Hélène LATHOUD est doctorante en Arts industriels et design à l’Université de Saint-Etienne (ECLLA – UR Saint-Etienne). Elle a travaillé dans des musées de renom, est enseignante en DSAA Design, et explore les dialogues entre art et industrie, design et savoir-faire. Sa recherche doctorale est soutenue par l’ANRT et la Maison Revol (dispositif Cifre), le Département de la Drôme, et a obtenu une Student Grant (ICC 2024, Canada).
Résumé
Les nouvelles matérialités, conçues par les philosophes Rosi Braidotti ou Manuel de Landa, ouvrent désormais la notion de matière à tous les réseaux et dispositifs. Elles proposent ainsi une nouvelle interprétation des processus de conception et d’appropriation de l’objet. Interroger la néomatérialité à travers les exemples d’art de la table de la manufacture de porcelaine Revol, met en lumière la diversité et l’élargissement de ces nouvelles interprétations.
Abstract
New materialism, as conceived by philosophers Rosi Braidotti and Manuel de Landa, are opening the notion of matter to all networks and systems. They thus offer a new interpretation of the processes involved in the design and appropriation of objects. Questioning new materialism through examples of tableware from the Revol porcelain factory highlights the diversity and expansion of these new interpretations.
Introduction
Prenant en compte les systèmes non visibles d’interactions, tels l’interprétation, la documentation, l’environnement, les relations, comme parties prenantes du medium de création, les nouvelles matérialités conçues par les philosophes Rosi Braidotti (née en 1954) ou Manuel de Landa (né en 1952) sont pensées comme un ensemble de dynamiques complexes1 . Elles alimentent la création artistique de nouvelles possibilités, plus vastes, plus ouvertes et ancrent la démarche vers l’expérimentation. Appliqués à la discipline du design, les contours de la néomatérialité trouvent un terrain d’expression puissant, lié au métier du designer et à sa capacité réflexive. La notion de matière, désormais ouverte à tous les réseaux et dispositifs, nourrit le processus de conception et apporte une nouvelle dimension à l’appropriation de l’objet. Mêlant le travail de la terre, la créativité du design et l’artification culinaire, la Maison Revol, manufacture de porcelaine familiale, implantée au cœur de la Drôme depuis 255 ans, permet de questionner les enjeux et impacts de la néomatérialité dans le design. L’entreprise produit des collections d’arts de la table en porcelaine, à destination des Chefs, cafés, hôtels et restaurants.
Sensible au design et partageant les enjeux de la discipline, la Maison Revol a créé un « Lab-Revol 2 » animé par le designer de la marque. Les collections y sont conçues par le designer interne ou en collaboration avec des designers externes. À travers ce Lab, la Maison Revol expérimente les caractéristiques techniques et créatives du matériau, renouvelle ses produits et structure sa stratégie de création.
Explorer l’évolution des recherches techniques de cette entreprise, s’attarder sur la création quotidienne, la manière dont elle est insufflée, organisée, permettent de comprendre concrètement les transformations induites par la néomatérialité. Le rôle de la Maison Revol parmi les acteurs de la porcelaine est singulier. En tant que non Limougeaud, le fabricant a été obligé de démontrer sa légitimité ; c’est ainsi que la Maison Revol a fait le choix de sortir des codes, de proposer une nouvelle histoire pour la porcelaine et s’est ainsi intéressée à la capacité d’agentivité de la matière. Ce travail est une de ses forces. Ces nouvelles possibilités apportées par la néomatérialité se trouvent aussi dans la capacité de design à ré-enchanter le quotidien de la manufacture. La collection Caractère conçue par Noé Duchaufour-Lawrance en 2018 illustre la résonnance avec le travail réflexif du designer tel que défini par Bruce Archer3 et la richesse de cette matérialité du quotidien. En tant que dynamique complexe la relation de travail qu’instaure la Maison avec les designers a un impact sur la liberté créative du designer, son investissement dans le projet découle de cette relation, de même que sa capacité à sélectionner les éléments de résonnance. La collection Yli4 conçue par Ferréol Babin en 2022 renseigne sur le caractère participatif des collaborations avec la Maison Revol et leur qualité de média de création.
Les évolutions induites par la néomatérialité ne s’arrêtent pas à la sortie de l’usine, elles se poursuivent tout au long de la vie de l’objet. L’action participative de la cuisine que révèlent les produits de la Maison dans leurs usages, les liens qu’ils créent avec les Chefs sont des exemples spécifiques qui interrogent le rôle de l’usager. La communication qui les accompagne, questionne quant à elle, notre propre rapport à la matérialité. Les écrits d’Estelle Zhong5 sur l’art participatif nous amènent à interroger les usagers comme médias de cette matérialité. Dans le cadre de la cuisine, l’objet existe par l’action, or l’action est décidée par l’usager. L’appropriation est donc individuelle et laisse place à de nouvelles orientations. Plus profondément encore, les collections de la Maison Revol se montrent sous un jour différent lorsqu’elles sont présentées seules, ou mises en scène comme support d’un plat préparé par un Chef. Dans ce cas, c’est leur rôle comme vecteur de l’artification culinaire qui est sollicité. Enfin, cette néomatérialité, et surtout la place qui lui est aujourd’hui donnée dans la communication, prend une ampleur importante. La narration est précieuse pour rendre palpable et concrète cette matérialité renouvelée, elle interroge presque la notion de « fétichisme6».
