Où en est le design graphique ?
Catherine de Smet, Vivien Philizot

Séance n°1, mercredi 21 janvier 2021. Propos recueilli par Frédérique Moal, relu par Margaux Moussinet


Figure 1. Synthèse graphique 1, Lucy Doherty
Podcast 1

1. Introduction de Catherine Chomarat

Nous sommes toutes et tous réunis ici virtuellement pour ce cycle de conférence qui est organisé autour de ce qu'on appelle des « frictions » entre design, arts et médias. En effet, l'objectif est de parvenir à interroger ces champs qui sont à la fois proches et en même temps distincts avec des théoriciens parfois différents et des praticiens qui n'ont pas les mêmes usages. Donc l'ambition de ce cycle, qui comporte huit séances réunissant deux à trois intervenants ou parfois plus, est justement de mettre en scène d'une certaine façon la richesse ou parfois l'hétérogénéité de ces champs. Je tiens tout de suite à dire que ce cycle de conférence a été préparé par mes soins, mais aussi avec mes étudiant.e.s du master 2 de Paris I qui s'intitule « Design, Arts et Médias » comme le cycle.

Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'accueillir Catherine de Smet, qui vient de Paris 8, et nous avons aussi le plaisir d'accueillir Vivien Philizot qui, lui, est enseignant à l'Université de Strasbourg. Deux universités différentes en France, mais qui finalement ont déjà un petit point commun qui est celui de s'intéresser aux questions du design, notamment graphique, et dans un contexte qui est aussi celui d'une université où l'on s'attache aux arts et aux médias. La question que j'ai voulu poser à nos deux invités — tout en leur disant se sentir très libres dans le traitement de cette interrogation — c'est : où en est le design graphique ?

Mon idée en fait est la suivante. Catherine, tu es historienne et j'ai envie de dire, de préciser tout de suite, tu es une véritable historienne. C'est-à-dire quelqu'un qui écrit ses ouvrages et ses articles, et qui base aussi son enseignement, sur un travail d'archive. Sur le fait non pas simplement d'opérer une synthèse à partir de faits établis par d'autres, mais d'aller aux sources et de s'attacher au fait de les trouver, au fait de les lire et au fait de les interpréter. Je pense que c'est important et, si j'ai pensé à t'inviter à ce cycle de conférence, c'est parce que tu as publié en 2012 un ouvrage qui s'intitule Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais1. Donc l'idée était, j'imagine, de faire une sorte de point sur les questions qui t'avaient intéressées pendant ces années-là. Ce n'est pas ta seule entrée dans la question du design, entendue au sens large, c'est-à-dire avec une préoccupation par exemple pour l'architecture. Il me semble que ton dernier ouvrage, en 2019, est consacré à l'architecte Le Corbusier, mais avec un angle d'attaque très particulier, qui est celui du penseur du musée. Le titre exact étant : Le Corbusier penseur du musée2. J'imaginais qu'à partir de cette discipline scientifique, qui est l'histoire et sa pratique, tu pourrais répondre à ta façon à cette question de savoir où en est, et peut-être donc, où va le design graphique.

Pour Vivien Philizot, c'est toute autre chose, enfin toute autre chose avec évidemment un champ commun. Toi, tu es d'abord docteur en « arts visuels et designer graphique ». Tu ne rentres donc pas directement dans ton champs par cette question qui est celle de l'histoire, mais par celle de la pratique et d'un domaine qui est nommé « arts visuels » et pas seulement « design graphique ». Je pense que, peut-être, il y aura là quelque chose à expliciter. Mais quoi qu'il en soit, ce qui avait retenu mon attention c'est un article qui va bientôt paraître dans la revue Appareil et qui porte sur la question de la traduction et du design graphique. Alors pourquoi ? Parce qu'à l'occasion de cet article tu rappelais un passage de Thomas Kuhn dans La Structure des révolutions scientifiques3. Kuhn y dit la chose suivante : « Il y a peut-être des interlocuteurs scientifiques dont les paradigmes sont si différents qu'ils n'arrivent plus à se comprendre et ils devraient se positionner ou agir comme s'ils étaient tenant de langues particulières et avoir à penser en termes de traduction ». Et à partir de là, tu développais un propos sur le lien entre l'épistémologie du design graphique et la traduction. J'ai donc pensé qu'il serait intéressant de développer cette approche, cet angle. C'est-à-dire entrer dans le design graphique d'un côté par l'histoire et de l'autre côté par l'épistémologie, qui sont deux disciplines bien différentes, pour traiter de cette question du devenir de la situation et du devenir du design graphique.

Avant bien sûr de vous remercier d'avoir accepté cette invitation, je voudrais clore ce petit préambule en rappelant les règles du jeu : chacun d'entre vous va prendre la parole et, à l'issue de chacune des interventions, nous gardons un temps pour des questions spécifiques. Puis, à la fin nous, nous gardons la possibilité d'échanger sur ces questions croisées. Voilà, je vous remercie et je passe la parole à Catherine de Smet pour son intervention à propos de son livre et de sa pratique d'historienne.

2. Conférence de Catherine de Smet

Merci, Catherine, pour cette présentation. Je vais commencer par m'installer correctement et je vais tout de suite partager mon écran même si les images ne s'imposent pas immédiatement. Je précise que les images sont de l'ordre du bricolage, c'est une présentation avec les moyens du bord. Mais j'espère que cela remplira son office.

2.1 Présentation de Pour une critique du design graphique : Une collection d'articles

Ce livre paru initialement en 2012, Pour une critique du design graphique4, a connu une nouvelle édition en 2020. Je reviendrai sur ce fait, mais vous voyez là les trois couvertures successives de ce livre.


Figure 2. Vue des couvertures des deux premières éditions du livre Pour une critique du design graphique


Figure 3. Couverture de l'édition 2020 du livre Pour une critique du design graphique

C'est une collection d'articles qui avaient tous déjà été publiés auparavant dans des revues ou des catalogues, le plus ancien de ces textes date de 1999 et les plus récents dans la dernière édition datent de 2014. Ce sont pour la plupart des textes écrits en réponse à des commandes, elles ont donc orienté à la fois les sujets, la longueur des articles et parfois le ton également, selon le support de la publication à laquelle ils étaient destinés et les circonstances de ces publications. Autrement dit, le hasard a joué un grand rôle dans l'activité d'écriture dont ce livre rend compte et en ce sens cet ouvrage ne répond pas à un programme, cependant, il témoigne du choix que j'ai pu faire à un moment donné de prendre pour principal objet de recherche le design graphique. Ce à quoi ma formation d'histoire de l'art ne me destinait pas forcément. Il reflète aussi évidemment mes principaux axes de recherche ou en tout cas une partie de mes axes de recherche. L'ensemble de ce livre porte la trace d'une manière de travailler attachée aux artefacts qui sont le plus souvent le point de départ de la réflexion déterminant à chaque fois une approche spécifique. Ces artefacts sont autant que possible historicisés et contextualisés, l'attention se portant selon les cas de manière plus ou moins soutenue sur un processus de travail, des usages ou une dynamique de relation s'établissant avec d'autres objets. Et pour finir cet aperçu très général, on peut souligner que dans ces textes il s'agit plutôt d'un graphisme d'auteur parce que je me suis beaucoup intéressée à la pratique des graphistes qui développent une écriture singulière. Même si parfois l'auteur en question est un amateur comme Le Corbusier par exemple ou un artiste comme Thomas Hirschhorn. C'est une dominante qui confère à cette collection d'articles son homogénéité d'une certaine manière et qui correspond à mon intérêt pour la dimension créative du design graphique. Mais je précise qu'il ne défend pas pour autant une ligne de recherche exclusive.

