Les logiques d’action du projet de Grande Matériauthèque, un instrument de matérialisation des connaissances
Antoine Tour, Jean-François Bassereau, Nounja Jamil

Antoine Tour est doctorant au sein du groupe de recherche Soft Matters à l’EnsadLab, École des Arts Décoratifs, rattaché au laboratoire SACRe (Sciences, Arts, Création Recherche) de l’Université PSL, en partenariat avec le Campus Mode, Métiers d’Art & Design. Son travail de thèse articule un questionnement sur les enjeux de classement de matériaux à la création d’une matériauthèque dédiée à l’artisanat et au design.

Jean-François Bassereau est professeur à l’École des Mines de Saint-Étienne, et codirecteur de recherche au sein du groupe de recherche Soft Matters à l’EnsadLab, École des Arts Décoratifs. Ses recherches portent notamment sur la classification des matériaux par leurs propriétés sensorielles, et la mise en place d’instrumentations spécifiques aux matériaux dans le cadre de recherches par le design.

Nounja Jamil est directrice projet du Campus Mode, Métiers d'art & Design. Son travail consiste au développement et à la valorisation des formations de design et métiers d’art à l’échelle des académies Paris et Créteil, notamment à travers la mise en place de la Grande Matériauthèque.

Résumé

Cet article explore la nécessité de fonder de nouvelles typologies conceptuelles autour des matériaux pour la conception en design, en prenant en compte leur utilisation et leur relation aux utilisateurs de matériaux, dans le cadre d'un projet de Grande Matériauthèque du Campus Mode, Métiers d’Art & Design. Le projet se concentre sur des utilisateurs plus familiers des mises en forme des matériaux que de leurs propriétés techniques, il s’agira donc de définir ces typologies en tenant compte de la variété des approches et lectures propres aux différents utilisateurs.

Quels liens établir entre design, propriétés des matériaux et procédés de transformation, qui permettent d’appuyer la question de la représentativité des échantillons de matériaux au sein d’une matériauthèque ? En s’appuyant le concept d'objet intermédiaire de conception, cet article se base sur la nécessité de concevoir une nouvelle typologie d’objets intermédiaires que seraient des objets intermédiaires de connaissance, nuanciers et référentiels sensoriels, facilitant un dialogue entre propriétés techniques, sensorielles et connaissances sur les procédés de transformation et d’assemblage. Cette approche expérimentale vise à identifier les informations utiles à chaque utilisateur, selon le niveau de connaissances, et à structurer l’accès aux informations en fonction de la place du matériau dans le projet. En ce sens, l’article propose de définir un système de classement de matériaux en créant des passerelles entre les classifications traditionnelles issues des sciences et de l’ingénierie des matériaux, et leur utilisation dans le contexte de projets d’artisanat et de design. Cette réflexion s'inscrit dans l’approche systémique, proposée par Michaël Ashby et Kara Johnson, qui valorise les interactions entre matériaux, procédés et usages.

Cette recherche par la pratique questionne enfin le rôle des matériauthèques dans la sélection de matériaux dans les projets de conception. Bien que de nombreuses matériauthèques existent, peu d’études se penchent sur leur utilité et sur le profil de leurs utilisateurs. Ainsi, l’article interroge la manière dont les données de matériaux sont structurées et comment elles répondent aux besoins des utilisateurs, que ce soit au préalable d’un projet, lors de sa phase de conception ou de réalisation. En reconnaissant le rôle clé des échantillons dans la transmission de ces connaissances, sera soulignée la nécessité d'intégrer savoirs et procédés dans un cadre de conception. À travers une analyse sur différents niveaux de complexité, l’article proposera ainsi une réflexion sur la pérennité et la construction de la matériauthèque en tant qu’outil opérationnel, au rôle central des matériaux dans le projet de conception, tout en interrogeant leurs systèmes de classement devant répondre aux besoins et attentes pour la création et la conception.

Abstract

This article explores the need to establish new conceptual typologies based on materials for design, taking into account their use and their relationship to material users, as part of a project for the Grande Matériauthèque of the Campus Mode, Métiers d’Art & Design (Fashion, Crafts & Design Campus). The project focuses on users who are more familiar with the shaping of materials than with their technical properties, so it will be a question of defining these typologies taking into account the diversity of approaches adopted by different users.

What links can be established between design, material properties and transformation processes, which make it possible to address the question of the representativeness of material samples within a materials library? Based on the concept of an intermediary design object, this article is based on the need to design a new typology of intermediary objects that would be intermediary objects of knowledge, sensory swatches and reference systems, facilitating a dialogue between technical and sensory properties and knowledge about transformation and assembly processes. This experimental approach aims to identify the information that is useful to each user, according to their level of knowledge, and to structure access to information according to the place of the material in the project. In this sense, the article proposes to define a system for classifying materials by creating bridges between the traditional classifications derived from materials science and engineering, and their use in the context of craft and design projects. This reflection is part of the systemic approach, proposed by Michaël Ashby and Kara Johnson, which emphasizes the interactions between materials, processes and uses.

This research by practice finally questions the role of material libraries in the selection of materials in design projects. Although many material libraries exist, few studies focus on their usefulness and the profile of their users. Thus, the article questions the way in which the data on materials is structured and how it meets the needs of users, whether prior to a project, during its design phase or during its implementation. By recognizing the key role of samples in the transmission of this knowledge, the necessity of integrating knowledge and processes in a design framework will be emphasized. Through an analysis at different levels of complexity, the article will thus propose a reflection on the sustainability and construction of the materials library as an operational tool, on the central role of materials in the design project, while questioning their classification systems that must meet the needs and expectations for creation and design.

Introduction

En tant que designers, nous pensons l’intérêt de fonder de nouvelles typologies conceptuelles sur les matériaux à partir de leurs usages, c’est-à-dire à partir des informations que nous fournissent les matériaux et leur mise en forme, in extenso des échantillons de matériaux et de leur documentation pour la conception. La prise en compte, en projet, de l'utilisation de ces derniers relatifs à des mises en forme est un préalable à la compréhension du rôle d'une matériauthèque. Ce raisonnement s’inscrit dans le cadre du projet de Grande Matériauthèque du Campus Mode, Métiers d’Art & Design (MoMADe)1, un projet institutionnel de bibliothèque de matériaux. La réalisation intervient de manière simultanée au travail de la recherche et permet de l’alimenter de problématiques contemporaines. Toutefois, cette recherche entend répondre que partiellement aux enjeux du projet, ceux ayant trait au classement des matériaux. Cette prise en compte tient aux aspects propres des secteurs de l’artisanat, du design et de l’architecture, c’est-à-dire qu’elle tente de structurer un système utile pour la sélection de matériaux dans le cadre de ces métiers.