*1.Renouvellement du rapport à la matière, développement de la pratique réflexive du designer et relation collaborative nourrissent la conception industrielle
Interroger la néomatérialité dans le cadre du design industriel permet de questionner la matière elle-même, le métier de designer, et la relation comme dispositif au sein de ces nouvelles matérialités.
*1.1. Si la matière a pu dans le temps être considérée comme passive et inerte, son expressivité prend aujourd’hui toute sa place
En mettant en avant l’expressivité de la matière, son dynamisme et son agentivité, les théories néomatérialistes s’opposent en quelque sorte à la philosophie matérialiste classique, issue d’Aristote, qui perçoit la matière comme essentiellement passive et inerte et la subordonne ainsi à la pensée. Ce raisonnement hylémorphique s’est traditionnellement et durablement ancré dans les civilisations occidentales. Mais aujourd’hui, poussées par les enjeux écologiques, les théories néomatérialistes mettent en avant la force expressive de la matière.
« En admettant l’agentivité de la matière, le néomatérialisme remet en question le récit anthropocentrique qui sous-tend notre vision des humains dans le monde depuis les Lumières. Dans cette vision, l’humanité crée le monde et le monde est un réservoir de ressources pour les entreprises humaines. L’urgence du discours néomatérialiste tient aux impératifs éthiques, écologiques et politiques qui se referment sur nous, conséquences de cette vision du monde7 . »
Certains artistes contemporains comme Éric Dietman, Dora Budor, ou encore Ebony G. Patterson, s’ancrent dans la matière et proposent de réelles expérimentations. Ces créateurs vont instinctivement laisser le médium s’exprimer pour ensuite valoriser ses facultés d’expression, de sensation, ses contraintes et expérimenter la chose. Dans ce contexte artistique, l’inconscient œuvre et envisage la matière comme cause formelle et finale. Son rôle se situe dans la manière qu’il a de nourrir la conception du projet artistique, autant que dans la perception de l’œuvre créé.
Ces réflexions et expérimentations artistiques irriguent les champs plus larges de la création, notamment du design et des manufactures qui comptent parmi les acteurs les plus concernés par la matière. Pour la Maison Revol, qui travaille la Terre ou plutôt les terres, depuis 255 ans, la question de la matière est centrale. Elle est une des seules à avoir conservé son usine de fabrication de pâtes de porcelaine, et peut ainsi facilement expérimenter la matière Terre, chercher de nouvelles potentialités, de nouveaux terrains d’expression. Ces recherches sur le matériau sont historiques pour la manufacture, et ont été remarquées très tôt par les acteurs de la céramique, et notamment par Alexandre Brongniart qui souligne la qualité et la salubrité de ses grès8 .
L’impulsion apportée par le département de Recherche & Développement depuis les années 2010 attestent de la préoccupation de la Maison Revol à connaître, développer, découvrir son matériau et expérimenter les usages de demain. Le laboratoire de R&D de la Maison travaille les spécificités de la terre. Différentes pâtes sont alors produites. Aujourd’hui la manufacture peut proposer de la pâte porcelaine blanche, mais aussi de la pâte compatible à l’induction, de la pâte noire, de la pâte bleue et de la pâte recyclée. Les recherches pour aboutir à ces différents médiums sont longues. L’objectif est créatif : sortir le matériau de ces attentes, le pousser dans ses retranchements, lui permettre d’offrir de nouvelles possibilités9 , pour mieux le connaitre et le montrer sous un jour nouveau, tout en répondant aux contraintes techniques du marché (la pâte doit notamment être lisse, non poreuse, et capable de fortes résistances thermiques et mécaniques). L’accélération de ces recherches créatives illustrent bien le renouveau d’intérêt pour le matériau lui-même. Les multiples possibilités de matières, couleurs, textures et formes qu’offrent ce médium remettent en question l’imaginaire collectif français autour de la porcelaine blanche de Limoges.
Laisser parler la matière provoque des manifestations et rencontres singulières, complexes, signifiantes. Rentrer en résonnances avec elle fait partie du métier de Designer selon Donal Schön10 qui pense la conception comme une conversation réflexive avec les matériaux qui répondent au concepteur.