2.2 Pour une critique du design graphique : Témoin de la compatibilité entre histoire de l'art et design graphique

Un fil historiographique traverse différents articles, une partie de l'introduction est consacrée par exemple au mauvais modèle que constituerait l'histoire de l'art, un modèle jugé inadéquat par beaucoup d'historiens du graphisme. Je plaiderais plutôt quant à moi pour une réhabilitation de celui-ci puisque la condamnation courante s'appuie à mon avis sur une vision un peu étroite et faussée. J'évoque donc quelques figures comme Aloïs Riegl, Heinrich Wölfflin, Aby Warburg ou Meyer Schapiro dont les travaux témoignent d'une pratique de l'histoire de l'art compatible avec les objets qui nous occupent. Et c'est cette idée que prolonge le premier texte du livre, la commande qui m'avait été faite alors était de traiter les relations entre art et graphisme et j'avais adopté le parti de prendre deux exemples d'historiens de l'art d'aujourd'hui qui s'étaient penchés sur des sujets relevant du graphisme. En l'occurrence Jean-Marc Poinsot avec une analyse du passage de la modernité à la postmodernité dans le packaging du sucre. Et Jean-Claude Lebensztejn qui était, si je ne me trompe pas, professeur à Paris I dans votre département et qui s'est toujours intéressé à la typographie, à la mise en page et à toutes les manifestations graphiques vernaculaires ou non. Donc dans ce texte je reviens brièvement sur l'analyse que faisait Lebensztejn du Coup de dés5 de Mallarmé où la question du choix typographique occupe une place importante ainsi que sur sa découverte d'une étiquette de champagne qui avait inspiré Cézanne sur la forme même du livre dans lequel ses textes apparaissent. Le livre Zigzag6 lui-même est un objet extrêmement intéressant, Lebensztejn y étudie des objets graphiques notamment, et c'est ce qui apparaît sur la page de gauche. Une célèbre affiche anglaise autoréflexive qui entre dans une élaboration théorique où Lebensztejn fait aussi intervenir Matisse et une pochette de Pink Floyd, mais aussi d'autres objets. Ainsi Lebensztejn a cette particularité qu'il sait traduire dans la forme de ses livres, dans ce qu'il exige pour ses livres, des préoccupations graphiques. Et donc la forme de ses livres, et en particulier de Zigzag7, propose une relation intime avec le sujet, mais je reviendrai là-dessus tout à l'heure. Donc je vais continuer rapidement de tirer ce fil historiographique avec « Pussy Galore et Bouddha du futur8 ». La présentation suit pour l'instant l'ordre des premiers textes du livre, mais je n'ai pas cherché à suivre particulièrement cette succession, j'ai plutôt essayé de trouver des arrangements thématiques. « Pussy Galore et Bouddha du futur9 » qui se trouve être le deuxième article avait été écrit pour le catalogue de l'exposition elles@centrepompidou10 et j'essaie à cette occasion d'emboîter le pas de critiques déjà portées par des gens comme Ellen Mazur Thomson ou comme Marta Scotford parmi d'autres. J'essaie de repeupler un peu l'histoire du graphisme des femmes qui en sont souvent absentes avec l'exemple entre autres, exemple heureusement maintenant aujourd'hui célèbre, de Muriel Cooper directrice artistique de MIT Press, mais aussi pionnière du design interactif. Et qui, si elle était absente d'un certain nombre d'ouvrages auparavant, apparaît maintenant de manière, je crois, plus systématique dans des ouvrages plus récents. Et d'autres cas également. J'essaie aussi d'envisager méthodologiquement ce que peut entraîner ce genre d'exercice, ainsi le titre de l'article et le sous-titre sont fournis respectivement par la police de signes Pussy Galore11, créée par un collectif de femmes anglaises dans les années 1990 à l'initiative de la revue FUSE. Et Bouddha du futur est l'un des surnoms que s'était donnés une impératrice chinoise du VIIe siècle qui avait favorisé le développement de l'imprimerie. Enfin, le texte consacré à Josef Müller-Brockmann intitulé « La grille de l'histoire12 » dans lequel je m'attache spécialement aux ouvrages écrits par le champion de la grille qu'était Müller-Brockmann et à la manière dont il a pu construire, je dirais en graphiste, les récits qu'il propose.

Les identités visuelles sont abordées dans plusieurs textes, notamment celui-ci : « Jean Widmer et le logo du Centre Pompidou13 », le sujet y est abordé de front avec le logo du Centre Pompidou. À cette occasion, j'ai cherché à retracer l'histoire de la première identité visuelle du Centre Pompidou : l'organisation du concours — l'un des premiers, sinon le premier du genre en France —, les propositions de Jean Widmer et de son équipe, le caractère typographique développé pour l'occasion et le système signalétique comme l'identité imprimée. Tout ce dispositif se passant précisément et très volontairement de tout logo, c'est ce que Widmer refusait d'inclure dans son système. Finalement, il l'a dessiné de guerre lasse sous la pression de la direction du centre et ironie de l'histoire, c'est ce logo qui reste la seule trace du graphisme qui avait accompagné l'ouverture du centre en 1977 et accompagné aussi ses premières années. Cette nouvelle édition du livre m'a permis d'actualiser un certain nombre d'informations notamment celles qui concernent ce logo puisque Jean Widmer l'a récemment remanié dans le sens de ses premiers dessins en supprimant un étage, simplifiant la forme générale comme il l'avait initialement souhaité, ce qu'on lui avait à l'époque refusé au prétexte que le logo devait refléter fidèlement l'architecture inspiratrice et donc les cinq étages de l'édifice. Il y a donc maintenant un étage en moins et cela s'approche beaucoup plus du signe synthétique que Widmer avait souhaité proposer au départ. L'un des nouveaux textes intégrés dans cette édition 2020 du livre concerne l'identité que le studio Zak Kyes, donc Zak Group, avait imaginé pour le Nouveau festival14, évènement d'art contemporain créé par Bernard Blistène au Centre Pompidou. Le sujet fait écho de différentes manières à celui que j'ai évoqué, car il concerne la même institution et l'identité de Jean Widmer, en dehors du logo, n'a pas résisté très longtemps et a été d'abord progressivement trahie puis véritablement supplantée par une autre ou plusieurs autres. Celle du Nouveau Festival n'a jamais existé et c'est l'origine de la commande de l'article destiné au catalogue d'une exposition à San Francisco dont était commissaire John Sueda et à laquelle participait Zak Kyes15. L'exposition était dédiée à des projets non aboutis, refusés ou suspendus. Donc on peut tracer une correspondance amusante entre l'identité conçue par Widmer et celle de Zak Group pour le Nouveau Festival. L'identité du Nouveau Festival en effet s'appuyait sur une couleur, donc le New Extreme Violet, mais une couleur nommée et non pas associée à une teinte en particulier. Elle devait plutôt fonctionner comme les couleurs des blasons médiévaux : définie de manière abstraite par un lexique spécifique. Or, une anecdote dans la genèse du code couleur d'origine du Centre Pompidou, conçue par Widmer et son équipe, offre une sorte de préfiguration de ça. En effet, Widmer avait prévu d'associer une couleur à chaque département du centre et il avait attribué le violet à l'IRCAM ; or le directeur de l'IRCAM Pierre Boulez s'y était tout à fait opposé trouvant que le violet était crépusculaire. Et donc Widmer avait changé le nom, il avait dit que désormais la couleur de l'IRCAM ne serait pas le violet, mais le pourpre. Widmer n'avait strictement rien changé aux couleurs attribuées à ces ensembles, mais cela avait satisfait Boulez. Une autre identité visuelle muséale est présente dans le texte sur Vier5. Dans ce texte sur le tandem de graphisme Vier516 j'évoque le design du musée de Francfort qui est une identité visuelle qui a été vraiment appliquée, mais seulement un temps puisqu'elle a aujourd'hui a disparu. Elle était extrêmement intéressante parce qu'elle avait pour particularité d'inclure dans une écriture pérenne, durable et sophistiquée la nature réversible, éphémère, voire chaotique, des identités visuelles institutionnelles. C'est un cas très intéressant à mon sens parce que c'est réellement une forme de design critique qu'ils avaient proposé, mais ça n'a pas duré.

