangent pour ouvrir de nouvelles perspectives sur des débats communs. Autour des axes de réflexion : concevoir avec le vivant, concevoir avec l’autre et concevoir avec le territoire, « cette pédagogie expérimente la mise en œuvre des conditions du « laisser faire » ; laisser croître plutôt que dessiner, fédérer plutôt que de construire, le dessin et la forme seront les résultats de ces démarches19 ». Le groupe NOMADE sort de l’école pour s’immerger dans les paysages (cf. figure 2), pour aller à la rencontre et se confronter ensemble aux présences, aux regards et aux narrations des autres : acteur(rice)s et actants des milieux anthropisés et paysagés. Des voyages-reportages, des journées d’étude ou encore la création d’un jardin en permaculture et son association étudiante Saxifrage (cf. figure 3), constituent autant de lieux et de temps de réflexion sur la notion du « faire » ou plutôt du « ne pas faire » (no-made), sur les espaces de partage comme acte social, politique et citoyen mais aussi sur les questions de diffusions en milieu rural ou tiers lieux.

Figure 3 . Séance de travail à l’école avec Thierry Boutonnier et Jean-Sébastien Poncet.
Photo © Didier Kiefer

Faire avec le milieu oblige le groupe à changer de paradigme pédagogique et de concevoir en croisant les disciplines et en suscitant des ambitions communes, pour fédérer une « intelligence collective ». L’expérience commune devient in-discipline et rompt avec une pédagogie superposant les compétences. Il ne s’agit pas tant de questionner un design des milieux que de de questionner la pensée des éco-systèmes au sein desquels les projets peuvent interagir avec les structures existantes et les énergies déjà en action. En référence à Philippe Descola20 le groupe intègre la notion d’ontologie pour repenser le monde artéfactuel. La relation avec le terrain et les humains se veut rhyzomatique et interdépendante plutôt que sous un rapport de subordination entre des potentiels et des compétences.

Le parcours NOMADE interroge l’inscription des urgences sociales et environnementales dans les pratiques de la création. Se mettre en mouvement pour aller à la rencontre de l’autre, reconnaître les principes d’un dialogue in-discipliné et en recherche par la mise en commun des vécus, ces initiatives encouragent autant une pédagogie intime et collective qu’une pédagogie du lieu, située grâce à un « apprentissage dans/par/pour le milieu21 ». Nous voyons se dessiner dans ce parcours de nouveaux ancrages pour apprendre et concevoir, des repères écosystémiques subtils, fluides et relationnels. En cela, le parcours NOMADE rompt avec une vision moderne faite de distinctions objectives et statiques ; nous le rapprochons davantage de ce que Deleuze et Guattari22 appellent les sciences dites « nomades », celles qui convoquent le flux et les turbulences, reconnaissent le devenir imperceptible et hétérogène des êtres et des choses, celles qui s’appuient sur le problème affectif23 à la place du théorème raisonné.

2.2. Le trajet, une recherche sur l’introjection

Dès lors que le trajet a le mérite de reconnaître plus justement l’expérience de conception il paraît opportun de prendre en compte les phénomènes en jeu au cours des pratiques comme des processus de conception légitimes. Cette préoccupation rejoint l’étude de la chercheuse, lorsqu’elle s’intéresse aux pédagogies du design qui valorisent une approche expérientielle, concrète et incarnée. Céline tente d’y dégager les motivations et les répercussions chez les apprenant(e)s, dans la pratique de conception et pour la discipline du design.

Pour prendre en considération ce trajet, la projection (pro-jicio), nous l’avons vu, ne suffit pas. Il nous faut saisir les dimensions existentielles et phénoménologiques qui en découlent et qui la nourrissent en retour. Car c’est bien une boucle rétroactive faite de motifs « que nous voyons […et] qui suscite[nt] en nous des raisons d’agir de telle ou telle façon 24». Elle étire la motivation initiale pour le géographe Augustin Berque. Cette sorte de rebond, itératif mais qui ne revient jamais à son origine, dessine dans le temps ce qu’il appelle la trajection du réel25, ce processus de transformation de la réalité engageant un flux relationnel d’ordre factuel – physique, matériel – et phénoménal – métaphorique, symbolique et expressif qui marque le sens de l’acte et de l’artéfact.