*1.2. La question de la matérialité quotidienne comme média de création
Considérer que la matérialité englobe tous les dispositifs et les connexions, conscients et inconscients11 , l’élargit à toutes les infrastructures qui composent l’environnement de création. Une nouvelle place lui est donnée dans le quotidien, qu’elle soit liée à l’histoire, à l’environnement de travail, aux gestes, aux machines. Tous ces éléments nourrissent la conception du designer industriel, et influencent ses créations. La néomatérialité trouve un écho fort chez le designer puisque son métier est fondé sur deux principes proches. Le premier pense la matérialité comme cadre intrinsèque de la conduite de projet12 et se nourrit d’elle, le second principe met en évidence la capacité réflexive du designer théorisée par Donald Schön et illustrée plus récemment par Mads Nygaard Folkmann :
« Il faut faire en sorte désormais que la notion de design et la profession de designer ne soient plus associées à une spécialité, mais à un certain état d'esprit d'ingéniosité et d'inventivité, globalement valable, permettant de considérer des "projets" non plus isolément, mais en relation avec les besoins de l'individu et de la communauté. Aucun sujet, quel qu'il soit, ne saurait être soustrait de la complexité de la vie et traité de manière autonome13 . »
Finalement, si l’on considère que le travail sur la matière est central pour la pratique de création de la manufacture, on peut également considérer que les hommes, les gestes, les machines, le matériel, les mécanismes et les mouvements soient une matérialité centrale pour le designer industriel. Cette matérialité permet d’imaginer des projets sensibles, particulièrement incarnés et uniques. La collection Caractère, co-conçue par le designer et architecte d’intérieur français Noé Duchaufour-Lawrance et la Maison Revol, illustre la place de la matérialité du quotidien comme source d’inspiration. Caractère nous dit à quel point cette matérialité du quotidien est active : dans cette collection « Le designer s’est inspiré de la singularité et du quotidien de l’usine drômoise pour donner naissance à ‘‘Caractère14’’ . ». Le designer se saisit du geste circulaire qui rythme la manufacture pour créer la collection. Matérialité du quotidien, ce geste routinier pratiqué par les ouvriers au tournasage, au finissage, au brossage, repris par les machines à l’émaillage constitue le principe de la démarche créatrice du designer. Autour de cette structure se sont construits le juste équilibre entre les outils industriels et le travail artisanal (exprimé par la régularité du bord extérieur et l’irrégularités du bord intérieur), les spécificités techniques et savoir-faire de la Maison (la pâte noire aux bords non émaillés, la capacité à développer ses propres émaux), le tout dans un objet élégant et atemporel (pied légèrement surélevé). Prendre appui sur cette matérialité est une force du design qui permet de révéler la singularité des savoir-faire, de proposer des projets sur mesure, alignés avec la mission du design et les caractéristiques des différentes industries. En somme, à travers ces nouveaux contours de la matérialité, le faire dépasse largement l’exécution et devient une action réciproque.
La matière, les machines et gestes du quotidien viennent concrètement nourrir les nouveaux contours de la matérialité, mais celle-ci peut également être appliquée au domaine de l’impalpable, de l’imperceptible. Estelle Zhong15 définit la matérialité comme « un ensemble d’informations qui relèvent du non visible ». Dans cette lignée, le vécu de chacun des acteurs, son histoire, sa documentation, son expérimentation viennent aussi intégrer la matérialité du projet ; l’immatériel devient alors matériel et nourrit, oriente, la conception du projet artistique du designer.
*1.3. Le vécu des acteurs comme matérialité du projet, la collaboration comme médium de création
La prise en compte de l’agentivité de la matière, de la force active de la matérialité du quotidien, ont des impacts concrets sur la création, ils décentrent la place de la décision dans le projet pour laisser plus de place à l’inattendu. Cette réflexion s’approfondit si l’on s’attarde à la part invisible de la matérialité. Les dispositifs et mécanismes relationnels qui se mettent en place au sein du projet, le vécu individuel de chacun des acteurs, nourrissent et orientent la création. Si l’on considère que ce qui ne peut être vu, n’est pour autant pas inexistant, on peut aisément imaginer l’impact puissant de cette immatérialité dans la création.