2.3 Pour une critique du design graphique : La fabrique du livre

Tout ce qui touche à la fabrique du livre et au design éditorial occupe une grande partie des textes du volume. Je me suis rendu compte que sur les dix-huit articles, dix ou onze avaient pour sujet central des livres, ou disons des objets imprimés et reliés, et d'autres sans traiter le sujet de manière exclusive l'abordent quand même. Il y a donc seulement trois ou quatre articles qui échappent complètement à la question du codex : les trois que je viens d'évoquer et puis « Habiller le Jazz17 » qui porte sur des pochettes d'albums. J'aimerais revenir sur la fabrique même de ce livre Pour une critique18. Vous avez vu tout à l'heure les couvertures illustrées des précédentes versions et j'aimerais préciser que cet éditeur B42 est un éditeur-graphiste, chose importante. Graphiste en la personne d'Alexandre Dimos qui est également cofondateur du studio de graphisme De Valence à qui est due la conception graphique du livre. Nous avons fait avec B42 et Alexandre trois autres livres ensemble19 et la qualité de ce type de collaboration m'importe beaucoup, je trouve que c'est une garantie que le physique du livre sera sérieusement pris en compte.


Figure 4. Vue en détail de la reliure à la colle froide des deux premières éditions du livre Pour une critique du design graphique

Cette image — qui est venue à plusieurs reprises quand il ne fallait pas tout à l'heure — je vous la montre parce que c'est la reliure dont bénéficiaient les deux premières éditions du livre. La fabrication du livre c'est très important et la reliure des livres m'obsède. En France, on relie mal les livres, les livres s'ouvrent mal, les façonneurs ne savent peut-être pas bien faire, j'ai donc particulièrement apprécié que B42 s'intéresse au sujet et donc ait proposé ce système de reliure Otabind qui permet une ouverture parfaite des livres. La dernière édition de 2020 ce n'est pas Otabind, mais c'est une reliure à la colle froide et la colle froide, que peu de façonneurs utilisent et appliquent, permet une bonne ouverture ou en tout cas une souplesse que ne permet pas la colle chaude. Donc je trouvais intéressant d'insister sur cet aspect très matériel de l'ouvrage. Avant donc de travailler avec B42, j'avais déjà eu la chance de publier chez d'autres éditeurs-graphistes à commencer par Lars Müller Publishers en Suisse pour mes deux premiers livres20 et chez Occasional Papers pour l'anthologie que j'ai réalisée avec Sarah de Bondt21. Sarah étant codirectrice de l'ouvrage, mais aussi codirectrice, cofondatrice avec Antony Hudek de la maison d'édition et directrice artistique de celle-ci. Ce grand avantage, ce que je considère comme un grand avantage d'avoir un éditeur-graphiste, a parfois éventuellement quelques revers. Je vais en évoquer un. Alexandre Dimos a souhaité dans cette dernière édition supprimer un texte qui figurait dans les versions précédentes sur les identités visuelles de Wim Delvoye22 parce qu'il trouvait que ça n'était pas du bon design, que ce n'étaient pas de belles images. Donc c'est un point de vue de graphiste qui a prévalu et que je respecte tout à fait, même si je regrette un peu la disparition de ce texte. En fait, cela a aussi permis d'ajouter des articles récents, mais j'ai entendu dans les arguments développés par Alexandre Dimos, pour faire disparaître ce texte, des choses qui peuvent revenir sur les raisons pour lesquelles on peut s'intéresser à certains objets et un partage entre ce qu'on peut considérer comme du bon design dans certaines perspectives et des considérations qui n'ont pas lieu d'être dans d'autres perspectives.

Les deux premières impressions de 2012 et 2013 avaient la même couverture illustrée qui donnait un aperçu de l'iconographie du livre. Pour la dernière édition, Alexandre Dimos a voulu marquer nettement le fait qu'il s'agissait d'une nouvelle édition avec quelques changements dans le contenu comme dans les images. Il a donc renoncé à toute image en couverture en faisant passer la présentation, destinée en principe à la quatrième de couverture, en première de couverture. Et il a développé les colophons dans le bas de la première de couverture mais aussi sur la quatrième. Je l'évoque parce que c'est aussi un clin d'œil à l'un des textes du livre et l'on peut dire un hommage au Zigzag23 de Lebensztejn puisque le colophon y prend une place très importante.

2.4 Pour une critique du design graphique : Le livre

Dans Zigzag24, Lebensztejn ouvrait son livre avec cette page qui est une espèce d'énorme colophon dans lequel il a introduit toute sorte de données qui concernent à la fois le contenu du livre et sa fabrication. Je pense que cette page est inspirée chez Lebensztejn par la revue Arts et Métiers graphiques, en tout cas c'est une hypothèse que je fais, mais je sais qu'il était lecteur de la revue Arts et Métiers graphiques. C'est une revue des années 1930 très importante et très intéressante qui proposait des achevés d'imprimés particulièrement étoffés et nourris. Une revue évidemment réflexive puisque c'était une revue portant sur les arts et les métiers graphiques et qui essayait d'en faire la démonstration dans sa structure et dans son objet même. Je fais donc l'hypothèse que Lebensztejn s'est inspiré d'Arts et Métiers graphiques pour son livre. Par ailleurs, c'est un livre extrêmement sophistiqué et cette page d'ouverture a d'autres raisons d'exister, mais vous le découvrirez si vous lisez ce livre de Lebensztejn.

S'agissant de livres, il y a deux auteurs que je cite souvent de manière un peu récurrente. Pour commencer l'auteur Paul Valéry qui justement dans le premier numéro de Arts et Métiers graphiques en 1927 avait reproduit l'article qui s'intitulait « Les deux vertus d'un livre25 ». La deuxième vertu tenant à ce que Valéry appelait le physique du livre. Et dans un autre article Valéry avouait qu'il avait été d'abord indifférent à la forme du texte avant d'en comprendre l'enjeu, enjeu qu'il résumait en déclarant : « rien ne mène plus sûrement à la barbarie qu'un attachement exclusif à l'esprit pur, on méprise les objets et les corps26 ». Et le deuxième auteur, Theodor Adorno, qui était lui convaincu que les livres, je cite, « disent quelque chose sans qu'on les lise27 », précisant aussi que l'impression peut être une critique de l'écriture. Ces déclarations synthétisent ou emblématisent les raisons pour lesquelles je m'adonne à cette approche visuelle et matérielle des livres en cherchant à en interpréter les formes. Arts et Métiers graphiques proposait non seulement des achevés d'imprimés spécialement développés, et avec en plus une mise en forme intéressante, mais proposait également un détail des papiers utilisés dans chaque numéro. En voici donc une liste pour ce même numéro28.