Nous y retrouvons le double mouvement opératoire du déploiement philosophique du projet, à l’initiative de Fichte26, lorsqu’il admet le caractère dialogique et médiateur du projet. Ce mouvement permet simultanément à l’individu (Moi) de poser en lui-même l’altérité (Non-Moi) tout en s’y opposant, puis à l’individu de se projeter dans l’altérité27. Par ce double mouvement d’intériorisation et d’extériorisation, Fichte reconnait autant les différences entre Moi et Non-Moi que leur dépendance et interaction mutuelle. Un processus que l’on retrouve dans l’émergence parallèle du faire, de la langue et de l’artéfact ; lorsque le langage répond par son expression symbolique – processus d’humanisation – au geste qui se projette sur la matière – processus d’anthropisation28. La trajection devient pour Berque :

« ce double processus de projection technique et d’introjection symbolique. C’est le va-et-vient, la pulsation existentielle, qui animant la médiance, fait que le monde nous importe. Il nous importe charnellement, parce qu’il est issu de notre chair sous forme de techniques et qu’il y revient sous forme de symboles29 ».

Le trajet du design suppose ainsi la prise en compte dans les apprentissages de ce mouvement oscillatoire entre projection et introjection. C’est ce qui incite la chercheuse à écouter le retour verbalisé de ceux et celles qui habitent les pédagogies du design, en se tournant vers le corps apprenant, témoin de son propre vécu en pratique. Toutes et tous, comme interprètes (I, I’, I’’), lui livrent des modes d’existence (P, P’, P’’) d’une réalité (S) devenue plurielle et intime (S, S’, S’’) selon la formule berquienne : R = lgS/lgP30. C’est dans ce souhait de partage de la dimension introjective des vécus en pédagogie que la chercheuse va à la rencontre du parcours NOMADE. Au-delà des savoirs déclaratifs de la transmission éducative, il s’agit de tisser les liens existants entre les réceptions multisensorielles et les savoirs implicites (ou procéduraux) présents lors d’un moment de pratique. Cela requiert de solliciter la mémoire affective des participant(e)s par le revécu du moment choisi ; une mise en évocation qui permet la conscientisation de la dimension pré-réfléchie (non conscientisée) de l’apprentissage. Cette attention bénéficie des outils et de la démarche psychophénoménologique déployée par le Groupe de recherche sur l’explicitation (GREX), croisant les travaux de Pierre Vermersch sur l’explicitation de l’action31 et ceux de Nadine Faingold sur le décryptage du sens32. Accompagner cette prise de conscience, à l’aide de relances spécifiques, tend à articuler le déroulement de l’action matérielle et cognitive à ses attentions perceptives et aperceptives. Directement reliée au contexte et aux moyens, l’explicitation déclenche une compréhension expérientielle et émotive des situations vécues entremêlant sensations, appréciations et prises de décisions aux actions et projections. La verbalisation de ces moments est alors propice pour ancrer le sens et les valeurs de l’acte dans un tissage relationnel habité par les sentiments et les émotions engendrés.

S’intéresser en tant que chercheuse aux pratiques pédagogiques qui sollicitent le corps apprenant invite à saisir ce que peut impliquer « comprendre par expérience » et quelle répercussion la réception phénoménale a sur l’acte de signifier (ou de donner sens). Car au-delà de la compréhension sémiotique du langage, le « sens expérientiel 33» proposé par Vermersch apparaît dès le détachement d’une singularité — une lumière, un frottement, un son, etc. — au sein de l’expérience pour s’achever dans le revécu et son partage. Chaque étape amène un nouveau degré de conscientisation, conjuguant un processus sémiotique intime et social, et forme une connaissance en devenir par la réactualisation de nos expériences et de nos rencontres.

À l’automne 2021, la création du jardin en permaculture nécessite l’apport de terre végétale (cf. figures 4 et 5). Ce moment de livraison de terre est programmé lors d’un workshop avec l’artiste Thierry Boutonnier, qui invite le groupe à un rituel, celui de la nouvelle terre. Il nous propose une prise de contact avec la terre au fil d’exercices corporels simples. S’ancrer dans le sol, respirer, sentir, enfoncer les pieds dans la terre pour capter la chaleur de celle-ci sont autant d‘exercices physiques qui permettent au groupe une connexion sensorielle avec leur environnement et donc une perception de celui-ci par l’expérience et la sensualité du corps. C’est ce moment que Solène Moulin — Charnet, étudiante en 2ème année au DNSEP, a choisi d’expliciter à la chercheuse en le revivant, lorsque ses pieds nus entrent en contact avec la terre molle et fumante.