Cette hypothèse nous invite à considérer le designer lui-même, comme partie prenante de cette matérialité. La diversité des collections au sein de la Maison Revol confirme la singularité expressive de chaque designer. Par son histoire, sa démarche créative, son projet, ses intuitions, le designer caractérise la matérialité dans laquelle il va puiser son inspiration. Les collections conçues par Noé Duchaufour-Lawrance, Ferréol Babin, Lucas Franck, Inga Sempé ou par le designer de la Maison Revol, sont diverses alors qu’elles sont inspirées du même médium et de la même infrastructure. Avoir conscience de ces singularités pour les laisser s’exprimer est un enjeu pour construire un climat de collaboration propice à la capacité créative de chacun. Analyser la néomatérialité sous cet angle revient à prendre en compte la relation designer-fabricant comme média de la conception du projet. Cette relation vertueuse est inhérente à la posture de la Maison Revol, qui assume faire des choix sensibles, basés sur le talent des designers autant que sur leur personnalité : « J’aime le côté intuitif du design, je revendique le choix de travailler avec des personnalités que j’apprécie16 . ». Le capital humain est assumé dans le choix des designers, avec pour objectif une collaboration sincère et réussie. Les attentes de cette personnalité sont également liées à la capacité du designer à s’investir dans le projet, à s’immerger dans l’univers de la manufacture, à être en réflexivité avec la matérialité de la manufacture. Celle-ci a également une matérialité propre, liée à son histoire et son vécu. Implantée depuis 255 ans sur un territoire de potiers, l’ensemble des périodes qu’elle a traversé, des produits qu’elle a développés font partie de son vécu. Ces projets nécessitent de s’investir pleinement pour ouvrir toutes les possibilités, chercher ensemble les ouvertures les plus adéquates et imaginer les futurs possibles. Pour la collection Yli le designer Ferréol Babin exprime à postériori une importante charge de travail, rendue invisible par l’enthousiasme partagé autour de cette collection17 .
On peut citer les contre-exemples des deux collections Bistrot and Co éditée en 2012 pour Anne-Sophie Pic, ou Succession éditée en 2017 à l’initiative de Petite Friture, qui n’ont pas été co-créées par Revol, mais simplement produites par la manufacture. Elles ne rencontrent pas le même succès :
« Dans ces deux cas, les collections ont abouti à un échec. Ces collections n’émanaient pas de de notre savoir-faire, de notre vision. Elles n’ont pas été générées par nous-mêmes, elles n’ont pas été conçues, élaborées avec nos tripes… Ce sont peut-être de très bons produits, mais nous, on ne fonctionne pas comme ça18 . »
La matérialité personnelle du designer est ainsi sollicitée, une collaboration vertueuse est mise en place pour lui permettre d’exprimer sa capacité réflexive, clef d’une création singulière. Cette étude de cas nous permet de traiter de l’intégration de matériaux actifs dans les pratiques du design : l’expressivité de la matière, l’infrastructure du quotidien et la capacité à collaborer forment les contours d’une nouvelle matérialité. Non prédéterminée, elle est le fruit d’interactions, et propose ainsi une place grandissante du processus, sur la représentation.
*2.La matérialité en dehors du process industriel : rôle des usagers, processus d’artification et fétichisme de la matérialité
Ces réflexions nous amènent, dans l’empreinte des « arts de faire », au sens de Michel de Certeau, et dans la continuité des écrits d’Estelle Zhong sur l’art participatif19 , à questionner le caractère collaboratif des arts de la table, et donc la place des usagers en tant que médias de cette matérialité. Comme support des créations des Chefs, les produits de la Maison Revol explorent un nouveau rôle, leur place comme vecteur de l’artification culinaire apporte une application à leur matérialité. Nourrie par les médias, la place de l’image et l’importance du rôle de la narration interrogent notre rapport à celle-ci.
*2.1. Les usagers comme nouvelle matérialité, la question de la cuisine comme art participatif
Dans le projet de design, le passage de la phase conception - production de l’objet industriel, à la période de son intégration dans la vie intime, quotidienne, ou communautaire de l’usager, est un moment charnière nommée l’appropriation. C’est une transition à partir de laquelle l’objet est sujet à de nouveaux possibles. Pour Silverstone20 cette phase d’appropriation désigne tout autant le moment spécifique où un objet franchit le seuil qui sépare la sphère marchande de la sphère domestique que l’ensemble du processus de domestication. Dans le cas que nous étudions, la phase d’appropriation se déroule, en lien avec un univers autre : le champ culinaire. C’est la pratique de la cuisine, qui donne sa place à l’usage. Le rôle et la place de l’objet produit par la Maison Revol est sans cesse réinventé en fonction des interactions qui se jouent21 . La diversité du champ culinaire, la charge symbolique et sociale qu’elle comporte, qu’elle soit pratiquée dans un cadre amateur ou professionnel, multiplie la diversité des interactions sociales qui prennent forme autour de la table, et des produits qui nous concernent.
L’impact de la néomatérialité sur cette phase est aussi conséquente que tout au long du cycle de conception. En affirmant que la matérialité inclut les interactions entre les individus et systèmes, l’analyse des objets liés à la pratique culinaire se trouve sujette à de nouveaux enjeux. La pratique de la cuisine est un dispositif collaboratif qui induit des interactions qui font système : la collaboration devient donc un média immatériel, de la matérialité. Dans le cas des pratiques participatives comme la cuisine l’appropriation correspond « à un travail de l’usager qui l’assure en faisant usage de l’artefact dans un double mouvement d’utilisation et de personnalisation22 », correspondant bien à la mission première de l’appropriation. Selon Estelle Zhong, la cuisine en tant que pratique collective, « permet de faire émerger quelque chose de nouveau23 », de l’ordre d’une opération créative par les participants. Ce sont des « arts de faire au sens de Michel de Certeau24 », qui au-delà de la possibilité d’être pratiquées collectivement, implique une collaboration pour être menées à bien.