Le Campus MoMADe est un instrument inscrit dans le cadre d’une action publique en faveur des métiers d’art et du design2. La Grande Matériauthèque (GM) est la concrétisation de cette action, opérée avec le concours des Manufactures Nationales - Mobilier National. Cet instrument de politique publique est le dispositif institutionnel par lequel un réseau d’acteurs territorialisé est constitué pour représenter les intérêts d’un secteur professionnel en lien avec de la formation spécialisée. En opérant à travers la création des Campus d’Excellence des métiers et des qualifications, cette initiative fait la promesse d’une opportunité ─ celle d’une structuration autour de la recherche scientifique et d’une incarnation dans un lieu identifié. La pérennité de cette entreprise ne peut se penser sans les écoles de métiers d’art et de design partenaires situées sur le territoire d’Ile-de-France, principales concernées par le projet de GM. Pour l’heure, sans pour autant constituer une mutualisation des outils de production, celle-ci est pensée comme un futur outil commun, à la fois un observatoire des pratiques et un espace de connaissances.

Le projet se concentre sur les futurs utilisateurs, les publics de ces écoles, plus familiers des mises en forme des matériaux que de leurs propriétés techniques. La difficulté d’un projet, tel que la GM, résulte de la multiplicité des savoir-faire représentés par niveau de compétences. En effet, la plupart des matériauthèques sont spécialisées, affiliées à un corps de métiers et situées au sein d’un studio ou d’une école de design ou d’architecture. Elles s’inscrivent alors dans un registre prescriptif et permettent d’apprendre à naviguer entre les différentes références de matériaux en lien à des fournisseurs. Les rares matériauthèques qui se veulent sans spécialités ressemblent davantage à des cabinets de curiosité, dans lesquels il est plus difficile de naviguer dans le cadre d’un projet. Le fait que ces dernières ne soient évaluables qu’en fonction de leur fond (volume d’échantillons), non de leur classement, et que leur utilité ne soit évaluée qu’à travers les personnes qui les structurent et non des personnes qui les utilisent, fait que l'évaluation de leur utilité propre, bien que communément admise, fait souvent défaut.

Il y aurait sans doute plusieurs approches permettant de décrire le niveau de complexité opérant dans une matériauthèque. Que se passe-t-il dans une matériauthèque qui en rende l’expérience singulière ? La question peut en effet être observée à différents niveaux. Le rôle central de l’échantillon, de ce qu’il est, constitue probablement l’un des aspects les plus identifiés. Quelle information un designer, un architecte ou un artisan peut être susceptible de trouver qui puisse motiver la lecture des échantillons ? Dès lors, comment se structure une fiche, et quelle forme prend l’échantillon ? Une seconde échelle serait sans doute de prendre le projet de matériauthèque en tant qu’organisation, à la fois à travers la constitution d’un réseau comme précédemment énoncé, à la fois comme un ensemble technique réfléchit de la question du mobilier à celle de la programmation des espaces du lieu. Une matériauthèque est donc un espace complexe, notamment par son rôle d’instrument de politique publique possédant des logiques d’actions qui lui sont propres. Il est également possible, et c’est l’étude que nous proposons, de penser la matériauthèque comme un dispositif permettant de classer des informations relatives à des utilisateurs et des matériaux en essayant de réfléchir à travers quels artefacts, et leurs spécificités, transmettre des connaissances et aider à la sélection. Les informations singulières contenues dans les fiches constituent un ensemble qu’il s’agit d’ordonner en un classement de données interopérables. Ce classement suppose d’établir un lien entre le design en tant qu’activité de conception, les propriétés des matériaux et leurs procédés de transformation, en posant la question de la représentativité des échantillons de matériaux au sein de la matériauthèque. En ce sens, les typologies de matériaux doivent être corrélées à la pratique des usagers.

Afin d’identifier dans un premier temps le rôle des matériauthèques, nous nous appuierons sur deux études (sondage, rapport d’activité) d’identifier des indicateurs qui permettent de proposer de qualifier le caractère utile d’une matériauthèque dans son fonctionnement. Dans un second temps, pour identifier les critères d’usage des échantillons de matériau, nous questionnerons leurs rôles à travers le concept l'objet intermédiaire (OI). Ce concept est utile afin d’éclairer notre perception de ces artefacts qui constituent des outils privilégiés pour les artisans, designers et architectes, à travers différentes modalités de recherche. En effet, les échantillons, en tant qu’OI jouent un rôle dans la conception ─ traduction, médiation et représentation. Toutefois il semble d’intérêt de conceptualiser un type d’objets intermédiaires que seraient des objets intermédiaires de connaissance (OIC)3. Car si les échantillons formalisent des connaissances à travers des hypothèses de travail (experiential knowledge)4, c’est en opérant de la distinction au sein d’un groupe d’échantillons qu’une sélection est rendue possible. Ces groupes forment alors des nuanciers et des référentiels sensoriels, dont l’objectif est de faciliter cette formalisation de connaissances en projet autour d’un ou de plusieurs échantillons matériaux, de permettre un dialogue entre propriétés techniques, sensorielles et connaissances sur les procédés de transformation et d’assemblage, accompagnant ainsi le processus de décision et de réflexion.

L’objectif de cet article, à travers l’usage des OIC, vise à structurer l’accès aux informations en fonction de la place du matériau dans le projet, c’est-à-dire à rendre celles-ci interopérables entre différentes approches de conception. Pour soutenir ce propos, l’hypothèse défendue est qu’un système de classement de matériaux est possible entre des échelles de mesure issues des sciences et de l’ingénierie des matériaux et des expériences sensorielles qualifiées dans les milieux de l’artisanat et du design, un transferable knowledge5 proposé par Mark Miodownik, Zoé Laughlin et Sarah Wilkes. Cette réflexion s'inscrit dans l’approche systémique, proposée par Michaël Ashby et Kara Johnson, qui valorise les interactions entre matériaux, procédés et usages6. Un dispositif de sélection de matériaux, ou référentiel, et ses extensions que sont les nuanciers, seraient alors des variations d’un mode de représentation censé aider à naviguer entre une diversité de matériaux. À travers ce dispositif, il s’agit d’évaluer le degré de connaissances contenues au sein de la matériauthèque et de ses échantillons, qui consolide les connaissances supposées maîtrisées rendues matérielles en opérant de la différence entre les matériaux.