2.5 Pour une critique du design graphique : Le livre d'architecte

Concernant donc les livres — cette approche que j'essaie de développer — l'exemple peut-être le plus facile à décrire ici est celui des livres d'architectes. Je retiendrai juste deux cas qui sont ceux de Le Corbusier et celui de Rem Koolhaas, deux architectes qui ont tous deux beaucoup écrit et notamment beaucoup réfléchi à la ville et à l'espace collectif. Les deux cas sont très différents puisque Le Corbusier était généralement le graphiste de ses propres livres, donc un graphiste amateur, tandis que Rem Koolhaas s'est au contraire appliqué à travailler avec des graphistes professionnels soigneusement choisis en fonction de ses projets éditoriaux. Mais au-delà de ces différences, ils partagent une attention toute particulière à l'objet livre et une confiance dans la puissance sémantique de sa forme. Le livre de Le Corbusier qui fait l'objet d'un article dans Pour une critique29 est Les plans de Paris : 1956-192230. C'est un livre qui n'est pas très connu, en effet, il a été un peu boudé par les historiens et les théoriciens dans la mesure où il ne recèle à peu près rien de neuf sur le plan théorique de la pensée de Le Corbusier. Et nous pouvons même dire que c'est un livre qui n'est fait que de reprises. Le Corbusier a puisé dans sa propre bibliographie pour refabriquer un nouveau livre, mais c'est un livre qui n'apporte rien dans son contenu textuel de nouveau, à un détail près que je vais évoquer. Ainsi, le plus étonnant est que ce sont des fac-similés de pages de livres publiés précédemment par lui-même qui sont reproduits et qui constituent le livre. Cela explique le choix du format puisqu'il reprend le format de l'œuvre complète La Ville radieuse31, donc le livre dans lequel Le Corbusier a puisé pour ce nouvel ouvrage.

Le sujet annoncé est Paris, mais c'est surtout en fait la ville, et la superposition des fac-similés apparaît comme une sorte de stratification urbaine. C'est un effet renforcé par ce que Le Corbusier appelle la « piste verte » dans le livre, c'est-à-dire le chemin frayé à travers les pages. C'est un chemin qu'il conseille au lecteur de suivre, je cite, « d'abord et jusqu'au bout32 ». Il invite donc le lecteur à traverser le livre avant même de le lire et ce chemin se dessine à partir des espaces vides laissés. Le blanc des pages qui construit ce chemin est souligné par deux interventions nouvelles de la part de l'auteur, dont un texte manuscrit qui introduit un deuxième niveau de lecture. C'est un texte finalement assez court qui contraste avec le texte composé des pages reproduites et des aplats verts qui pointent la piste verte.

Ce que j'essaie de montrer dans ce texte c'est que ce livre, publié aux Éditions de Minuit, qui se voulait expressément un livre grand public est en fait directement lié à Le Poème de l'Angle Droit33. Le Poème de l'Angle droit est un porte-folio précieux de très grande taille, un ouvrage vraiment bibliophilique imprimé par Tériade en lithographie et dont le texte est lui aussi entièrement manuscrit. Je pense que Les plans de Paris34 et ce Poème de l'Angle droit35 sont les deux faces d'une même médaille. C'est ce que suggère une analogie que j'ai essayé de montrer dans une diapositive qui n'apparaît malheureusement pas, mais peu importe. Peut-être que vous pouvez le deviner de cette manière. C'est-à-dire que la manière dont le titre est construit36, avec cette superposition de cartouches, apparaît aussi bien dans le cas du titre de Le Poème de l'Angle droit37 que sur cette page qui en reprend la disposition. Elles sont vraiment tout à fait analogues dans la manière de présenter par bandeaux superposés les éléments. Et donc cela me paraît être un argument allant dans le sens de ce que je veux montrer, c'est-à-dire les deux faces de cette médaille. Mais Le Poème de l'Angle droit38 a toujours été repéré comme un livre d'artiste dans la tradition artistico bibliophilique française alors que Les plans de Paris39 relèvent d'une pratique beaucoup plus originale, plus expérimentale et qu'on pourrait associer à des livres d'artiste d'une toute autre génération. Il y a là un contraste, et ce sont des livres qui sont parus juste à une année d'écart. En effet, Le Poème de l'Angle Droit40 est paru en 1955 et Les plans de Paris41 en 1956.

Alors pour ce qui est de Rem Koolhaas, la coauctorialité — si je peux me permettre ce terme un peu barbare — apparaît avec le partage de la signature avec les graphistes. Pour le livre S, M, L, XL42 avec Bruce Mau et pour son livre Content43 il avait également donné en couverture, au même niveau que son propre nom et celui de son agence OMA, le nom des graphistes qui avaient fait le livre. Dans le cas de S, M, L, XL44 le livre a vraiment été un objet extraordinaire, si vous le connaissez c'est un livre énorme, très imposant et conçu un peu comme l'étaient Les plans de Paris45, à l'image de ce dont il traite. Et à travers sa composition, ses déterminants matériels, sa mise en page, les rapports texte image, etc., c'est un livre qui s'affirme comme un livre, d'où le titre que j'avais choisi, et il est à l'opposé de Content46 qui lui était un livre qui s'affirmait comme un objet jetable, comme un magazine un peu trash à l'image du Junk Space dont il est question à l'intérieur du livre.

Voilà, je vais m'arrêter là. J'espère que mon bricolage tenait un peu debout et je suis désolée pour les images qui ne fonctionnaient pas, le transfert de mon PowerPoint en PDF a été infructueux pour certaines images. Vous avez au moins pu voir quelques doubles pages de l'ouvrage. Catherine Chomarat m'avait proposé de présenter mon livre, j'ai répondu à sa demande de manière assez simple et j'avoue que c'était aussi une façon d'échapper à cette question embarrassante (où en est le design graphique ?) parce que je ne sais pas si je serais à même d'y répondre. Et je crois que ce livre est une façon d'y répondre, je me suis intéressée à un certain nombre de questions et d'objets. Je ne crois pas pouvoir en dire beaucoup plus.

3. Discussion

Catherine Chomarat 

Il y a peut-être quand même un moment où quelque chose se dit concernant cette question. C'est sur la question des critères qui ont prévalu à l'élimination d'un des textes qui porte sur l'œuvre de Wim Delvoye et de ses vilaines images. Si on dit qu'à un moment donné tu as écrit sur ses réalisations et que finalement l'éditeur qui est aussi graphiste a pensé qu'il fallait écarter non pas forcément le texte dans ce que tu en disais, mais les images, c'est bien qu'il y a une évolution de ce qui est recevable ou pas en termes de design graphique. Qu'en penses-tu ? Est-ce que c'est un accident de parcours ? Ou au contraire : est-ce qu'il y a vraiment là quelque chose qui révèle une orientation de l'histoire du graphisme ?

Catherine de Smet

Non, honnêtement je ne crois pas que ce soit révélateur de quelque chose ou sinon peut-être d'une certaine radicalisation de la ligne éditoriale ou de l'orientation de B42, et encore... Mais je pense que c'était aussi peut-être ce qui apparaissait le plus hétérogène, le plus différent du reste. Donc je ne pense pas que ça soit révélateur d'une évolution, en revanche c'est certainement révélateur de questions qui apparaissent du reste des textes d'historiens, de récits aussi, de débats dans des colloques où cette question du bon design apparaît toujours dès lors qu'on peut écrire une histoire. Les critères d'évaluation ne sont pas les mêmes que ceux qui peuvent prévaloir dans une école par exemple quand il s'agit de se familiariser avec une pratique et avec des modèles. Donc je pense que c'est révélateur d'une tension entre le travail de l'historien et les critères d'un graphiste dans une pratique. Cela dit, je pense qu'il y a aussi aujourd'hui — et c'est peut-être un petit élément de réponse — des graphistes qui s'intéressent aux vilaines images et qui en font quelque chose. On peut repérer ce type d'attention portée à des objets que certains considèrent clairement comme de vilains objets et qui deviennent le centre de l'intérêt de certains graphistes.

Catherine Chomarat

Merci. Est-ce qu'il y a des questions ? Ah, il y a une question qui vient d'être posée sur le tchat par Geneviève R. Est-ce que vous pouvez prendre la parole et l'énoncer de manière directe ?

Geneviève R.

Oui. Bonjour. Vous avez mentionné que le graphisme d'auteur est un fil conducteur dans votre ouvrage. Donc je voulais savoir : est-ce que vous pouvez préciser la place du design d'auteur dans la discipline du design graphique ?