Les objets d’art de la table conçus par la Maison Revol sont appréhendés comme des supports. Ils ont pour objectif d’accompagner la créativité des cuisiniers (amateurs ou professionnels), et existent à travers leur action. En ce sens, le produit initial trouve, à travers cette coopération, une nouvelle expression, une nouvelle matérialité. Cette perception permet au créateur de se décharger de son rôle d’acteur principal et de mettre en place des rapports horizontaux avec les participants : à travers cette matérialité le rapport designer-fabricant-usager n’existe plus.
La collection Caractère vit une appropriation différente lorsqu’elle est investie par un usager qui dresse une table conviviale amicale : sa dimension esthétique, son agentivité, son appropriation sont en lien avec l’usager, chef d’orchestre de cette expérience finale. Chez le même usager, cette même collection proposée avec des convives différents, propose une expérience autre. Les moments vécus autour de ces objets relèvent bien de l’art participatif et valident le rôle des usagers dans la matérialité de ces objets. La conception et la fabrication de ces produits correspondent à une première phase de leur vie, ceux-ci trouvent une liberté d’une autre dimension lorsqu’ils sont mis en situation, d’autant que leurs usages fonctionnels participent du faire avec : l’utilisateur adopte l’espace organisé et le bel objet participe activement à cette ré appropriation.
La néomatérialité définit une nouvelle place aux objets sortis du système industriel, ils sont le support de nouveaux dispositifs particulièrement expressifs lors de la dimension collaborative qu’induit la pratique de la cuisine. De nouveaux terrains de recherche apparaissant également lorsque l’on s’attarde sur le processus d’appropriation de ces objets par une communauté professionnelle et de ses conséquences sur le passage à l’art.
*2.2. La néomatérialité comme vecteur d’artification : le cas des arts de la table comme partie prenante de l’artification culinaire
Les créations conçues par les designers trouvent un nouveau sens une fois mises en scène par les Chefs, elles deviennent à leur tour média de l’art culinaire et explorent une autre dimension de leur vie sociale. Ce contexte renouvelle le principe de réciprocité et d’appropriation, mettant en exergue le rôle de la néo-matérialité dans l’artification culinaire.
La pratique de la cuisine porte en elle une dimension socioculturelle et symbolique importante. Elle correspond à une discipline qui se professionnalise, avec un cadre théorique, une pensée, une critique. La cuisine renvoie « à des corpus de savoir et de savoir-faire, à des gestes, à des modes opératoires ; elle a ses règles, ses normes, ses valeurs qui la constituent comme une discipline25 ». Parmi ses canons, le décor de la salle et le dressage de la table, tiennent une place grandissante et participent activement à l’expérience culinaire. Ceux-ci font du repas du Chef, une manifestation artistique dont les convives sont aussi les acteurs. Développant une esthétique visuelle et une harmonie des saveurs, le Chef passe au statut d'Auteur, en signant ses recettes, ses livres, et au statut de Créateur par la réalisation d’un acte artistique éphémère d’exception. Le succès actuel de cette discipline est soutenu par un engouement médiatique fort, dans lequel le rôle de l’image, filmique ou publicitaire est central. Les arts de la table participent du développement de la discipline, en apportant leur part à l’esthétisation des plats, et des mises en scènes culinaires. Cet usage est anticipé lors de la phase de conception, les besoins et contraintes font partie des échanges initiaux. Au sein de la Maison Revol le travail avec les chefs est constant, les besoins et contraintes évalués en amont, les collections testées. Le dialogue entre les métiers est vertueux « Quand on parle des arts de la table, on parle de la rencontre entre deux créations. Celle du designer, qui aura dessiné l’assiette, et celle du chef qui aujourd’hui a cette vraie approche esthétique au-delà de celle gustative26 ». La place du designer se situe dans l’équilibre entre une certaine présence de la collection et une capacité de retenue pour devenir support de la création d’un autre :
« C’était aussi mon vœu – que l’objet soit assez discret, assez sourd pour qu’il ne soit pas intrusif, que le Chef puisse s’en servir comme un support et non pas comme un objet d’art qui prend tout le dessus sur la table…27 »
Tout l’enjeu est de créer une collection qui ait une certaine présence mais qui sache s’effacer sous la composition du Chef. C’est ensuite le marché qui s’approprie ou non cette collection.