Figure 4 . Vapeur de terre après dépôt au jardin de la HEAR, 2022.
Photo© Didier Kiefer

« C'est le matin, il est 8h... 35. Il y a une petite gelée sur l'herbe, puisqu'il fait très froid à ce moment-là, on est au mois d'octobre. On n’a même pas pris nos manteaux. Je sens que chaque petit brin d'herbe à des petites gouttes gelées. […] [L’herbe] n'est pas moelleuse comme d'habitude. Dès que je marche, ça craque. […]

Je ferme les yeux et… je me focalise sur tout ce qui se passe autour. Sur ma respiration, sur le bruit des oiseaux… un petit rayon de soleil qui apparaît et qui vient réchauffer mon visage. Je me focalise sur le vent aussi… qui vient doucement… s'appuyer sur mes épaules vers l'arrière. Derrière moi se trouve la rue, très bruyante... On entend… les klaxons, le tram et sa sonnerie. J'entends les rails… qui grincent quand le tram passe. […]

J'avance doucement. Je lève mon pied droit, je le glisse dans l'énorme tas qui fait au moins... un mètre de haut. C'est une petite colline donc je montre progressivement. Je mets un deuxième pied… et il s'enfonce comme dans du sable ou du coton. C'est très léger. Ça n’est pas dur et... ça n'alourdit pas mon pied. C'est plus du coton chaud dans lequel je me glisse presque comme dans des chaussons. Il fait tellement froid dehors que de la fumée sort de cette terre. […]

Je suis bien, j'ai plus envie de bouger… J'ai l'impression que cet espace est plus intéressant que le reste. »

Après avoir évoqué en détail ce moment, l’étudiante prend le temps d’exprimer ce qui se joue-là, ce qu’elle a appris à faire ou ne pas faire, en se demandant quelle designer elle devient à ce moment précis.

« Le fait d'avoir pris du temps pour conscientiser ce que nous étions en train de faire pendant ce rituel, ça m’a permis de prendre du recul. Et de se demander si cet apport d’une nouvelle terre allait être bénéfique pour cet espace ? Quelles conséquences cela pourra avoir sur cet environnement et ses petits habitants [les insectes] ? À cette époque, j'avais vu beaucoup d'abeilles qui volaient au-dessus du sol et qui se nichaient à l'intérieur de l'herbe. Je pense qu'elles avaient déjà un peu créé leur nid. Donc ça aussi, ça aura une conséquence sur ces insectes. Et ça je ne l’aurai peut-être pas vu si je n’avais pas pris le temps d'y aller et de regarder. »

Figure 5 . Les pieds de l’équipe à la suite du rituel de la nouvelle terre de Thierry Boutonnier et Jean-Sébastien Poncet, 2021
Photo© Nathalia Moutinho

Grâce aux outils de la recherche qualitative des sciences humaines, la recherche sur les pédagogies du design montre qu’elle peut accompagner une rétroaction intime et expressive du projet pour une prise en compte du trajet en design. Elle peut y faire émerger le sens de l’action réalisée, un sens incarné et habité par les écologies relationnelles du corps de l’apprenant(e)-designer, de l’artéfact et des milieux, un sens favorable tant à l’émergence d’un savoir incarné – inscrit dans le savoir latin sapien « sage » et acquis par l’indo-européen sap « sentir » – que d’une identité engagée. La recherche apporte ainsi des pistes pour soutenir les futur(e)s designers dans ces temps de doutes mais aussi dans leur cheminement de formation, en considérant le récit de leur expérience et le vécu de leur corps comme des témoins privilégiés et pertinents de l’acte du design.

Conclusion

Ce monde envahit d’artéfacts nous enjoint, en tant que pédagogues et chercheur(se)s, d’enquêter sur l’origine et le devenir des artéfacts et de penser un nouveau rapport à notre environnement. Dès lors que les étudiant(e)s déploient une éthique et ont bien identifié leur ambition, celle de penser l’habitabilité du monde et de déconstruire les schémas actuels. Il se pose la nécessité de réfléchir avec les écrits d’Ezio Manzini sur ce « que signifie aujourd'hui concevoir et produire ?34 ». Datés de 1991, ses écrits nous rappellent que la pratique de la conception évolue. Comment apprendre à « faire » ou « ne pas faire » par la conception. Comment accompagner ce parcours de longue haleine, mais aussi comment faire avec le déjà-là du cadre pédagogique qui conditionne les façons d’enseigner et d’apprendre. Si nous n’avons pas abordé en détail l’ensemble de ces questions, nous avons pu, grâce à cette réflexion croisée, esquisser les héritages et les modalités du projet comme outil privilégié du(de la) designer.

