Présentation
Catherine Chomarat-Ruiz


Figure 1. programme 2022-2023

1. Il a quatre ans !

Le cycle de rencontres avec des chercheurs et des professionnels (designers, présidents d’association, artistes, etc.) est entré dans sa quatrième année d’existence. Et comme les années précédentes, il s’est déroulé à l’université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Selon une formule désormais éprouvée, il creuse certains thèmes (l’expérimentation via la ChaireEff&T, ou la question d’un doctorat en, sur, par, pour le design, par exemple), il réunit, en tant que modérateurs, des collègues venus de champs disciplinaires autres : la philosophie, les médias numériques... Il n’existerait toujours pas sans l’apport essentiel des étudiantes et étudiants du master 2 « Design, Arts, Médias » qui portent toute la conception graphique, la communication, l’accueil chaleureux des invités, les questions techniques (enregistrements des podcasts, réglages divers) mais aussi la conception et la mise en œuvre d’une séance.

2. Une place pour l’éthique

Si la formule est éprouvée, les contenus sont néanmoins innovants, comme en témoigne justement la séance organisée par les étudiantes et étudiants du master. Cette année, elle s’est intitulée : « Design, la conscience de quoi ? ». Il s’agissait d’interroger la place de l’éthique dans la pensée et la pratique du design et, pour répondre à cette interrogation, étaient invités : Nicolas Brosseau, artiste et designer plastique ; Thierry Boutonnier, artiste arboriculteur ; Karen Brunel-Lafargue, designer, enseignante et chercheuse à l’Université de Nîmes, et Samuel Béguin, designer.

Le moins qu’on puisse dire est que cette profession doute, non pas forcément d’elle-même, mais de ce qu’il convient de faire ou pas à une époque où les ressources naturelles s’amenuisent et où les crises politiques nous agitent. En ce sens, cette séance fait écho aux entretiens réalisés auprès d’une trentaine de designers sur la façon dont ces derniers vivent le temps dans l’exercice du métier. Là encore, elles et ils témoignent de combien l’accélération des projets peut entacher la qualité du travail. Et surtout, et c’est cela qui nous permet d’espérer, combien il est désormais nécessaire d’entrer en résistance... Notre lectorat se fera son opinion en lisant, s’il le souhaite, la transcription et l’analyse de ces entretiens dans la rubrique Paroles d’auteurs de notre revue, sous le titre « Le design et ses pratiques (volet 1). Questions de temps ». Qu’il me soit permis, une fois encore car cela ne sera jamais trop, de féliciter mes étudiants et mes étudiants pour la réalisation de ces entretiens et leur compréhension des « démarches sociologiques ».

3. Et une autre pour la critique

« Démarches sociologiques » : le mot est lâché. Ce choix de thématique « éthique » de la part de mes masters 2 s’inscrit aussi, me semble-t-il, dans la perspective d’un tout nouveau séminaire intitulé « Vers une théorie critique du design ». Né en septembre 2022, ouvert aux étudiants et à toute personne intéressée qui en fait la demande1, ce dernier a l’ambition de réfléchir à la perte d’un idéal éthique et scientifique auquel le champ du design serait en proie... Et pour y parvenir, il se fonde sur une appropriation de la philosophie sociale de l’École de Francfort, à commencer par ces représentants les plus contemporains (Harmut Rosa, Axel Honneth, Jürgen Habermas...) Pour toutes celles et ceux que cela intéresserait, mes notes de séminaire sont disponibles sur HAL, et il n’est pas trop tard pour y participer puisque ce séminaire se poursuivra sur cinq ans.

4. Pour ne pas finir

Retenons donc de cette cuvée 2022-2023 de conférences/rencontres, que la réflexion et la pratique du design s’exposent dans toute leur cohérence et avec vigueur dès leur origine, c’est-à-dire dès la réflexion critique que les jeunes designers portent sur leur pratique émergente. Faisons le pari que l’exposition de leurs projets, qui se tiendra à la Galerie Journiac en juin prochain2, finira par en convaincre les plus sceptiques !


  1. Catherine Chomarat-Ruiz. Vers une théorie critique du design (2022-2023). Doctorat. UFR 04 École des Arts de la Sorbonne, 47 rue des Bergers 750015 PARIS, France. 2022, pp.48. hal-03939065  

  2. L’exposition des projets se tiendra du 26 au 30 juin, à la Galerie Journiac, 47 rue des Bergers, dans le 15ème arrondissement (Paris).