À travers son usage par des professionnels, et tous les codes dont relève la pratique, l’objet industriel co-conçu par le designer et la Maison Revol se trouve, investi d’une dimension autre. Les conditions de présentation, d’appréhension sont différentes et placent l’objet à la fois comme support et source d’inspiration de la création d’un tiers, comme acteur participatif d’une nouvelle œuvre totale : l’expérience culinaire. Le cadre de la profession et la force des médias de communication impulsent une place nouvelle au produit. Il devient média d’une création inédite. Le plat, l’assiette, sont choisis pour leur agentivité en tant qu’objet et leur adéquation au plat conçu par le Chef, il participe ainsi de l’expérience globale, une performance unique, confirmant la force de l’objet utilisé à esthétiser l’expérience et à se positionner comme support d’une création inattendue. Finalement créer des arts de la table revient à une participation réciproque à un autre projet, celui du Chef.
*2.3. Rôle croissant des images et de la narration, vers un fétichisme de la matérialité ?
La néomatérialité tend à travers ses nouveaux contours, à valoriser la place de l’autre, de l’inattendu, à développer la relation, la réciprocité. Elle laisse plus de place à la matière, à l’altérité, et en somme, participe à décentrer la place de l’homme dans le monde. Cette démarche sincère est accompagnée d’une narration forte, d’une mise en scène étudiée. Le rôle de la matière, de la main, de la matérialité du quotidien, et du contexte de collaboration sont des éléments centraux pour la conception de nouveaux produits singuliers, riches de sens qui apportent une nouvelle aura au sens de Walter Benjamin. Un supplément d’âme, une agentivité se dégagent de ces objets dans leur phase d’appropriation et dans la relation qu’ils créent avec leurs usagers. Cette phase de conception est appuyée par une communication efficace. Très médiatiques ces nouvelles matérialités sont soutenues par une narration autour du geste, du quotidien, de la quête d’authenticité. Le travail de conception est raconté pour être rendu palpable et correspondre à un canon actuel de communication. La narration est construite, les images sont travaillées.
Le soin apporté aux photographies de Ferréol Babin travaillant la matière, tel un sculpteur avec les outils qu’il a lui-même fabriqués, la qualité esthétique des vidéos de présentation de la collection28 , la dimension narrative du récit retraçant la genèse des collections lors de leurs sorties, témoignent d’une nécessité de rendre concrète cette matérialité auprès des usagers.
Les titres même des collections Caractère, Yli, désignent et rendent visible cette matérialité. Le catalogue annuel des collections donne la part belle à la matière, il explicite le travail de la Maison auprès de ses clients, et a également pour vocation de faire rêver.
Cette communication participe d’une aura pragmatique, méthodiquement construite selon les tendances contemporaines valorisant le retour à l’artisanat. Cette construction narrative tend à valoriser l’objet, le geste, l’authenticité, tout ce qui fait la néomatérialité en somme. Justin McGuirk, curateur en chef au Design Museum et enseignant à la Design Academy Eindhoven parle lui, de fétichisme :
« Nous sommes de plus en plus incités, à travers la publicité et toutes ces images d’“arrière-boutiques“ que l’on voit dans les magazines, qui représentent des hommes en tablier de cuir, ciseaux bois ou autre outil à la main, à fétichiser le fait main29 . »
Ce fétichisme tend quelque part à dénigrer la standardisation industrielle en l’opposant à la notion de chose développée par Heidegger. Or l’exemple de la Maison Revol nous démontre la capacité à allier la mécanisation des procédés avec l’expansion de la matière, la matérialité du quotidien et la capacité de collaboration. Ces éléments sont capables de structurer la conscience, les présupposés moraux et la quête d'authenticité du consommateur sans devenir prisonnier d’une image exacerbée par le marketing. En renforçant l’idée vertueuse d’objets produits à la main, cette exacerbation détourne la réalité des procédés industriels. Elle omet de poser les questionnements plus profonds liés à une consommation plus ajustée comme le souligne Victor Papanek en réclamant un design éthique « adapté aux vrais besoins des hommes30 ».