Catherine de Smet

Vos questions sont intéressantes, mais en fait je suis très embarrassée par les questions très générales comme ça parce qu'il est difficile d'y répondre. Déjà, ce qu'on appelle graphisme d'auteur peut varier. Je pense que ce n'est pas forcément la même chose selon les cultures, les pays, voire les époques. C'est un terme que j'utilisais presque entre guillemets. Mais en effet, je pense que la question est celle de la signature. Est-ce qu'un graphiste signe son travail, revendique une écriture singulière et personnelle, ou bien au contraire revendique de travailler au sein d'un collectif sans chercher à faire valoir sa propre signature et son nom ? Et je pense qu'on peut trouver des exemples de ces deux orientations dans différentes situations, à différentes époques. Il est certain, et ça a été beaucoup critiqué, que l'histoire canonique, si tant est qu'on puisse parler de canon parce qu'il est peut-être un peu tôt pour ça, telle qu'elle a été écrite, a été critiquée pour précisément son attention portée plus spécialement aux auteurs. Donc une histoire faite de grands noms ou au moins de noms plutôt que de pratiques éventuellement anonymes. C'est pour cette raison que je précisais le fait que m'attacher au graphisme d'auteur n'était absolument pas pour moi une ligne de recherche. En effet, je suis tout à fait convaincue de l'intérêt de regarder les formes graphiques anonymes.

Geneviève R.

Mais est-ce que, dans votre dernier article de ce livre où vous écrivez sur la relation entre les graphistes et les architectes au sein d'un projet éditorial, ne pourrions-nous pas voir là justement un début d'une recherche qui pourrait commencer sur cette question de la co-signature, de la co-écriture ? Et donc finalement dans l'évolution du design graphique d'aujourd'hui vers cette pratique de travailler ensemble, de collaborer à la manière des projets éditoriaux que vous montrez ? La relation et la collaboration se valent presque équitablement. J'ai l'impression que cet article n'était pas dans vos anciennes éditions si je ne me trompe pas, et il y a peut-être en ça une ouverture possible à ce que peut être le design graphique futur ou ce qu'il est aussi aujourd'hui ?

Catherine de Smet

Oui sûrement, cela dit ce côté collectif on peut déjà le trouver dans les avant-gardes du début du 20e siècle et la co-signature on peut la trouver par exemple quand Lissitzky dit en page de titre qu'il a construit le livre des poèmes de Maïakovski47. Il y a des cas de co-signature dans l'histoire, c'est vrai qu'ils ne sont pas très fréquents, mais il y avait chez les futuristes Russes cet esprit de travail collectif, de partage et de partage entre des représentants de différentes disciplines et de pratiques différentes. Donc, je pense que cet exercice collectif qui est en effet un trait assez présent dans le design graphique contemporain, on peut aussi en trouver des traces dans un passé plus ou moins récent et c'est toujours intéressant d'établir ces liens. On pourrait du reste tenter de réécrire aussi l'histoire du graphisme à travers les collaborations, en soulignant les réalisations à plusieurs.

Vivien Philizot

J'ai également une question pour toi Catherine. Pour commencer, merci pour cette présentation. Dans la nouvelle édition de ton livre il y a un premier texte qui est nouveau — il me semble — c'est « Pour une histoire de l'art en Zigzag48 » où tu éclaires un petit peu ta posture d'historienne ou plutôt, la manière dont tu approches l'histoire du design graphique. Est-ce que tu pourrais nous dire comment ce point de vue, d'une historienne sur le design graphique et vu par des historiens de l'art, comment cette écriture-là peut être un champ disciplinaire qui n'est pas habitué autant que ça aux objets qu'il étudie ?

Catherine de Smet

Alors pour répondre je pense que ça a beaucoup évolué récemment, pour preuve le programme d'une journée organisée par l'INHA49 à laquelle je n'ai pas pu assister, mais dont j'ai vu le programme où apparaissaient les « nouveaux objets ». Parmi ces nouveaux objets figuraient des objets graphiques : affiche, etc. Donc manifestement cette ouverture est en train de s'officialiser en quelque sorte et je me souviens d'avoir participé à une journée d'étude à l'INHA qui portait sur l'affiche engagée50 et qui réunissait des historiens de l'art. Éric de Chassey, le directeur de l'INHA, a fait à la fin de la journée une petite déclaration sur le fait qu'il était parfaitement naturel de s'intéresser à ces objets-là, en rappelant que Meyer Schapiro ne nous avait pas attendu pour s'intéresser à ces objets. Lebensztejn en est la preuve aussi. Alors sans doute ces historiens de l'art étaient un peu exceptionnels, bon oui sans doute, mais en même temps on peut peut-être les qualifier de grands historiens précisément pour cette raison. Ce mouvement est sans doute plus prononcé aujourd'hui. Un livre sur l'enseigne, sous la direction de deux historiennes de l'art, est paru tout récemment51, preuve d'une histoire de l'art aussi intéressée par la matérialité des objets. À part ça je pense que je suis un peu quand même outsider. (rire)

Catherine Chomarat

D'autres interventions ? Des questions ? Des réflexions aussi pour rebondir sur ce qui a été dit ? Je pense que tu dois les connaître, à Montpellier il y a un labo qui s'est spécialisé dans ce qu'ils appellent les arts minorés, c'est assez joli comme nom pour justement trancher sur les arts mineurs. Ce sont des gens qui ont travaillé sur le design graphique, mais j'ai envie de dire par le biais, c'est-à-dire qu'ils se sont intéressés par exemple à de la presse grand tirage ou à ce genre de chose. Est-ce qu'ils sont tous historiens de formation ? Non. Mais c'est vrai qu'on trouve là manifestement un intérêt pour ces objets. Donc c'est vrai que peut-être que c'est dans les marges aussi de l'histoire de l'art que quelque chose s'est développé autour de ces objets. D'autres questions pour Catherine ? Ou encore une fois des poursuites de réflexion ?

Catherine de Smet

J'aimerais juste peut-être pour conclure préciser que ce livre ne prétend pas du tout faire le point sur quoi que ce soit. C'est une suite discontinue de textes et c'est une manière aussi de faire de l'histoire que d'écrire de cette manière-là.

Catherine Chomarat

Très bien. Je propose qu'on fasse une pause de 5 minutes entre les deux interventions. Car, l'avantage du distanciel, est qu'il est peut-être plus facile de se dégourdir les jambes entre deux interventions !

4. Propos de Vivien Philizot

[La présentation de Vivien Philizot la donné lieu à une prise de notes, rédigée par Frédérique Moal.]

Vivien Philizot est docteur en Arts visuels et designer graphique. Il enseigne à l'Université de Strasbourg en Master design et à la Haute école d'art et de design de Genève au sein du master Espaces et communication. Le sujet de son intervention, et de son travail de chercheur, porte sur son rapport au design graphique, à la recherche en design graphique et à la relation qu'entretient le design graphique avec la recherche. L'angle qu'il a choisi est celui d'une stratégie épistémologique et pragmatique. Ainsi, cette note de conférence traitera de son analyse des enjeux, cadres et méthodes de cette activité particulière qu'est la recherche quand il est question de design graphique. Qu'est-ce que la recherche en design graphique ? Selon Vivien Philizot, cette question en apparence simple en dévoile bien d'autres qui sont, pour commencer : qu'entendons-nous par design graphique ? Et, qu'entendons-nous par recherche ? En effet, il lui semble clair que la majeure partie des débats menés autour de cette question provient de la définition même du design graphique et de la recherche. Dès lors, une majeure partie de la réponse naîtrait naturellement de la définition de ces termes.