1. De l'utilité des matériauthèques

Les matériauthèques sont des collections d'échantillons physiques de matériaux, axées sur la conception, qui servent à inspirer ou à concrétiser les idées des designers.
Leur mission est avant tout de réintroduire les matériaux en tant qu'entités physiques (échantillons) au service de la pratique et de la recherche en design, ce qui faisait défaut depuis le début du XXe siècle.
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La définition repose sur un néologisme entre bibliothèque et matériau, elle n’est toutefois pas explicitée en France comme dans la littérature anglo-saxonne ou italienne. Une bibliothèque de matériaux suppose un modèle architecturé d’informations de matériaux entre des fournisseurs et des prescripteurs, et la matériauthèque tient le rôle d’intermédiaire afin de faciliter l’accès aux échantillons et aux informations de matériaux. Sur quels critères fonder l’utilité des matériauthèques ? Étudier l'organisation d’une matériauthèque suppose d’en décrire les activités et d’identifier un modèle structurant.

Les activités d’une matériauthèque peuvent être tout d’abord circonscrites à des aspects matériels. À travers un sondage adressé à une quinzaine de matériauthèques, Fazil Akın et Owain Pedgley cherchent à en comprendre le rôle à travers un ensemble de données (mission, profil des visiteurs, contenu du fond, nature des informations), ils évaluent également le type de classement (par famille, par propriétés et relation de propriétés) et y analysent l’intérêt de pour pouvoir comparer des matériaux, de l’importance d’une expérience des matériaux (material experience)8, et de leur usage à travers les échantillons comme support de présentation9. Il a l’avantage de proposer une définition reposant sur des indicateurs clairs. Les limites de ce sondage dépendent du choix d’une analyse basée uniquement sur la déclaration des enquêtés. Les matériauthèques sondées sont majoritairement des modèles pédagogiques, le plus souvent implantés dans des écoles, et reflètent un besoin d’accompagnement sur les matériaux pour les métiers de la conception. En effet, si les matériauthèques ont un rôle pédagogique, où les informations relatives aux matériaux renseignées dans un objectif de prescription et de mise en forme, rappelons toutefois que la classification de cet espace n’a rien de comparable à celle des bibliothèques, dont le classement dépend essentiellement sur la place de la lecture comme système visuel. A contrario celui de la matériauthèque repose sur un système de sélection basé sur des propriétés comparables, la relation entre propriétés est donc importante. Une approche sensorielle dont l’objectif est d’arriver à transmettre des connaissances spécifiques à partir d’une expérience du matériau. L’interaction sensorielle permet alors d’augmenter une sélection qui serait strictement visuelle ou calculée.

Sous la forme d’un rapport d’activités, l’ouvrage de Claudia De Giorgi, Beatrice Lerma et Doriana Dal Palu met en exergue dix ans d’expériences et d’efforts de structuration de MatTO, la matériauthèque de l’École Polytechnique de Turin créée en 2001. Les autrices établissent le rôle de la matériauthèque, les typologies d’interaction avec les publics et les industriels, les besoins et attentes. Elles prospectent l’apparition de nouveaux types de designer qui s'intéressent de près aux matériaux, ainsi que de nouvelles catégories en lien avec d’autres disciplines scientifiques (biologie, chimie, mécatronique, etc.) pour classifier les matériaux à partir des usages. Le rôle de la matériauthèque décrit ici est avant tout celui d’un opérateur qui croise de multiples disciplines des sciences et technologies appliquées aux matériaux (ingénierie matériaux et environnement, expertise technique, certifications et gestion industrielle) et des humanités appliquées aux cultures matérielles et à l’ergonomie cognitive (histoire, archéologie, psychologie, expertise sensorielle). Cette approche nous permet d’identifier des centres d’intérêts spécifiques à la pratique en design, et aide à comprendre quelles informations sont nécessaires à la sélection ─ le sourçage des matières, les aspects techniques et environnementaux pour la prescription, ainsi que les mises en formes du matériau, les techniques d’assemblage et finitions pour la fabrication. Les autrices informent également du rôle d’expert que peuvent jouer les matériauthèques auprès des industriels, en fournissant des retours d’expérience, ainsi que des informations sur les aspects sensoriels des matériaux au regard des autres échantillons qu’elles possèdent.

Fazil Akın et Owain Pedgley ont mené une enquête sur une quinzaine de matériauthèques dans le monde en proposant des indicateurs autour du mode de fonctionnement de celles-ci. À la suite de cette revue bibliographique, il est apparu que les matériauthèques manquaient d’un système de classement adapté. L'ouvrage de Claudia De Giorgi, Beatrice Lerma et Doriana Dal Palu fait état des centres d’intérêt des designers vis-à-vis des matériaux dans le cadre d’une matériauthèque. Ces deux recherches proposent des indicateurs du bon fonctionnement des matériauthèques en tant qu’organisation. Ils permettent d’évaluer le rôle et les objectifs d’une matériauthèque vis-à-vis de son réseau, ses centres d’intérêts, ainsi que d’observer sa structuration et son fonctionnement. Les deux études soulignent l’importance de réfléchir à la place des critères sensoriels des matériaux par rapport aux utilisateurs. Ces critères renvoient à des qualités qui permettent d’affiner une sélection à partir d’une terminologie associant des aspects structurels et de surface, potentiellement mesurables. Cet intérêt autour des critères sensoriels sera discuté relativement à la question de la sélection. Le caractère utile des matériauthèques repose donc sur une capacité à proposer un système de classement basé sur un couple sensoriel, la vue et le toucher, dont dépendent un ensemble de propriétés et leurs relations. C’est pourquoi nous suggérons que ce caractère utile est fondé non seulement sur des indicateurs objectifs de fonctionnement mais également sur les matériaux et leurs relations aux propriétés, une méthode de classement associée à un indicateur d’ouvrabilité, et sa réplicabilité.