Conclusion
Les illustrations concrètes abordées au cours de ce travail de recherche entérinent la néomatérialité dans le champ du design comme une ouverture à la création. En prenant le temps de s’attarder sur le médium lui-même, les possibilités de création se multiplient, l’agentivité du médium se densifie, véhiculant des propositions plus profondes et authentiques. Une des singularités fortes de la Maison Revol réside en son usine de fabrication de pâtes. Celle-ci lui permet d’être acteur du matériau Terre, de rester en lien avec lui, de mieux le connaître et de décupler ses capacités. Le travail sur la matière porte et nourri la démarche créative. Ces recherches sont mises en valeur par le travail des designers et leur posture réflexive. Inhérente à leur métier elle l’est aussi à la néomatérialité qui prend en compte tous les dispositifs comme médium de création. La résonnance avec la matérialité du quotidien trouve alors dans la conception industrielle, un terrain d’expression important : l’infrastructure devient médium de création et apporte une force, une singularité à la création. En admettant que les systèmes non visibles intègrent les contours de la néomatérialité, nous autorisons à penser leur impact sur la conception. Chaque acteur, par son vécu, sa documentation, son projet, apporte une matière au projet. La prise de conscience de celle-ci influe sur la relation de collaboration et la liberté créatrice qui en découle. La dimension intuitive du design pensée par la Maison Revol exprime la prise en compte de cette matérialité et le sens profond donné à la collaboration. Ces nouveaux contours sont vecteurs d’une aura qui permet de se différencier d’une production purement mécanique :
« L’art n’est pas seulement une géométrie fantastique, ou plutôt une topologie plus complexe, il est lié au poids, à la densité, à la lumière, à la couleur. L’art le plus ascétique, celui qui vise à atteindre, avec des moyens pauvres et purs, les régions les plus désintéressées de la pensée et du sentiment, n’est pas seulement porté par la matière à laquelle il fait vœu d’échapper, mais nourri d’elle31 . »
La cuisine, en tant que pratique collective, conduit les arts de la table à tenir un rôle et une place différente en fonction de ce qui se passe autour de la table. Cette pratique, éphémère, relève de l’expérience et propose une dimension à chaque fois renouvelée par l’appropriation des usagers. Ceux-ci deviennent média du faire et proposent une nouvelle vie, indépendante du circuit industriel, et ouvrant de nouvelles libertés. Une dimension inédite s’opère dans le cadre particulier de l’art culinaire, où l’objet design se présente comme support d’une nouvelle création, celle du Chef. Ce contexte apporte un rôle, une place autre à la création et confirme, dans un contexte d’esthétisation toujours plus marquée de la nourriture, la présence des collections produites par la Maison Revol. Ce passage à l’art des objets du quotidien est accompagné, soutenu par une communication visuelle et narrative riche, précise, structurée. Elle retrace le récit de la conception, exacerbe les différentes facettes de la matière, du geste, du travail qui en découle, valorise l’objet fait main et son caractère unique, alors que les procédés de mécanisation sont porteurs d’une réalité que l’usager est capable de faire sienne.
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Papanek, Victor, Design pour le monde réel [1971], Paris, Mercure de France, 1974.
Schön, Donald, The Reflective Practitioner, How professionals think in action, New-York, Routledge, 1983.
Silverstone, Roger, Television and everyday life, London, Routledge, 1994.
Vial, Stéphane, Court traité du design, [2010], Paris, Presses Universitaires de France, coll. Quadrige, 2021, p. XI.
Zhong, Estelle, « Des formes cachées dans la matière. La bricologie de l’art participatif à la lumière de la pensée de Gilbert Simondon », Techniques & Culture [En ligne], mis en ligne le 24 mars 2016, URL : http://journals.openedition.org/tc/7567, consulté le 10 août 2023.
Crédits et légendes
Figure1. La Manufacture Revol, Saint-Uze © Franck Hamel
Figure 2. Noé Duchaufour-Lawrance et le cercle de la Collection Caractère, Revol Porcelaine © Sanda Vuckovic Pagaimo
Figure 3. Présentation de la Collection Yli, Ferréol Babin, Revol Porcelaine © Studio Saison
Figure 4. Mise en scène de la collection Caractère, Noé Duchaufour-Lawrance, Revol Porcelaine © Sanda Vuckovic Pagaimo
Figure 5. Mise en contexte culinaire de la collection Yli, Ferréol Babin, Revol Porcelaine © Franck Hamel
Figure 6. Mise en contexte culinaire de la Collection Caractère, Noé Duchaufour-Lawrance, Revol Porcelaine © Sanda Vuckovic Pagaimo
Figure 7. Travail de la matière Yli, Ferréol Babin, Revol Porcelaine © Romain Guittet
Figure 8. Scénographie lors de la sortie de la collection Yli, Ferréol Babin, Revol Porcelaine © Studio Saison
Figure 9. Différentes phases de la collection Caractère : conception, fabrication, appropriation de la collection, Revol Porcelaine © Sanda Vuckovic Pagaimo
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Behnaz Farah introduit la pensée de Manuel de Landa : « La matière a la possibilité de s’exprimer et la forme, après reconsidération, résulte de l’action de forces matérielles » dans Behnaz, Farah, « Expressivité matérielle et matériaux actifs », Esse, n°101 Nouveaux Matérialismes-New materialisms, janvier 2021, p.48-55. ↩
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Le Lab Revol est un lieu physique qui centralise toutes les discussions et recherches design de la manufacture. Il a été officiellement créé en 2018. ↩
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Bruce Archer fonde en 1964 le premier département de recherche en design au Royal College of Art de Londres, il défend une approche comportementaliste du processus de design. ↩