4.1 Qu'est-ce que le design graphique ?

Ainsi, en premier lieu, pour démêler cet écheveau, le chercheur s'attelle à circonscrire le design graphique. Pour ces objets de design graphique, il pense notamment à un plan de métro, un photomontage dans une revue, un caractère typographique, un timbre-poste, une application numérique et ce dont a parlé Catherine de Smet en première partie, un livre. Maintenant, comment donner de la cohérence à cet ensemble à l'apparence hétérogène ? Pour ce faire, Vivien Philizot propose deux manières. Premièrement, leur donner de la cohérence à travers le regard entrepris depuis une perspective historique qu'est celui de l'histoire du design graphique. Mais, l'objet d'une recherche en design graphique ne serait-il pas celui d'un savoir spécifiquement consacré à son étude ? Ainsi, il nous propose une seconde méthode, qui est celle d'envisager le design graphique comme notre environnement visuel. Il illustre ce propos notamment à travers l'exemple du film Kapitaal52, réalisé par Studio Smack en 2009, qui par un procédé de soustraction, fait état de la prégnance du design graphique dans notre environnement visuel quotidien. Ainsi, le design graphique est partout autour de nous. Néanmoins, ce constat soulève d'autres points de friction. Car, comme le souligne Vivien Philizot, si le design graphique est omniprésent, il n'en demeure pas moins invisible aux yeux du néophyte, du fait de sa méconnaissance, et est souvent réduit à de la publicité ou de la communication. Et, lorsqu'il a traité la question de la traduction du terme design graphique dans son article « Dire et faire le graphisme53 », le chercheur a fait le double constat d'un design graphique qui est, pour commencer, mal assuré quant à son identité et même quant à son nom. En effet, diverses appellations ont dominé l'histoire récente pour nommer cet ensemble diffus et hétérogène de pratiques et d'objets. Il cite notamment : graphisme, design graphique, arts graphiques, communication visuelle. Puis, si son identité est instable et ses propres dénominations multiples, il porte aussi d'autres noms donnés par d'autres disciplines l'ayant étudié. En effet, malgré la jeunesse de l'étude du design graphique comme discipline propre, ses objets, cités précédemment, ont été théorisés depuis de nombreuses années comme des signes, des médias, des textes, des images, par des disciplines installées que sont la sémiologie, la théorie des médias, la culture visuelle, les sciences de l'information et de la communication. Ainsi, ces objets changent de noms en fonction de l'endroit d'où on les regarde et de la discipline d'où l'on se situe. C'est en partant de ce constat que Vivien Philizot a cherché à apporter des traductions du design. En effet, il envisage le terme de traduction comme le passage d'un système à un autre et, en revêtant les lunettes de ces disciplines ainsi qu'en usant d'une autre langue, il décrypte la manière dont elles se sont saisies de ces objets et nous ont traduit une autre réalité du design graphique.

4.2 Traduire le design graphique

Vivien Philizot nous donne à voir trois de ses traductions lors de son intervention. Il commence par regarder le design graphique comme un signe. Le signe est l'objet d'étude de la sémiologie et de la sémiotique. Ce nouveau type de science s'est développé à partir des années 1960 et s'est attelé à étudier la vie des signes au sein de la vie sociale. En effet, le sémiologue et le sémioticien sont ceux qui observent, décryptent et analysent nos objets du quotidien pour rendre compte des effets de sens et des implicites dans la communication. Ainsi, ces sciences se sont intéressées de très près au design graphique et elles ont nourri les praticiens et théoriciens du design graphique en leur offrant une compréhension du monde visuel en mettant en lumière le sens présent, ou plutôt déposé, dans les objets qui nous entourent. Lorsque le signe permet de comprendre la signification des objets, le terme de médias se penche sur la propriété matérielle et technique de ces objets. Ce qui mène Vivien Philizot à sa deuxième traduction, qui consiste à regarder le design graphique comme un média. Les médias ont été théorisés par la philosophie des techniques et des sciences de l'information et de la communication. En les considérant comme des médias/médiums, elles envisagent les objets de design graphique à travers le prisme de leurs propriétés matérielles et techniques et, en se faisant, font état d'un environnement qui nous submerge à travers ces supports dotés de la capacité de s'effacer au profit de ce qu'ils signifient, bien qu'ils contribuent à modeler notre environnement et sont déterminants dans la lecture de notre monde social. Enfin, le glissement qui s'opère entre le sens et le média dans ses deux premières traductions mène Vivien Philizot à sa troisième traduction, qui est celle d'un rapport social médiatisé par des images. Ici, le design graphique est étudié sous le nom d'image par un champ de savoir plus récent qui est celui des études visuelles. Il concentre son regard sur les images entendues comme des expressions de nos rapports sociaux ainsi que comme actrices de nos rapports sociaux. Le chemin parcouru par ces trois traductions prend son départ dans l'objet pour se diriger vers le sujet ou la société.

4.3 Des paradigmes multiples

Chacune de ces trois traductions présentées par le chercheur relève d'une épistémologie spécifique et d'une manière propre à chacune de ces disciplines de lire le monde. Dès lors, chacune de ces traductions est le fruit d'un paradigme. Par cette stratégie d'immersion dans les différents paradigmes bâtissant le design graphique, et en s'attardant sur la description de leurs constructions et de leurs différences, Vivien Philizot nous permet de multiplier les regards sur la discipline et en définitive, de voir le monde différemment et en dehors de toute concurrence entre ces points de vue. En effet, dans la lignée de la théorisation du paradigme de Kuhn, le chercheur se libère de l'idée d'un point de vue extérieur à tout paradigme en ce sens qu'il n'existerait pas de regard qui permettrait d'être omniscient et de nommer le design graphique en dehors de ces paradigmes particuliers. Ainsi, le design graphique, les signes, les médias et les images sont les différents aspects d'un même phénomène. Dès lors, Vivien Philizot les considère comme étant simplement différentes manières de voir le design graphique et se demande par quels moyens composer avec ces différentes constructions lorsque nous nous engageons dans une entreprise de recherche en design graphique.

4.4 La recherche et le design graphique

À ce stade, comme pour le terme « design graphique », il lui paraît nécessaire de revenir sur la définition qu'il emploie du terme « recherche » afin de se soustraire des éventuelles équivoques. Pour commencer, il ne s'inscrit pas dans une perspective « kuhnénique » de la recherche en design qui porterait sur l'habilité du monde ou l'écologie du monde généralisée, car, à son sens, elle penche trop nettement vers le design d'objet et peine à saisir la singularité du design graphique. Il précise également qu'il axe son intervention sur la recherche scientifique, vouée à produire de la connaissance, et non sur la recherche que pratique le designer qui elle, produit le projet de design. En effet, quand le design graphique peut constituer une étape ou un outil dans la recherche scientifique, il n'est a priori pas une science ni une activité de recherche scientifique. Dès lors, pour articuler recherche et design, il aspire à déterminer les moyens rendant possible la recherche en design graphique, mais aussi ce que sont les savoirs que la recherche vise à constituer. Pour répondre à ces questions, Vivien Philizot s'appuie sur la théorie de l'enquête54 de John Dewey. En usant du point de vue de l'auteur, qui est celui d'un point de départ de la recherche comme étant une situation indéterminée marquée par le doute et l'incertitude, il procède à un déplacement de la question. Celle-ci n'est plus : qu'est-ce que nous cherchons ? Mais plutôt : de quelle situation indéterminée cherchons-nous à nous extraire ?