2. De la sélection en question

Nous souhaitons proposer que la capacité d’ouverture10, c’est-à-dire ce que peut offrir dans l’usage une matériauthèque, ne dépend pas nécessairement des indicateurs susmentionnés. À ce titre, les travaux de Zoé Laughlin méritent d’être mentionnés car ils proposent un retour d’expérience des visiteurs de l’Institute of Making (Londres) à travers la manipulation des échantillons. Cette recherche se concentre sur des expérimentations sensorielles pensées à partir des propriétés. Elle soumet l’hypothèse que les sciences des matériaux puissent être représentées par les matériaux. Pour cela, elle propose de prendre appui sur les méthodes de sélection issue des sciences des matériaux. Michaël Ashby propose un système de représentation graphique des matériaux sous forme de diagramme de propriétés permettant de sélectionner à partir des propriétés en réduisant les performances recherchées en contraintes. L’originalité de la proposition de Laughlin réside dans la représentation de propriétés matérialisées à travers des échantillons et des nuanciers, faisant la passerelle entre propriétés physiques et qualités sensorielles11. Pour cela, Zoé Laughlin propose une approche comparative par échantillon de matériaux de même volume, cette méthode est formellement intéressante car elle permet à la fois d’interagir en appréhendant empiriquement la masse et la dégradation dans le temps. Elle constate toutefois que cette appréhension reste limitée à la masse, et qu’il faudrait inverser le rapport entre masse et volume pour permettre considérer la densité12. Dans une seconde série d’expérimentations, sa thèse propose d’utiliser des nuanciers d’objets-matériaux (cuillères, diapasons, cloches), afin de tester la reconnaissance sensorielle des usagers : sonore, gustative ainsi que la relation spécifique entre la vue et le toucher comme d’un moyen privilégié de reconnaissance des propriétés13. Les nuanciers d’échantillons proposent ainsi un référentiel possible afin de classer les matériaux à l’instar du diagramme de Ashby. Ces recherches concluent vers une prédiction possible des aspects sensoriels à partir des propriétés physiques14. À la suite de l’expérience de l’Institute of Making, des travaux de Sarah Wilkes, Zoé Laughlin et Mark Miodownik introduit ici, nous pensons qu’il est possible d’utiliser la matériauthèque comme une organisation structurée à partir des propriétés permettant de classer, de tester mais également de faire échanger différentes approches de langages métier et de pratiques de projet.

Nous souhaitons maintenant revenir sur la définition de l’objet intermédiaire de conception (OI)15 correspondante à l’usage que nous faisons des échantillons et des nuanciers16. L’OI est un concept qui permet d’étudier les objets dans ce qu’il « contribue au cadrage de l’action »17. Dans certains cas l’OI est un objet dit fermé au sens où son potentiel d’interprétation est limité (prototype, échantillon, nuancier) servant à la validation d’une étape, et ne supportant plus de modifications18. Ils sont dits ouverts lorsque ces derniers sont susceptibles d’être modifiés. Dans la majorité des cas, un nuancier qui sert à pouvoir comparer est donc un système ne supportant plus de modifications. Pourtant dès lors que ces nuanciers sont utilisés comme document source, ils peuvent être enrichis par de nouvelles connaissances à partir d’expérimentations, par la venue de nouveaux échantillons pris en compte. Dans ce cas, le nuancier est donc un objet intermédiaire ouvert, il propose des connaissances et ne se limite plus seulement à la question d’un partage pour la conception. L’objectif du nuancier est donc la formalisation d’hypothèses vers un ensemble d’avancées de connaissances au sein d’un domaine pratique. Les OIC sont un moyen d’amorcer une activité scientifique, ils définissent une forme de résultats de recherche et cristallisent un effort de production de connaissances. Ces objets respectent les mêmes critères que l’objet intermédiaire : ils peuvent être de la traduction, d’une discipline vers une autre, de la médiation, dans la transformation d’un savoir-faire, ou encore prédictif, orienté vers de la conception.

Rappelons par ailleurs qu’un échantillon de matériau est toujours représentatif d’un matériau correspondant à une suite de mises en forme, il serait donc plus juste d’aborder la question des échantillons à partir des procédés plutôt que de matériaux. Si une qualité sensorielle peut être approchée par des propriétés physiques, les échantillons servent de sélecteur à partir de variables sensorielles. Le nuancier, en tant que groupe d’échantillons de même nature, observe la variation d’une qualité sensorielle sur un matériau donné, ou plus précisément d’un procédé. C’est son rôle en tant qu’objet intermédiaire de conception. C'est donc une typologie d’objet intermédiaire de conception qui permet la sélection entre plusieurs échantillons de même valeur, il opère comme un référentiel, c’est-à-dire un système de référence. Un référentiel se base sur un ensemble de hiérarchies, ici le nuancier permet avant tout de comparer des matériaux à partir de leurs qualités. Les propriétés peuvent être également représentées sous la forme de référentiel comme dans le cas du diagramme de Michael Ashby. Le nuancier est donc un type de référentiel orienté pour la sélection sensorielle fonctionnant à partir d’un seul matériau, dont il est possible de déduire les propriétés impliquées. Respectivement, dans le cas du diagramme de Ashby, on réduit les performances attendues représentées sous forme d’un couple de propriétés mesurables en contraintes, il devient alors possible de déduire quel matériau répond aux performances exigées. Dans le cas du nuancier, verrouille un matériau et son procédé et on voit quel aspect sensoriel répond aux exigences de création. Un référentiel permet donc de comparer des matériaux jusque-là non comparables entre eux soit en se basant sur des propriétés données, soit en se basant sur les critères sensoriels. Nous pensons, à l’instar de l’objet intermédiaire qu’est le nuancier, qu’il est envisageable de structurer des référentiels physiques d’échantillons sur la base de données théoriques.

Prenons ici l’exemple de la thèse d’Anna Saint Pierre, du groupe de recherche Soft Matters affilié à l’École des Arts Décoratifs ─ PSL Université, afin de rendre tangible le rôle du nancier en tant qu’OIC. La démarche de cette recherche appliquée est identique à d’autres cas de recherche autour de la question des savoir-faire, comme les thèses d’Antonin Mongin et de Joséphine Schmitt présentes au sein du même groupe de recherche19. Durant sa thèse de doctorat, Anna Saint Pierre imprime en sérigraphie des broyats pigmentaires issus des déblais de déconstruction de bâtiments, un travail de valorisation des gisements des sites étudiés par sa pratique textile. Elle appréhende différentes particules de déblais jusqu’à obtenir différents pigments qu’elle broie et qu’elle inventorie (brique, meulière, zinc, ardoise, pierre). Par sa pratique, elle appréhende de nouvelles connaissances autour des matériaux, qui doivent être explicitées pour être consolidées, celles-ci passent ainsi par la construction d’un nuancier autour de l’activité de valorisation des gisements, par la granulométrie et la coloration textile. Ces pigments présentent la manière dont elle ramène l’architecture à la pratique textile. Son travail s’appuie ainsi sur une série d’expérimentation qui vise à obtenir les formulations de pâtes dont la viscosité correspond à celle requise pour l’impression textile. Elle classe et évalue par une approche empirique basée sur son savoir-faire, sans avoir recours à des mesures instrumentales permettant de caractériser ces interactions sensorielles. Elle questionne son savoir-faire par l’introduction de nouveaux types de pigments dans sa pratique, les connaissances se matérialisant à travers des référentiels sensoriels qu’elle aura d’abord construit par tâtonnement20. Ils n’ont pas pour seule vocation d’être des objets intermédiaires pour la conception, ils ramènent à la pratique textile, un ensemble de connaissances supplémentaires issus de matériaux non normalisés. Dans cet objectif, les nuanciers constituent une base à partir de laquelle il est possible de faire de l’instrumentation. Le travail de recherche aura permis de structurer des arguments scientifiques propres à la pratique textile. Une structuration qui s’effectue par le biais d'objets à potentiel instrumental, ces objets sont dits intermédiaires de connaissances. Ces potentiels afin d’être validés, et de permettre de basculer les OIC en objets fermés et support de médiation, doivent avoir fait l’effort d’une normalisation afin d’être partageables voire standardisées. Une fois encadrés par approche instrumentale, ils peuvent être ensuite réemployées à des fins de création et de conception. L’intérêt du nuancier est donc bien de constituer une base pour la pratique afférent à un matériau et un procédé, et qui sert à la fois en conception sur des critères sensoriels, mais qui peut également, à titre individuel d’abord, servir en tant que système de connaissances, puis à titre collectif, si un effort de formalisation est réalisé21.