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Yli signifie « origine de la matière » en grec ancien. ↩
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Zhong, Estelle, « Des formes cachées dans la matière. La bricologie de l’art participatif à la lumière de la pensée de Gilbert Simondon », Techniques & Culture [En ligne], mis en ligne le 24 mars 2016, URL : http://journals.openedition.org/tc/7567, consulté le 10 août 2023. ↩
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Cette notion de « fétichisme » est empruntée à Justin Mcguirk qui lui-même reprend le concept de Karl Marx : Mcguirk, Justin, « Le fétichisme de l'artisanat : de l'objet à la chose », dans Petiot, Fabien ; Braunstein-Kriegel, Chloé, Crafts anthologie contemporaine pour un artisanat de demain, Paris, Norma, 2019, p 418. ↩
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Bolt, Barbara, Barrett, Estelle, Carnal Knowledge: Towards a «New Materialism» through the Arts, Londres, I.B.Tauris, 2012. ↩
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La Maison Revol reçoit une mention honorable dès l’Exposition nationale de 1801. Les pièces sont « soumises aux mordants, au passage du rouge incandescent à l’eau froide, et de suite au rouge » et réussissent ces tests avec succès : Exposition de 1801, Paris, Rapport du Jury Central sur les produits de l’industrie française, Paris, Imprimerie Royale, 1824 (source CNAM). ↩
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Ces différentes pâtes renvoient à des « formes implicites » telles que définies par Henri Focillon. Différentes en termes d’aspérités, de couleur, de brillance, de toucher : la pâte noire est brute et mate, tandis que la pâte révolution est très lisse et satinée, la pâte bleue est mate, douce, très poétique ; la pâte recyclée est grise brute et brillante. ↩
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Schön, Donald, The Reflective Practitioner, How professionals think in action, New-York, Routledge, 1983. ↩
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DAM, Collectif « 4. Une nouvelle matérialité », Design in translation, [en ligne], URL : https://dit.dampress.org/readers/materialite/une-nouvelle-materialite, consulté le 6/10/2023. ↩
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La discipline est définie historiquement par Bruce Archer (Systematic Method for Designers, London, Council for Industrial Design, 1965) et Christopher Alexander (Notes on the Synthesis of Form, Cambridge, Harvard, 1964). ↩
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Nygaard Folkmann, Mads, Préface « Poser la question du design », dans Vial, Stéphane, Court traité du design, [2010], Paris, Presses Universitaires de France, coll. Quadrige, 2021, p. XI. ↩
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Livret de collection Caractère pour Revol Porcelaine, 2018. ↩
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Zhong, Estelle, « Des formes cachées dans la matière. La bricologie de l’art participatif à la lumière de la pensée de Gilbert Simondon », op. cit. ↩
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Entretien avec la Direction Générale de la Maison Revol, octobre 2022. ↩
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Entretien avec le designer, novembre 2022. ↩
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Entretien avec la Direction Générale de la Maison Revol, op.cit. ↩
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Zhong, Estelle, « Des formes cachées dans la matière. La bricologie de l’art participatif à la lumière de la pensée de Gilbert Simondon », op.cit. ↩
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Silverstone, Roger, Television and everyday life, London, Routledge, 1994, p.123-131. ↩
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Jouët, Josiane, « Nouvelles techniques : des formes de la production sociale », Technologie de l’Information et Société, n°3, 1989, p. 13-34. ↩
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Akrich, Madeleine, « Comment décrire les objets techniques ? », Techniques & Culture [En ligne], mis en ligne le 23 janvier 2006, URL : http://journals.openedition.org/tc/863, consulté le 06/09/23. ↩
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Charpier Ambre, Chomarat-Ruiz Catherine, Fétro Sophie, Guégan Victor, Laudoux Margot, et al.. « 4. Une nouvelle matérialité », Collectif DAM, Matérialité, décembre 2022, URL HAL https://hal.science/hal-03845821v1, consulté le 06/10/23. ↩
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Ibid. ↩
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Csergo, Julia, « L'art culinaire ou l'insaisissable beauté d'un art qui se dérobe. Quelques jalons (XVIIIème-XXIème siècle) », Sociétés & Représentations, vol. 34, no. 2, 2012, p.13-36. ↩
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Nuel, Philippe, interrogé par la Confédération des Arts de la Table. ↩
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Entretien avec le designer, op. cit. ↩
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Les trois vidéos : « Le Jardin », « L’atelier », « La table », sont en ligne et consultables via cet URL : https://mamaisonrevol.revol1768.com/yli-design-ferreol-babin/ ↩
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Mcguirk, Justin, « Le fétichisme de l'artisanat : de l'objet à la chose », op.cit. ↩
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Papanek, Victor, Design pour le monde réel [1971], Paris, Mercure de France, 1974. ↩
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Focillon, Henri, « Les formes dans la matière », Vie des formes [1934], Paris, Presses Universitaires de France, coll. Quadrige, 2013, p. 49-53. ↩