Nous avons vu que le projet ne relève pas simplement d’une codification et d’une division des étapes amenant à l’artéfact. En effet, le projet ne peut réellement anticiper ce qui va être fait, ce qui va être utile et pertinent ; un caractère imprévisible qui se retrouve dans son enseignement. Nous avons également décelé la limite de la pensée moderne du projet, une pensée faite d’autorités sous-jacentes qui constituent autant de freins à l’engagement des designers. L’approche du parcours NOMADE, nous a permis d’étendre notre compréhension de l’acte de design, et de saisir le caractère partiel du projet dans ce qui se joue lorsque le designer agit.

Le trajet comme « le meilleur lieu de travail » ne fait pas table rase du projet, il lui donne une juste place, celle de l’impulsion de l’action, qui pour être juste doit appeler son retour introjectif, par la prise de conscience des relations existantes entre le corps apprenant et son milieu. Explorer l’introjection permet d’ancrer les valeurs de l’action dans les préoccupations des designers et engage à faire ou ne pas faire projet en toute conscience. L’introjection dépasse les biais anthropocentrés et nous oblige à penser aussi le « ne pas faire », par l’observation attentive du vivant et des milieux. Car ne pas faire est aussi un projet, si ce dernier peut évidemment modifier notre environnement, il peut aussi le laisser en l’état en signifiant sa valeur et son statut. L’absence de modification n’enlève en rien la relation de pensée, au contraire elle la valorise comme étant non dominatrice de l’homme sur son environnement. L’acte (comme objet narratif) devient tout aussi important que le résultat (comme objet matériel).

L’étudiant(e) designer qui vient à l’école acquérir la légitimité à faire du design cherche aussi la limite du projet de design qui prend le risque de ne pas faire. Le projet ne se concrétise pas uniquement par l’addition de matière et de formes mais également par l’aiguisage des sens et sa capacité à décoder le monde artéfactuel comme les naturalistes observent la nature. Les étudiant(e)s prennent conscience tant de la culture matérielle qui nous entoure – si peu comprise – que de notre rôle de pédagogue, voire de lanceur d’alerte.

Cette réflexion amènera, nous l’espérons à prolonger une dynamique réflexive sur l’apprentissage des pratiques de conception croisant pédagogie et recherche. Il nous paraît profitable que l’enseignement du design se tourne vers ce que le corps de l’apprenant(e)-designer peut faire, peut ressentir et peut dire de son vécu. Pour cela, il nous paraît profitable de convier des expériences qui convoquent le hasard, le jeu, le décalage et qui suscitent une prise de risque, une perte de repères pour le dessin de nouveaux parcours. La reconnaissance d’une trajection qui forme et transforme conjointement les designers et les milieux témoignent de l’importance de prendre en compte le trajet en design au sein des pédagogies. Nous devons collectivement être en mesure d’offrir du temps et des libertés pour expérimenter de façon concrète et incarnée en s’immergeant au sein les milieux de vie mais aussi d’être en mesure d’offrir des outils méthodologiques pour rétroagir de façon intime et partagée sur les vécus de l’acte de design.

Bibliographie

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  1. . La formation s’achève par l’obtention du diplôme national supérieur d’expression plastique (DNSEP). 

  2. . Recherche codirigée par Moniques Richard, professeure spécialiste de l’enseignement des arts à l’UQAM et Lucie Sauvé, chercheure émérite spécialiste de l’éducation relative à l’environnement à l’UQAM.  

  3. . Manzini, Ezio, Artéfacts, Vers une nouvelle écologie de l'environnement artificiel, Paris, Centre Georges Pompidou, 1991. 

  4. . Findeli, Alain et Bousbaci, Rabah, « L'Éclipse de L'objet dans les théories du projet en design », dans The Design Journal, volumeo 8, numéro (n° 3), 2005, p.39. 

  5. . Le design global s’intéresse à l’ensemble des composantes contextuelles d’une problématique, à travers une approche transversale des domaines du design. 

  6. . Boutinet, Jean-Pierre, Anthropologie du projet, Paris, Presses Universitaires de France, 1990. 