La lecture des échantillons est motivée par des aspects pratiques pour le designer, l’architecte ou l’artisan, cet intérêt s’en trouve renforcé s'il y a une possibilité d’appropriation22. Les nuanciers et échantillons doivent être structurés respectivement par à des qualités sensorielles et des propriétés physiques reliées23, et la relation entre qualités et propriétés doit faire l’effort d’une caractérisation afin de pouvoir développer un modèle commun opérant sur les deux niveaux de connaissances, permettant ainsi une approche par les sciences de la conception, dans leur acceptation la plus large (architecture, design, artisanat compris), et par les sciences des matériaux. Dans le cadre de recherches, le nuancier sensoriel peut ainsi être spécifié et caractérisé par une approche instrumentale qui vise à déduire des relations entre propriétés. Ces objets intermédiaires, nuanciers et référentiels d’échantillons, sont utiles pour perfectionner le classement. Les informations doivent cependant être synthétiques pour bénéficier d’une possibilité large de comparaison, pour cela il peut être nécessaire de produire des référentiels physiques qui permettent de visualiser des propriétés, et de structurer des visualisations de qualités sensorielles permettant de comparer les échantillons. Après avoir abordé les différents niveaux de complexité propre d’une matériauthèque à travers les objets intermédiaires qu’elle propose, nous voudrions maintenant inscrire ces enjeux dans un rapport entre objectivité des informations et représentativité des échantillons.

3. Situer la complexité entre objectivité et représentativité

L'approche de Lorraine Daston nous éclaire sur ce qu'est l'objectivité, un concept historiquement construit24. Les formes de l'objectivité ont progressivement changé depuis le XIXe siècle. Les limites d'une comparaison raisonnée à des modèles historiques est donc ici limitée, toutefois elle nous permet de distinguer des approches de recherche qui ont abouti à des modèles différents au cours du temps. La sélection des matériaux qui apparaît avec la métallurgie à la fin du XIXe25 est ainsi structurée par une approche de l'objectivité basée sur des propriétés mesurables, depuis une épistémologie visuelle vers des modèles mathématiques et qui s’appuie donc sur une objectivité bâtie à partir d'échelles fondamentales, puis dérivées26. Le poids scientifique de ces échelles participe ici d'une construction scientifique basée sur le calcul et la prédiction de comportement, une objectivité mécanique27. Ce modèle a assuré une pérennité et perduré au cours du temps, assurant nos méthodes de sélection contemporaines encore aujourd'hui, le diagramme d'Ashby étant la résultante de l'association de ces mesures. En revanche, les approches contemporaines de recherche, telles que la Recherche-Création28─ basée sur la pratique29 ─ se défendent d'un modèle construit à partir de la position du chercheur en tant que praticien. C'est-à-dire à partir d'un jugement exercé où le savoir-faire est situé et les biais seraient documentés. Cette position permet au chercheur de faire bénéficier à sa communauté des recherches et d'interprétations propres à un savoir tacite. La question des catégories sensorielles est primordiale pour d’aborder la question de la prédiction pour cette approche qui ne s’appuie pas sur un modèle d'objectivité mécanique ou structurale.

En prenant du recul vis-à-vis des catégories énoncées par Lorraine Daston, l’objectivité serait ce qui relève de la description stricte du réel. Dans notre cas il s’agit de produire une présentation des matériaux, où les informations sont précises pour permettre la fiabilité du calcul, mais où l’échantillon est représentatif d’une catégorie (une classe ou sous classe de matériaux) à destination d’un utilisateur. La présentation des échantillons est donc astreinte à un régime de complexité contenu entre représentativité des échantillons et objectivité des informations. C'est là, la limite de cette étude qui cherche des critères à la fois fidèles et utiles pour une matériauthèque. Il nous semble que c'est précisément ce que permettent les effort de structuration autour du rôle des référentiels et des nuanciers30. C’est également un problème de planification ─ "What should these systems do ?"31 ─ à laquelle nous avons tenté de répondre à travers une approche basée sur l'interprétation et la signification de l’action de l’échantillon dans le processus de conception, comme d'un problème basé sur les conditions de la connaissance chez les concepteurs.

Une autre manière de comprendre l’approche de Lorraine Daston serait d’observer la prépondérance de l’action de voir comme une capacité à rendre objectivables des objets scientifiques. Si l’action peut être décrite oralement, représentée visuellement, elle ne peut pas être traduite autrement que par un système de représentation. Les aspects sensoriels relatifs au toucher participent toutefois d’une construction culturelle et sémantique partagée et largement utilisée dans les disciplines de conception, renvoyant à des aspects de surface et de structure32. Ce type d’interactions joue un rôle particulier dans le domaine de l’artisanat, en effet les autres sens ne sont pas en mesure de décrire les interactions que sont les processus de transformation.