4.5 Vers le média graphique

L'indétermination qui motive le travail de recherche de Vivien Philizot réside dans le caractère complexe et bruyant de notre environnement visuel, dont il a fait état plus tôt à travers son travail de traduction. Cette méthode épistémologique dont il use dévoile par l'étude et la critique des ouvertures et des points sensibles. C'est ainsi qu'il note que, malgré la différence de ces trois paradigmes, quelque chose se conserve et passe d'une théorie à une autre. En effet, le design graphique, qu'il soit design graphique, signe, média ou image, n'a à première vue rien de social ; or, ces objets sont indispensables au maintien et au fonctionnement de notre société. Michel Serres a nommé ce type d'objet des quasi-objets, entendus comme ce qui circule dans un collectif et participe à le construire. Ils ne sont pas nécessairement définis et demeurent ouverts et transformables, tout en restant identifiés ou identifiables. Ils font circuler plus qu'ils ne circulent eux-mêmes. Ainsi, le design graphique, plus qu'un objet, est un moyen de transmettre et de faire circuler de multiples formes médiatiques qui sont biais d'action. Dès lors, Vivien Philizot nous dit que le dénominateur commun traversant l'ensemble des paradigmes du design graphique est une notion de médiation mêlant étroitement technique, art et social. C'est à cette notion qu'il consacre aujourd'hui sa réflexion sur le design graphique. Une médiation comme passage, comme délégation et dans ce cas précis, de manière visuelle. Ainsi, s'il ne répond pas directement à la question initiale de savoir où en est le design graphique, il nous offre à voir la direction que peut prendre la recherche sur le design graphique, ou plutôt sur les médiations graphiques. C'est sur cette direction que Vivien Philizot conclut son intervention, en nous proposant plusieurs points d'entrée dans cette recherche portant sur les médiations graphiques. Il s'agirait pour lui en premier lieu d'enquêter sur ce que font ces objets et ce qu'ils contribuent à construire plutôt que sur ce qu'ils sont. Puis de se concentrer sur les lieux d'indétermination de la médiation graphique, lorsque celle-ci échoue ou produit de l'imprévu. Enfin, il lui paraît nécessaire d'user d'un point de vue embrassant les deux facettes du design graphique que sont la conception et la réception de ces médias graphiques.

5. Discussion

Catherine Chomarat

Merci, Vivien, pour cette intervention. En ce qui me concerne, il me semble quand même que vous répondez tous les deux d'une certaine façon. Peut-être par une forme d'esquive, mais vous répondez tout de même à la question. Tout à l'heure, Catherine, on a vu que tu disais avoir essayé d'échapper à la question, mais au fond ce que tu as montré à un moment donné de ton intervention, c'est l'évolution de l'histoire ou plutôt de la façon dont on fait de l'histoire. C'est-à-dire la façon dont l'histoire, notamment de l'art, s'est intéressée progressivement à d'autres types d'objets que des objets réputés centraux dans la discipline. Autrement dit, la question de savoir où va le design devient finalement la question de savoir où va l'histoire de l'art (quand elle s'attache au design). En définitive, on a un déplacement vers l'évolution de la discipline qui s'intéresse au design. Et il me semble que dans ton intervention Vivien, il y a peut-être une forme de déplacement comme cela aussi. Certes, tu ne réponds pas à la question de savoir où en est le design graphique. C'est une question que j'ai posée de manière massive et, bien sûr, un peu provocatrice. Mais au fond, à travers ton intervention, ce qu'on saisit c'est « où va » ou « où pourrait aller la recherche » sur le design graphique. Et tu finis sur cette idée qu'au bout du compte, ce qui t'intéresse ou qui serait peut-être susceptible de t'intéresser, ce serait cette recherche sur les médiations graphiques. Donc, là aussi, tu ne réponds pas à la question, mais d'une certaine façon, en l'esquivant, tu la déplaces du côté d'un point de vue disciplinaire : qu'est-ce qui peut ou qu'est-ce qui est le plus à même de prendre en charge le design graphique ? Ainsi, au fond vous ne répondez pas sur l'objet, ni toi Vivien ni toi Catherine, mais vous répondez sur la discipline qui vous anime ou sur le champ disciplinaire qui vous occupe. Je trouve que c'est amusant dans le déplacement. Je ne sais pas comment vous recevez cette remarque.

Vivien Philizot

Oui en effet. C'est évidemment plus d'un point de vue depuis une discipline particulière que nous avons peut-être essayé chacun de notre côté de nous exprimer aujourd'hui. Sachant que la discipline dans laquelle je me trouve moi est assez diffuse. Enfin comme je le disais, il n'y a pas de science du design graphique qui est fermement établie. Donc c'est aussi ce qui motivait ma recherche sur différents points de vue, différents paradigmes qui ont un peu tourné autour de ces objets depuis quelques dizaines d'années, sans forcément les nommer comme on les nomme aujourd'hui entre nous. Voilà ce que je peux en dire.

Catherine de Smet

J'avais envie de prolonger ce que disait Vivien aussi. Puisque notre inscription universitaire ne facilite pas non plus cette perception disciplinaire sans doute. Alors que je pense que dans le champ académique il y a des cas où la discipline est bien établie et où les repères sont clairs et partagés, là où nous sommes — et je pense nous tous ici d'ailleurs— c'est plus compliqué (rire) de savoir et de se situer.

Catherine Chomarat

J'ai une question pour Catherine. Ton dernier livre donc porte sur Le Corbusier, et j'ai envie de dire : et le suivant alors ? Puisqu'on a évoqué cette question de la republication de ton ouvrage sur le design graphique et évoqué cette parution très récente il y a un an sur Le Corbusier. On a vu avec Vivien à quoi il s'intéressait actuellement, donc : qu'est-ce qui fait le cœur de tes préoccupations en ce moment ?

Catherine de Smet

Alors techniquement le dernier n'est pas Le Corbusier penseur du musée55. Il y en a eu un autre après chez B42. C'est un livre fait avec les photographies de façades de marchands de couleurs réalisées par Gérard Ifert56. Et c'est un de mes autres sujets de recherche en ce moment puisque je travaille sur les archives de Gérard Ifert qui était donc un cas intéressant puisque c'est quelqu'un qui avait une formation de graphiste, mais dont la carrière a évolué vers le design et la scénographie d'exposition. C'était quelqu'un qui a eu une éducation de graphiste à Bâle dans le giron suisse et qui finalement a choisi la France. Il a donc une position intéressante entre la Suisse et la France et sans doute aussi entre deux époques du design. C'est quelqu'un qui est arrivé à Paris dans les années 1940 et qui est décédé l'année dernière et son travail est très peu connu parce que justement c'est un designer qui signait peu de son nom et qui ne cherchait pas à se faire valoir en tant que créateur. De ce fait, il a eu une carrière peu visible même s'il était repéré par ses pairs dans une petite communauté, mais c'est quelqu'un qui avait le souci du collectif et une pratique collective du design qui me semble aujourd'hui intéressante à analyser. Voilà pour répondre à ta question. Il se trouve que peu après son arrivée à Paris dans les années 1950, il avait repéré ces façades de marchands de couleurs parisiens et ça lui a évoqué l'art concret suisse, donc le travail de ses collègues restés en Suisse. Ainsi, comme il estimait qu'il était mauvais peintre, il s'est dit que sa contribution à l'art concret suisse depuis Paris allait être de photographier ces façades anonymes. Donc il y a ces questions de l'auteur et de l'anonyme qui reviennent. On a fait un livre à partir de cette série de diapositives qui a une valeur aussi documentaire. En effet, ces façades étaient des objets assez étonnants et ils ont aujourd'hui complètement disparu. Cette série est une des parties de ce que l'on pouvait trouver dans ces archives et l'on prépare maintenant un livre chez B42 qui exploitera de manière un peu plus large le matériel de ces archives ainsi que de nombreux entretiens que j'ai pu faire avec lui avant sa disparition.

Catherine Chomarat

Bien. Y a-t-il d'autres demandes de prise de parole, des questions ou des remarques ? Manifestement non. Du côté de nos deux invités, y a-t-il quelque chose à ajouter ? Un petit mot de la fin ?

Catherine de Smet

Moi, j'aimerais vous remercier de cette invitation ainsi que des questions qui nous ont été adressées et qui étaient très intéressantes.

Vivien Philizot

Oui merci beaucoup.

Catherine de Smet

C'était un moment agréable et stimulant.

Vivien Philizot

Je remercie aussi tout le monde et notamment Catherine. Enfin Catherine et Catherine, mais merci Catherine Chomarat pour cette invitation effectivement très stimulante.