  7. . Les arts libéraux sont en quête de la « connaissance du Vrai » (Laurent, 2019, p. 59). Ils regroupent les arts de la connaissance (les trivium) : rhétorique, dialectique, puis les arts du nombre (les quadrivium) : astronomie, géométrie, arithmétique, musique. À partir de la Renaissance, la peinture et l’architecture se réclament progressivement des arts libéraux grâce à l’usage privilégié des mathématiques. 

  8. . Findeli, Alain et Bousbaci, Rabah, op. cit, p.42. 

  9. . Ce débat fut proposé par la Biennale de Saint-Étienne et repris comme thématique de travail par l’ensemble des enseignant(e)s de théorie et pratique du design de l’école. 

  10. . Boutinet, Jean-Pierre, Op. cit., p6. 

  11. . Sennett, Richard, Ensemble : pour une éthique de la coopération, Paris, Albin Michel, 2013. 

  12. . Pallasmaa, Juhani, Le regard des sens, Saint-André de Roquepertuis, France, Le Linteau, 2010. 

  13. . Findeli, Alain, « La Recherche-projet : une méthode pour la recherche en design », dans R. Michel, Erstes Design for schungs symposium, Zurich, SwissDesignNetwork, 2005, p.11. 

  14. . Le sens du terme écologie est compris selon l’acception de Bernard Andrieu et Olivier Sirost (2014) telle une « écologie [qui] renvoie à une série de process[us], d’interactions fondamentales entre le corps et les milieux » dans « Introduction à l’écologie corporelle », dans Société, volume 3, numéro (n° 125), 2014, p.5. 

  15. . Findeli, Alain et Bousbaci, Rabah, Op. cit, p.42. 

  16. . Voir à ce sujet Deleuze, Gilles et Guattari, Félix, Mille plateaux. Capitalisme et schizophrénie, Paris, Minuit, 1980. 

  17. . Andrieu, Bernard, Le monde corporel de la constitution interactive du soi, Lausanne, L’Âge d’Homme, 2010. 

  18. . Ingold, Tim, L’Anthropologie comme éducation, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Paideia », 2018. 

  19. . Une citation extraite du document de présentation du parcours NOMADE (www.hear.fr/arts-plastiques/design). 

  20. . Descola, Philippe, La composition des mondes entretien avec Pierre Charbonnier, Paris, Flammarion, 2014. 

  21. . Sauvé, Lucie, Courants et modèles d’interventions en éducation relative à l’environnement. Module 5. Programme d’études supérieures – Formation en éducation relative à l’environnement – Francophonie internationale, Montréal, Les Publications EREUQAM, Université du Québec à Montréal – Collectif ERE Francophonie, 2003. 

  22. . Deleuze, Gilles et Guattari, Félix, Op. cit. 

  23. . Deleuze, Gilles et Guattari, Félix, ibidem p.448, « Tandis que le Théorème est de l’ordre des raisons, le problème est affectif, et inséparable des métamorphoses, générations et créations dans la science elle-même. […] le problème n’est pas un obstacle, c’est le franchissement de cet obstacle, une pro-jection ». 

  24. . Berque, Augustin, Écoumène. Introduction à l’étude des milieux humains, Paris, Belin, 2010, p. 241. 

  25. . Berque, Augustin, Médiance de milieux en paysage, Paris, Belin, 2000, p.40. 

  26. . Boutinet, Jean-Pierre, Op. cit. 

  27. . Ce double positionnement marque les positionnements subjectif et objectif du projet. 

  28. . L’anthropisation est le processus de modification et de transformation de l’environnement naturel par l’humain. 

  29. . Berque, Augustin, 2010, Op. cit., p.208. 

  30. . Ibid. p.234. La formule R (réalité) = lgS (logique du sujet)/lgP (logique du prédicat) propose de passer d’une logique en faveur d’une réalité universelle à un rapport onto/logique accueillant diverses réalités co-existantes et relatives. 

  31. . Vermersch, Pierre, L'entretien d'explicitation. Paris, ESF Sciences Humaines, 2019. 

  32. . Faingold, Nadine, « L’entretien de décryptage : Le moment et le geste comme voies d’accès au sens », dans Expliciter, numéro (n° 92), 2011, p.24 sq

  33. . Vermersch, Pierre, Explicitation et phénoménologie : vers une psychophénoménologie. Paris, PUF, 2012. 

  34. . Manzini, Ezio, 1991. Op. cit.