Cette liaison entre concevoir et fabriquer nous paraît structurellement mince. D’un point de vue théorique, l’association de concevoir et de fabriquer revient sans doute à expliciter le verbe concevoir comme étant de savoir ordonner de la distinction, action se concrétisant à travers l’usage d’instruments et de mesures qui en permettent l’exercice. Mais ce qui lie cette capacité de discernement à la fabrication passe par un ensemble de facteurs dont les instruments et mesures font partie, sans s’y limiter. Lorsqu'un artisan travaille la matière de manière organique, par l’usage d’un instrument mécanique ou robotisé, celui-ci se sert de mesures non plus au sens de qualités ex nihilo, mais pour ce qu’elles permettent de produire. Cet usage de la mesure a trait aux qualités sensorielles, reflet d’une interaction entre l’individu, l’instrument et le matériau. L’exigence de l’opération dépend alors de l’exigence de qualité de l’artisan basée sur son analyse sensorielle. Le degré de complexité existant entre concevoir et fabriquer est de l’ordre d’une qualité perceptive. Cette relation autour de la perception de ce qui est visible s’avère également présente au sein de la structuration de l’information des échantillons, jusque dans la question des propriétés, des échelles et des mesures. L’appréhension des échantillons est aussi liée à ce mode d’interaction spécifique, ces derniers permettent d’approcher la compréhension des informations de matériaux à travers une expérience sensorielle. Les informations servent à décrire les interactions attendues autant que la relation proprioceptive à la fabrication, entre le toucher et la vue. L’intérêt de la conception, c’est qu’il s’agit d’une méthode de vérification par des mesures afin de prédire le comportements de matériaux et permettre la planification des projets.

La question de l’objectivité de la fabrication ne peut être résolue par celle de la représentativité des OI. Si dans certains cas les outils de représentation sont suffisants pour projeter, comme le calcul en mathématiques, les propriétés dans la prédiction des comportements, le caractère non-maîtrisé d’un paramètre doit être encadré. Cette différence vient en souligner une seconde, la distinction entre la recherche qui cherche à comprendre les comportements des matériaux, de la conception et de la fabrication qui doit les anticiper pour les utiliser. En conclusion, ce lien aux propriétés possède le double intérêt de pouvoir progressivement normaliser les processus de caractérisation par une démarche empirique, auquel la matériauthèque se doit d’adjoindre un caractère instrumental pour permettre de prédire convenablement quels usages doivent être préconisés d’un matériau.

Conclusion

Les types de problèmes auxquels sont confrontés les planificateurs – les problèmes sociétaux – sont intrinsèquement différents de ceux auxquels sont confrontés les scientifiques et peut-être certaines catégories d'ingénieurs. Les problèmes de planification sont intrinsèquement complexes. Contrairement aux problèmes des sciences naturelles, qui sont définissables et séparables et peuvent avoir des solutions identifiables, les problèmes de planification gouvernementale – et en particulier ceux de la planification sociale ou politique – sont mal définis et leur résolution repose sur un jugement politique difficile à cerner.33
Trouver le problème revient donc à trouver la solution ; le problème ne peut pas être défini tant que la solution n'a pas été trouvée. La formulation d'un problème complexe est le problème !
34

Quel lien existe entre l’objet intermédiaire de connaissance et l’instrument d’action publique ? Si l’instrument d’action publique est un problème complexe de planification dont les logiques d’action dépendent des acteurs, l’échantillon au sein de la matériauthèque joue le rôle d’un intermédiaire pour la conception et la connaissance, mais également pour la planification de cet espace. L’action de la matériauthèque en tant qu’instrument, pouvant être évaluée à partir d’indicateurs matériels, s’appuie essentiellement sur le caractère interopérable des échantillons. Ces derniers supportent des connaissances ayant trait à la conception et la recherche. Il est le dénominateur permettant de structurer un indicateur d’ouvrabilité de la matériauthèque en tant qu’instrument. Son interopérabilité permet de pouvoir comparer, de sélectionner, et donc d’utiliser la matériauthèque. Enfin, le choix des échantillons opèrent d’au moins deux niveaux sensoriels d’expérience, et sa classification est basée sur ces deux ensembles. Bien que celle-ci soit toujours structurée par un classement par propriétés, son appréhension pourra, nous l’imaginons, développer une singularité propre : une sélection basée sur l’interaction matérielle avec les échantillons reposant sur un système d’informations.

Plus les échantillons sont représentatifs, plus leur mode de représentation est fragile au regard d'une objectivité scientifique qui permettrait de déduire des connaissances utiles. Il y a donc un intérêt à adopter un compromis utile basé sur la complexité du lien entre représentativité et objectivité des matériaux présentés. Pour trouver la raison d'être des matériauthèques nous avons été amenés à considérer leur logique de fonctionnement, les méthodes de sélection ainsi que les mesures utilisées en sciences de la conception. Les catégories sensorielles permettent d'identifier les verrous entre fabrication et conception afin d’échanger, transmettre et sélectionner réciproquement des connaissances relevant des savoir-faire et du savoir scientifique. Enfin, les nuanciers et référentiels permettent d’approcher ces catégories. Mais la question de l'échantillon reste entière, et la question des logiques d'action seule ne peut y répondre, émettons ici l'hypothèse d'un savoir limité contraint aux événements de la pratique, que la sociologie et la théorie de l'action seules ne peuvent atteindre.

Bibliographie

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  1. La Grande Matériauthèque est un projet mené par le Campus Mode Métiers d’Art & Design, comprenant une cinquantaine d'établissements parisiens spécialisés sur les enseignements design et métiers d’art, du CAP au doctorat. Le Campus Mode, Métiers d’art & Design est créé en 2019 sous l’impulsion de la création de labels « campus des métiers et des qualifications » (Décret n° 2014-1100 du 29 septembre 2014). Cette Grande Matériauthèque vise ici à valoriser et à transmettre des savoirs pertinents aux différents acteurs, de différents niveaux de connaissances de l’apprenti à l’expert, dans une approche pluridisciplinaire qui croise des domaines aussi variés que l’artisanat, le vêtement, l’espace, le design d'objet, d’intérieur, industriel et textile. 

  2. « Un instrument d’action publique constitue un dispositif à la fois technique et social qui organise des rapports sociaux spécifiques entre la puissance publique et ses destinataires en fonction des représentations et des significations dont il est porteur. Cette approche s’appuie sur les travaux d’histoire des techniques et de sociologie des sciences qui ont dénaturalisé les objets techniques, en montrant que leur carrière repose davantage sur les réseaux sociaux qui se forment à partir d’eux que sur leurs caractéristiques propres. Gilbert Simondon est l’un des premiers à avoir étudié une innovation, non pas comme la matérialisation d’une idée initiale, mais comme une dynamique souvent chaotique de mise en convergence d’informations, d’adaptation à des contraintes et d’arbitrage entre des voies de développement divergentes. » Lascoumes, Pierre, Le Galès, Patrick, « L’action publique saisie par ses instruments », Lascoumes, Pierre, Le Galès, Patrick (dir.), Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Sciences Po, 2005, p.13. 

  3. Ils permettent notamment d’affiner des spécifications de performances perçues sous forme de profils sensoriels analogiques interagissant comme des médiateurs ouverts. Cette perspective est à mettre en regard d’un ensemble de thèses basées sur la pratique travaillant autour du concept de matière à création

  4. Romani, Alessia ; Rognoli, Valentina ; Levi, Marinella, « Materials Libraries: designing the experiential knowledge transfer through prototyping », EKSIG Proceedings, 2023, p. 398-411. 