Catherine Chomarat

Très bien. Eh bien, écoutez, je crois qu'on arrive au terme de notre rencontre. Merci à nos deux invités et merci à tous ceux qui, en France ou au Canada et peut-être dans d'autres pays, je ne sais pas, ont pris le temps de venir écouter et participer à cette rencontre. Rendez-vous la semaine prochaine, même heure, avec cette fois-ci un tout autre programme. Merci à tous et à très bientôt peut-être. Bonne soirée.

Crédits et légendes
Figure1. Synthèse graphique 1 © Lucy Doherty

Figure 2. Vue des couvertures des deux premières éditions du livre Pour une critique du design graphique © Catherine de Smet

Figure 3. Couverture de l'édition 2020 du livre Pour une critique du design graphique © Catherine de Smet

Figure 4. Vue en détail de la reliure à la colle froide des deux premières éditions du livre Pour une critique du design graphique © Catherine de Smet


  1. De Smet, Catherine, Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, Paris, Éditions B42, 2020. 

  2. De Smet, Catherine, Le Corbusier penseur du musée, Paris, Flammarion, 2019. 

  3. Kuhn, Thomas S., La Structure des révolutions scientifiques [/The Structure of Scientific Revolutions, 1962/], Paris, Flammarion, Champs, traduit de l'anglais par Laure Meyer, 1972. 

  4. De Smet, Catherine, Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  5. Mallarmé, Stéphane, Un coup de dés jamais n'abolira le hasard, [1897], Paris, Change errant/d'atelier, 1980. 

  6. Lebensztejn, Jean-Claude, Zigzag, Paris, Flammarion, La Philosophie en effet, 1981. 

  7. Ibid

  8. De Smet, Catherine, « Pussy Galore et Bouddha du futur », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  9. Ibid. 

  10. Musée national d'art moderne/Centre de création industrielle (France) et Centre Georges Pompidou, éd., Elles@centrepompidou : artistes femmes dans la collection du Musée national d'art moderne, Centre de création industrielle, Paris, Centre Pompidou, 2009. 

  11. Cook, Siân, McQuiston, Liz et Triggs, Teal, « Pussy Galore », Berlin, Fontshop International, 1994. 

  12. De Smet, Catherine, « La grille de l'histoire », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  13. De Smet, Catherine, « Jean Widmer et le logo du Centre Pompidou », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  14. De Smet, Catherine, « New Extreme Violet. Hommage à une couleur potentielle », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  15. Sueda, John (dir.), All possible Futures, San Francisco, Londres, Somarts Cultural Center et Bedford Press, 2014. 

  16. De Smet, Catherine, « Graphisme d'inutilité ludique », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  17. De Smet, Catherine, « Habiller le Jazz », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  18. De Smet, Catherine, Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  19. En plus des premières éditions de Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, Catherine de Smet a également publié aux éditions B42 : De Smet, Catherine (dir.), Design graphique, les formes de l'histoire, Paris, B42, 2017 et De Smet, Catherine, Fraenkel, Béatrice (dir.), Etudes sur le collectif Grapus, 1970-1990..., Paris, B42, 2016. 

  20. De Smet, Catherine, Le Corbusier : un architecte de ses livres, Baden, Lars Müller Publishers, 2005 et De Smet, Catherine, Vers une architecture du livre. Le Corbusier : édition et mise en pages 1912-1965, Baden, Lars Müller Publishers, 2007. 

  21. De Smet, Catherine et De Bondt, Sarah (dirs.), Graphic Design: History in the Writing (1983-2011), Londres, Occasional Papers, 2012. 

  22. De Smet, Catherine, « Les identités visuelles de Wim Delvoye », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, Paris, B42, 2012. 

  23. Lebensztejn, Jean-Claude, Zigzag, op. cit. 

  24. Ibid. 

  25. Valéry, Paul, « Les deux vertus d'un livre », Arts et Métiers Graphiques, n° 1, 1927. 

  26. Valéry, Paul, Pièces sur l'art, Paris, Gallimard, 1934, p. 25 

  27. Adorno, Theodor W., « Caprices bibliographiques », [1963], Notes sur la littérature, traduit de l'allemand par Sibylle Muller, Paris, Flammarion, 1984. 

  28. Arts et Métiers Graphiques, n°1, 1927, p. III sq., disponible sur https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9692810h/f99.item.zoom, consulté le 18 juin 2021. 

  29. De Smet, Catherine, « La "piste verte". Les Plans de Paris de Le Corbusier », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  30. Le Corbusier, Les plans de Paris : 1956-1922, Paris, Éditions de Minuit, 1956. 

  31. Le Corbusier, La ville radieuse, Marseille, Parenthèses, 2015. 

  32. Le Corbusier, Les plans de Paris : 1956-1922, op. cit

  33. Le Corbusier, Le poème de l'angle droit, Paris, Éditions Tériade, 1955. 

  34. Le Corbusier, Les plans de Paris : 1956-1922, op. cit. 

  35. Le Corbusier, Le poème de l'angle droit, op. cit. 

  36. Vue de la couverture de Le poème de l'angle droit sur le site de La Fondation Le Corbusier. Disponible sur : http://www.fondationlecorbusier.fr/corbuweb/morpheus.aspx?sysId=13&IrisObjectId=6474&sysLanguage=fr-fr&itemPos=19&itemSort=fr-fr_sort_string1%20&itemCount=47&sysParentName=&sysParentId=25, consulté le 18 juin 2021. 

  37. Ibid

  38. Ibid

  39. Le Corbusier, Les plans de Paris : 1956-1922, op. cit. 

  40. Le Corbusier, Le poème de l'angle droit, op. cit. 

  41. Le Corbusier, Les plans de Paris : 1956-1922, op. cit. 

  42. Koolhaas, Rem et Mau, Bruce, S, M, L, XL, New York, Monacelli Press, 1998. 

  43. Koolhaas, Rem, AMOMA, &&&/Simon Brown et Link, John, Content, Cologne, Taschen, 2004. 

  44. Koolhaas, Rem et Mau, Bruce, S, M, L, XL, op. cit. 

  45. Le Corbusier, Les plans de Paris : 1956-1922, op. cit. 

  46. Koolhaas, Rem, AMOMA, &&&/Simon Brown et Link, John, Content, op. cit. 

  47. Maïakovski, Vladimir Vladimirovitch et El Lissitzky, Pour la voix, Berlin, Éditions de l'Etat, 1923. 

  48. De Smet, Catherine, « Pour une histoire de l'art en Zigzag », Pour une critique du design graphique. Dix-huit essais, op. cit. 

  49. Institut National d'Histoire de l'Art 

  50. https://www.inha.fr/fr/agenda/parcourir-par-annee/en-2020/janvier-2020/l-affiche-engagee-aux-etats-unis-annees-1960-1970.html 

  51. Aguilar, Anne-Sophie et Challine, Éléonore (dir.), L'Enseigne, Paris, Citadelle & Mazenod, 2020. 

  52. Studio Smack, Kapitaal, Breda, Stedelijk Museum, 2009. Disponible sur : https://vimeo.com/4745924, consulté le 21 janvier 2021. 

  53. Maudet, Nolwenn et Philizot, Vivien, « Dire et faire le graphisme », Graphisme en France, n^o^ 26, 2020, pp. 39-54. 

  54. Dewey, John, Logique : la théorie de l'enquête [Logic: The theory of inquiry, 1938], Paris, Presse Universitaires de France, traduit de l'anglais par Gérard Deledalle, 1993. 

  55. De Smet, Catherine, Le Corbusier penseur du musée, op. cit. 

  56. Ifert, Gérard et De Smet, Catherine, Paris couleurs - Gérard Ifert, Ektachromes, 1953-1954, Paris, Éditions B42, 2019.