  5. Wilkes, Sarah, « Materials Libraries as Vehicles for Knowledge Transfer », Anthropology Matters Journal, vol. 13, n° 1, 2011. 

  6. Ashby, Michael ; Johnson, Kara, Materials and Design, The Art and Science of Material Selection in Product Design (2002), Oxford, Butterworth-Heinemann, rééd. 2014. L’ouvrage Materials and Design, The Art and Science of Material Selection in Product Design est écrit car la méthode de sélection issue de l’ingénierie des matériaux proposée par Michael Ashby ne convient pas aux profils sans connaissance des propriétés théoriques des matériaux, comme les concepteurs ou les artisans. Kara Johnson et Michael Ashby associent alors à l'analyse quantitative des propriétés sensorielles afin de déterminer un modèle de sélection des matériaux pour les designers. La définition des qualités sensorielles échappe à l’instrumentation. Par ailleurs, les enquêtes sur les propriétés sensorielles ont abouti à un certain nombre d’études qui tendent à valoriser la question des procédés et des usages pour matérialiser l’expérience recherchée d’un produit. 

  7. « Material libraries are design-oriented collections of physical material samples, which are used to inspire or support the materialization of designers’ ideas. Their general remit has been to reintroduce materials as physical entities (samples) serving design practice and research, something that had been observed to be missing since the beginning of the 20th century. » (traduction de l’auteur). Akın, Fazil ; Pedgley, Owain, « Sample Libraries to Expedite Materials Experience for Design: A Survey of Global Provision », Materials & Design, vol. 90, 2016, p. 1208. 

  8. Elvin Karana développe une approche de conception orientée par le matériau, Material Driven Design (MDD), et de développer une méthode de qualification de l’expérience recherchée (material experience). Cette méthode cherche à traduire l’expérience des matériaux à travers différents critères sensoriels : température, poids, élasticité, ductilité, dureté, rugosité, réflectivité, brillance, opacité, absorption (choc). Karana, Elvin ; Hekkert, Paul ; Kandachar, Prabhu. « A tool for meaning driven materials selection », Materials and Design, vol. 31, 2020, p. 2932-2941. 

  9. « Here, the usefulness of ‘materials as samples’ and ‘products as samples’ becomes a critical point
    of discussion. The research established the ratio between these sample types is on average 4:1 across
    the survey participants. Material samples provide an objective ‘level playing field’ that can facilitate meaningful side-by-side comparison of relative material strengths and weaknesses. However, material samples on their own lack contextual information on how they can be used in designs. Although the appraisal of material properties (visual, tactile, acoustic etc.) can be efficiently achieved from a material sample, the connection to the conception of new ‘things’ can be difficult or even cryptic. Only after a material is turned into an object can it be categorized into a system based on function, culturally embedded meaning and value. » g that had been observed to be missing since the beginning of the 20th century. » (traduction de l’auteur). Akın, Fazil ; Pedgley, Owain, op. cit., p. 1213. 

  10. « La notion d'ouverture est liée à un objet laissant à l'utilisateur une marge de manœuvre au sein de laquelle il peut plus ou moins diverger. En revanche, un objet fermé diminue et tend à faire disparaître cette marge de manœuvre. L'objet ouvert incite à un travail d'interprétation, tandis que l'objet fermé transmet une prescription ». Mer, Stéphane ; Jeantet, Alain ; Tichkiewitch, Serge, « Les objets intermédiaires de la conception : modélisation et communication », Le communicationnel pour concevoir, Europia Productions, 1995, p. 21-41. 

  11. Wongsriruksa, Supinya ; Howes, Philip ; Conreen, Martin ; Miodownik, Mark, « The use of physical property data to predict the touch perception of materials », Materials and Design, vol. 42, 2012, p. 238-244. 

  12. « As a collection of material-objects, there are limitations to the cubes that effect their ability to represent the science of materials. Whilst the encounters do offer the experience of mass, they do not draw out the nuances of the difference between mass and density. For this the variable of volume would need to be introduced by the creation of cubes made from different materials, with different volumes but equal masses, resulting in a set of cubes of different sizes but equal weight. The cubes do offer a way of experiencing specific materials that induces wonder and sensory pleasure in the visitor but the set does not perform more than mass and an opportunity of a taxonomic critique of matter. The ability of the encounter as a method to reveal haptic materiality is clear, though the specifics of the knowledge gained in an encounter is dependent upon the nature of the material-object. » Laughlin, Zoé, « Beyond the Swatch: How can the Science of Materials be Represented by the Materials Themselves in a Materials Library? », thèse de doctorat, King’s College London, 2010, p. 133. 

  13. Wilkes, Sarah ; Wongsriruksa, Supinya ; Howes, Philip ; Gamester, Richard ; Witchel, Harry ; Conreen, Martin ; Laughlin, Zoe ; Miodownik, Mark, « Design tools for interdisciplinary translation of material experiences », Materials and Design, vol. 90, 2016, p. 1228-1237. 

  14. A la suite de ces conclusions, Sarah Wilkes conclut que matériauthèques sont un espace privilégié pour le transfert de connaissances. Wilkes, Sarah, « Materials Libraries as Vehicles for Knowledge Transfer », Anthropology Matters Journal, vol. 13, n° 1, 2011. 

  15. « Ces objets ─ textes, graphes, modèles informatiques, maquettes ─ ont un triple rôle de « traduction », de « médiation », et de « représentation » des actions. » Jeantet, Alain, « Les objets intermédiaires dans la conception. Éléments pour une sociologie des processus de conception », Sociologie du Travail, vol. 40, n°3, 1998, p. 291. 

  16. Duarte Poblete, Sofia, Anselmi, Laura ; Rognoli, Valentina, « Materials designers and the translational approach: a case from a product design company », DRS2024, Boston, juin 2024.
    Hornbuckle, Rosie, « Mobilizing Materials Knowledge: exploring the Role of Samples for Supporting Multidisciplinary Collaborative Design for Materials Development », The Design Journal, vol. 24, n° 2, 2021, p. 277-297. 

  17. Vinck, Dominique, « De l’objet intermédiaire à l’objet-frontière. Vers la prise en compte du travail d'équipement », Revue d’anthropologie des connaissances, vol.1, 2009, p. 62. 

  18. Bassereau, Jean-François ; Charvet-Pello, Régine ; Faucheu, Jenny ; Delafosse, David, « Les objets intermédiaires de conception / design, instruments d’une recherche par le design », Sciences du Design, n°2, 2015, p. 55. 

  19. Saint-Pierre, Anna, « Textiliser la mémoire bâtie par la réutilisation in situ des déchets architecturaux », thèse de doctorat, École des Arts Décoratifs - Université PSL, 2022.
    Mongin, Antonin, « L’artisanat d’art du cheveu : le cheveu comme matière à création d’une recherche par la pratique du design textile », thèse de doctorat, École des Arts Décoratifs - Université PSL, 2022.
    Schmitt, Joséphine, « Innovation en Mode et Luxe “ Matières à création “ : une approche des matériaux par le design Cas d’étude d’une maison de plumasserie », thèse de doctorat, Mines Saint-Étienne, 2023. 

  20. Parisi, Stefano ; Rognoli, Valentina ; Sonneveld, Marieke, « Material Tinkering. An inspirational approach for experiential learning and envisioning in product design education », The Design Journal, 2017, p. 1167-1184. 

  21. Weaver, Warren, « Science and complexity », American Scientist, 36, 1948, p. 544. 

  22. Tour, Antoine, « Material Sample as a Design Aid for Material Selection in the Practice Based Approach », P/References of Design, Cumulus Conference Proceedings Budapest 2024, sous presse. 

  23. À la différence d’une propriété qui serait mesurable, on appellera qualité un ensemble de propriétés qui permettent d’évaluer un ou plusieurs aspects perceptibles d’un produit. Si l’évaluation de la qualité est régie par des normes basées sur une approche standardisée, une qualité sensorielle bien que pouvant être approchée par une méthode instrumentale, encadrée par des propriétés, reste toutefois limitée au caractère interactionnel de la proprioception, relative à chaque individu. La qualité n’est donc pas réductible au seul ensemble de propriétés. De la même manière, un artisan qui travaille un matériau interagit par la reconnaissance de critères sensoriels au sein des manipulations qu’il effectue. Ces derniers constituent des qualités qui sont régies par une évaluation de la qualité. Un savoir-faire qui n’est toutefois pas uniquement réductible à un ensemble de qualités sensorielles. 

  24. Daston, Lorraine, « Objectivity and the escape from perspective », Social Studies of Science, vol 22, n°4, nov. 1992, p. 597-618. 

  25. Friedman, Michael ; Krauthausen, Karin, « On the Agency and Activity of Materials in the 21st Century », Spontaneous Generations, vol. 11, n°1, 2023, p. 5. 

  26. « It is conventional in physics to distinguish between two types of ratio scales : fundamental and derived. Fundamental scales are represented by length, weight, and electrical resistance, whereas derived scales are represented by density, force, and elasticity. These latter are derived magnitudes in the sense that they are mathematical functions of certain fundamental magnitudes. They are actually more numerous in physics than are the fundamental magnitudes, which are commonly held to be basic because they satisfy the criterion of additivity. Weights, lengths, and resistances can be added in the physical sense, but this important empirical fact is generally accorded more prominence in the theory of measurement than it deserves. The so-called fundamental scales are. important instances of ratio scales, but they are only instances. As a matter of fact, it can be demonstrated that the fundamental scales could be set up even if the physical operation of addition were ruled out as impossible for performance. Given three balances, for example, eaéh having the proper construction, a set of standard weights could be manufactured without it ever being necessary to place two weights in the same scale pan at the same time. The procedure is too long to describe in these pages, but its feasibility is mentioned here simply to suggest that physical addition, even though it is sometimes possible, is not necessarily the basis of all measurement. Too much measuring goes on where resort can never be had to the process of laying things end-to-end or of piling them up in a heap ». Stevens, Stanley Smith, « On the Theory of Scales of Measurement », Science, vol. 103, n° 2684, 1946, p.677-680. 

  27. Les termes objectivité mécanique, objectivité structurale et jugement exercé sont empruntés de ces recherches. Daston, Lorraine ; Galison, Peter, Objectivity, Zone Books, 2007. 

  28. Raîche-Savoie, Geneviève ; Déméné, Claudia, « La pluralité de la recherche en design : tentative de clarification et de modélisation de la recherche-action, de la recherche-création et de la recherche-projet », Sciences du Design, vol. 16, décembre 2022, p.10-20. 

  29. Mäkelä, Maarit, « Knowing Through Making: The Role of the Artefact in Practice-led Research », Knowledge, Technology & Policy, vol. 20, 2007, p.157–163. 

  30. « If science deals with quantitative problems of a purely logical character, if science has no recognition of or concern for value or purpose, how can modern scientific man achieve a balanced good life, in which logic is the companion of beauty, and efficiency is the partner of virtue? In one sense the answer is very simple: our morals must catch up with our machinery. To state the necessity, however, is not to achieve it. The great gap, which lies so forebodingly between our power and our capacity to use power wisely, can only be bridged by a vast combination of efforts. Knowledge of individual and group behavior must be improved. Communication must be improved between peoples of different languages and cultures, as well as between all the varied interests which use the same language, but often with such dangerously differing connotations. » Weaver, Warren, opus cite, p. 544. 

  31. Rittel, Horst W. J., « Dilemmas in a General Theory of Planning », Policy Sciences, n°4, 2 juin, 1973, p. 157.
    « By now we are all beginning to realize that one of the most intractable problems is that of defining problems (of knowing what distinguishes an observed condition from a desired condition) and of locating problems (finding where in the complex causal networks the trouble really lies). In turn, and equally intractable, is the problem of identifying the actions that might effectively narrow the gap between what-is and what-ought-to-be. As we seek to improve the effectiveness of actions in pursuit of valued outcomes, as system boundaries get stretched, and as we become more sophisticated about the complex workings of open societal systems, it becomes ever more difficult to make the planning idea operational. ». Ibid., p.159. 

  32. Wongsriruksa, Supinya ; Howes, Philip ; Conreen, Martin ; Miodownik, Mark, « The use of physical property data to predict the touch perception of materials », Materials and Design, vol. 42, 2012, p. 238-244. 

  33. « The kinds of problems that planners deal with - societal problems - are inherently different from the problems that scientists and perhaps some classes of engineers deal with. Planning problems are inherently wicked. As distinguished from problems in the natural sciences, which are definable and separable and may have solutions that are findable, the problems of governmental planning - and especially those of social or policy planning - are ill-defined; and they rely upon elusive political judgment for resolution. ». (traduction de l’auteur). « Dilemmas in a General Theory of Planning », Policy Sciences, n°4, 2 juin, 1973, p.160. 

  34. « To find the problem is thus the same thing as finding the solution; the problem can't be defined until the solution has been found. The formulation of a wicked problem is the problem! ». (traduction de l’auteur). Ibid., p.161.